Nous, les humains, n’avons pas besoin de viande. De fait, nous sommes en meilleure santé sans elle ou, à tout le moins, en moins grande quantité dans notre alimentation. Les études sur la santé Adventist fournissent de solides données probantes selon lesquelles les régimes végétaliens, végétariens et à faible teneur en viande sont associés à des augmentations statistiquement significatives de la qualité de vie et à des hausses modérées de l’espérance de vie1. Le monde où l’on habite serait aussi plus sain sans l’industrie des viandes commerciales. L’élevage industriel est un gaspillage de ressources; il est dommageable pour l’environnement et éthiquement indéfendable2. L’heure est venue d’accepter qu’un régime à base de végétaux est meilleur pour nous individuellement, pour la race et pour la planète.
Problèmes de santé
Obésité.
Des études épidémiologiques3–5 signalent qu’au sein de la population canadienne, 62,1 % des gens ont un excès de poids et 25,4 % sont obèses. Chez les enfants et les jeunes Canadiens de 5 à 17 ans, 32 % sont en surpoids ou obèses. Dans l’ensemble, 40 % des hommes et 29 % des femmes de 18 ans et plus font de l’embonpoint, et 27 % des hommes et 25 % des femmes sont obèses. Les végétariens et les végétaliens, quels que soient leur âge, leur sexe et leur lieu d’habitation, sont plus minces que les omnivores1,6, et chez ces personnes, la prévalence de l’obésité est beaucoup plus faible (< 6 %).
Taux de cholestérol malsains.
Même si le cholestérol est essentiel à la santé humaine, de forts taux dans le sang peuvent entraîner l’athérosclérose et des maladies cardiovasculaires. Au Canada7, 6 % des 6 à 19 ans, 12 % des 20 à 39 ans et 40 % des 40 à 59 ans ont des taux élevés de cholestérol de lipoprotéines de faible densité. Les enfants obèses ont 9 fois plus de cholestérol dans leur sang que les enfants en santé de poids normal et cette tendance se maintient à l’âge adulte. Le cholestérol alimentaire provient uniquement des produits d’origine animale, comme les viandes, les poissons, les œufs et le lait. Une analyse transversale d’un échantillon de 424 consommateurs de viande, de 425 consommateurs de poisson, de 423 végétariens et de 422 végétaliens a démontré que les concentrations sériques de cholestérol total, de cholestérol de lipoprotéines autres qu’à forte densité et d’apolipoprotéines B étaient significativement plus faibles chez les végétaliens (p < ,001)8.
Diabète.
Le diabète de type 2 (DT2) connaît une croissance chez les enfants et les jeunes du monde entier; il se développe habituellement à la puberté ou après. Ce trouble est associé à de sérieuses comorbidités, dont l’hypertension, la stéatose hépatique non alcoolique et la dyslipidémie. À long terme, les complications vasculaires (vasculopathies périphériques, coronaropathies et maladies cérébrovasculaires) sont probables9. En 2010, l’incidence du DT2 se situait à 1,54 cas par 100 000 enfants canadiens de moins de 18 ans, ou à au moins 113 nouveaux cas de DT2 infantile chaque année. L’âge moyen au diagnostic était de 13,7 ans et 8 % d’entre eux avaient moins de 10 ans. Dans l’ensemble, 95 % des enfants ayant reçu un nouveau diagnostic de DT2 étaient obèses, 45 % avaient une dyslipidémie mesurable et 28 % souffraient d’hypertension. À plus long terme, les statistiques démontrent que de 6 à 7 % de tous les Canadiens et les 2 tiers des adultes canadiens obèses développeront un DT2. Seulement 15 % des personnes atteintes de DT2 ont un poids normal10–12. Il est 2 fois moins probable que les végétariens et les végétaliens développent un DT2 par rapport aux consommateurs de produits d’origine animale1,13.
Cancer.
En 2015, l’Organisation mondiale de la Santé a passé en revue les données probantes associant la consommation de viande rouge et transformée avec le cancer colorectal14. Une méta-analyse de 10 études de cohortes a signalé une relation dose-réponse statistiquement significative entre la consommation de viande et le risque de cancer colorectal, notamment une hausse du risque de 17 % (IC à 95 % de 1,0 à 1,31 %) par 100 g par jour de viandes rouges et un risque accru de 18 % (IC à 95 % de 1,10 à 1,28 %) par 50 g par jour de viande transformée. Il y avait suffisamment de données probantes chez l’humain pour classer les charcuteries (saucisses, bacon, jambon, bœuf séché, bœuf salé, et autres viandes fumées, salées, fermentées ou salaisonnées) dans le groupe 1 des carcinogènes. Bien entendu, les végétaliens et les végétariens ne consomment pas de viande.
Sensibilisation nutritionnelle nécessaire.
Il faut une bonne compréhension de la nutrition et une certaine éducation avant de décider de suivre un régime principalement à base de végétaux. Cependant, selon l’Academy of Nutrition and Dietetics,
les régimes végétariens bien planifiés, y compris les régimes végétaliens, sont sains, adéquats sur le plan nutritionnel et peuvent apporter des bienfaits pour la santé dans la prévention et le traitement de certaines maladies. Ces régimes sont appropriés à toutes les étapes du cycle de vie, notamment la grossesse, l’allaitement, la petite enfance, l’enfance, l’adolescence et l’âge adulte, et ils conviennent aux athlètes15.
Tous les végétaliens devraient prendre des suppléments suffisants de vitamine B12 et de vitamine D et s’assurer d’avoir un apport approprié de calcium et de fer.
Problèmes environnementaux
De nos jours, les animaux de boucherie sont principalement élevés dans de grandes ou très grandes installations d’élevage intensif et dans des installations d’alimentation d’animaux enfermés. Ces installations industrielles comptent chacune plusieurs milliers d’animaux et produisent collectivement 74 % de la volaille (poulet et dinde), 50 % du porc, 43 % du bœuf et 68 % des œufs dans le monde16.
Utilisation des ressources.
Les 60 milliards d’animaux destinés chaque année à la consommation humaine utilisent d’énormes ressources planétaires17. Au total, 55 % du maïs produit aux États-Unis, 40 % des récoltes mondiales de céréales et plus de 85 % du soja cultivé dans le monde servent à l’alimentation des animaux. De même, près de 50 % des récoltes de poissons fourrages, soit 37 % de la récolte annuelle totale de poisson, sont utilisées comme aliments (huile et farine de poisson) dans l’aquaculture (46 %) et les industries du porc (24 %) et de la volaille (22 %). Une grande partie des terres, de l’énergie et de l’eau servant à la culture du fourrage destiné à la production intensive d’animaux pourrait être utilisée de manière plus efficiente pour produire des aliments consommés directement par les gens.
Émissions.
La production mondiale de bétail est actuellement responsable de 18 % des émissions de gaz à effet de serre induites par l’humain, soit une proportion plus élevée que le transport à l’échelle du globe (14 %). Sur le plan mondial, 37 % des émissions de méthane, 65 % des émissions d’oxyde nitreux et 9 % des émissions de dioxyde de carbone sont attribuables à la production du bétail. De plus, 64 % des émissions d’ammoniaque ont pour origine la production du bétail, et elles contribuent à la pollution de l’air, du sol et de l’eau, à la pluie acide et aux dommages à la couche d’ozone18.
Inefficience.
La production de viande est très peu efficace17. Pour produire 1 kg de viande comestible selon les méthodes industrielles habituelles, il faut 20 kg d’aliments pour le bœuf, 7,3 kg d’aliments pour le porc et 4,5 kg d’aliments pour le poulet. En moyenne, dans le monde, la production de seulement 1 kg de bœuf consomme près de 15 500 litres d’eau, soit l’équivalent de 90 baignoires pleines. C’est près de 12 fois plus que la quantité nécessaire pour produire 1 kg de blé. Ce même kilogramme de bœuf nécessite 15 fois plus de terre que la production de 1 kg de céréales et 70 fois plus que la production de 1 kg de légumes. La production de 1 kg de porc utilise 6 fois plus de terre que celle de 1 kg de céréales et 30 fois plus que la production de 1 kg de légumes.
Rareté.
La demande de céréales fourragères augmente les pressions écologiques exercées sur les terres à pâturage, déjà rares17,18. Les activités de production d’animaux se déplacent vers des terres marginales où les pâturages excessifs entraînent la désertification et la déforestation. En Amérique du Sud, la production de soja destiné aux fermes-usines d’Europe et d’ailleurs cause la destruction de forêts tropicales humides. Ces dommages causés aux habitats de la faune et de la flore par la production d’animaux menacent considérablement la biodiversité planétaire.
Mondialement, jusqu’à 2 milliards de personnes souffrent de la rareté de l’eau19. La production de bétail utilise déjà 15 % des eaux d’irrigation, et cette part devrait augmenter de 50 % d’ici 2025. La consommation accrue de viande a été identifiée comme la principale cause de l’aggravation de la pénurie d’eau en Chine. En réduisant la proportion de notre régime à base d’animaux et en augmentant notre alimentation à base de végétaux, nous pourrions réduire individuellement presque de moitié notre empreinte sur l’eau.
Pollution.
Le fumier animal et les quantités excessives d’engrais utilisés pour produire les aliments pour animaux sont toxiques pour l’environnement20. La teneur élevée en azote et en phosphore des eaux de ruissellement (provenant des champs fertilisés au fumier) et des déversements est considérée comme étant instrumentale dans l’eutrophication (surenrichissement en nutriments) généralisée et l’apparition subséquente d’algues, qui ont proliféré dans les lacs et les estuaires au cours des 30 à 40 dernières années. De grandes superficies (dont le golfe du Mexique, où c’est chose connue) sont devenues effectivement des zones mortes parce que l’eutrophication réduit l’oxygène à des niveaux insuffisants pour soutenir la vie aquatique. La production de bétail peut en outre polluer les réserves d’eau douce avec des sédiments (par l’érosion du sol), des pesticides, des antibiotiques, des métaux lourds et des pathogènes comme les Salmonella, les Campylobacter et les Escherichia coli.
Conclusion
Ce que nous mangeons influence grandement notre santé individuelle et celle de l’environnement que nous partageons tous. Le régime alimentaire nord-américain typique est fortement associé à l’obésité, au diabète, aux maladies cardiovasculaires, aux niveaux malsains de cholestérol, à l’hypertension, à la maladie d’Alzheimer et à certains cancers1,13. L’association opposée se produit avec des régimes végétaliens et végétariens suivis de manière appropriée.
La réduction de notre dépendance sociétale à l’endroit de l’agriculture axée sur les viandes pour adopter un régime agricole entièrement végétal apporterait de nombreux bienfaits écologiques. Elle aurait pour résultats une utilisation plus efficace des terres; une moins grande production de gaz à effet de serre; moins de pollution de l’air, du sol et de l’eau; une réduction de la nécessité de faire des coupes à blanc; moins de dommages aux habitats de la faune et de la flore; et un usage réduit des eaux agricoles. Une baisse dans la consommation de viande diminuera éventuellement la production de viande. Ainsi, de nombreux pays développés pourraient passer d’une production intensive de céréales (utilisées comme aliments pour animaux) au profit d’une rotation des cultures qui est bénéfique pour le sol, et mettre un terme à leur dépendance à l’endroit des engrais à base d’azote synthétique, énergivores et polluants.
Nous, les humains, sommes ultimement responsables de la santé individuelle, sociétale et planétaire. Les médecins sont bien placés pour préconiser des changements au mode de vie comme outils épidémiologiques et pour la santé personnelle. En réduisant la dépendance à l’endroit des produits de la viande, individuellement et mondialement, nous pouvons évoluer vers une vision du monde plus saine et certainement plus durable.
Un tel cheminement commence par un premier pas. Faites le vôtre : réduisez votre consommation de viande, ouvrez votre esprit face à l’interdépendance entre les choix humains et la santé planétaire et, avant tout, consommez des fruits, des céréales et des légumes!
Footnotes
Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.
This article is also in English on page 744.
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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