Question clinique
L’introduction hâtive des arachides dans l’alimentation durant la petite enfance influence-t-elle le développement d’une allergie à cet aliment?
Résultats
L’introduction hâtive des arachides réduit le risque d’allergie aux arachides chez les nourrissons à risque élevé, passant de 17,2 à 3,2 % à 5 ans. Les tout-petits à risque normal pourraient aussi en bénéficier. Étant donné que 9 % des nourrissons à risque élevé avaient été exclus d’une étude en raison de résultats positifs au test par piqûre épidermique (TPE), il serait avisé de procéder à une investigation chez les enfants à risque plus élevé avant de les exposer aux arachides.
Données probantes
Dans une ERC, des nourrissons à risque élevé (eczéma sévère, allergie aux œufs ou les 2) âgés de 4 à 11 mois (N = 640) ont été choisis au hasard pour consommer des arachides (6 g/semaine) ou s’en abstenir1.
-À 5 ans, les résultats des tests de provocation alimentaire avec des arachides étaient positifs chez 3,2 % des nourrissons du groupe en ayant consommé par rapport à 17,2 % dans le groupe n’en ayant jamais mangé (nombre de sujets à traiter de 8).
-Parmi les préjudices observés, 7 des 319 nourrissons ont eu une réaction à la provocation alimentaire orale de départ dans le groupe de la consommation (6 ont eu besoin d’antihistaminiques, 1 de corticostéroïdes par voie orale). À 5 ans, 1 enfant du groupe de l’abstention a dû recevoir de l’épinéphrine à la suite de la provocation alimentaire orale.
-L’étude avait pour limites l’absence d’un groupe prenant un placebo et l’exclusion des enfants si leurs résultats au TPE étaient de plus de 4 mm (9 % des nourrissons).
Dans une autre ERC, des nourrissons à risque normal nourris par allaitement maternel (N = 1303) âgés de 3 mois étaient choisis aléatoirement pour une introduction hâtive de 6 allergènes dans leur alimentation (p. ex. 2 g d’arachides/semaine) ou l’évitement de tout aliment allergène avant 6 mois2.
-À l’âge de 1 à 3 ans, il n’y avait pas de différence significative dans les résultats positifs à la provocation alimentaire orale avec des arachides (1,2 % dans le groupe de la consommation hâtive c. 2,5 % dans le groupe de l’évitement).
-L’étude était limitée par son protocole complexe qui a entraîné des différences statistiquement significatives dans la conformité aux consignes (93 % dans le groupe de l’évitement; 43 % dans celui de l’introduction hâtive), de même que par l’exclusion des nourrissons ayant une sensibilité aux arachides (résultats au TPE > 0 mm).
Une étude observationnelle a fait le suivi de nouveau-nés (N = 2124) pour examiner le moment de l’introduction des aliments et la sensibilisation3. L’évitement des arachides durant la première année a augmenté le risque de sensibilisation (résultats au TPE > 2 mm) (rapport de cotes de 1,76; IC à 95 % de 1,07 à 3,01).
-Parmi les limites de l’étude figuraient un biais de rappel potentiel et l’absence de provocation alimentaire orale de confirmation.
Contexte
L’hypothèse de l’exposition hâtive provenait de l’observation d’un risque 10 fois moins grand d’allergie aux arachides chez les enfants israéliens par rapport aux enfants du R.-U. malgré une consommation plus élevée d’arachides durant la petite enfance (7,1 g/mois c. 0 g/mois)4
Une étude de cohortes de grande envergure (N = 10 907) a fait valoir une moins grande probabilité d’allergie aux arachides chez les enfants de mères non allergiques qui ont augmenté leur consommation d’arachides durant la grossesse à 5 fois par semaine ou plus, par rapport aux enfants de celles qui en avaient consommé moins de 1 fois par mois (rapport de cotes de 0,31; IC à 95 % de 0,13 à 0,75)5
Mise en pratique
Les enfants qui présentent un eczéma sévère ou une allergie aux œufs sont à risque plus élevé et nécessitent l’administration d’un test d’allergie, préférablement par TPE, avant de consommer des arachides6. Il est aussi possible de mesurer le taux sanguin d’immunoglobulines (Ig) E spécifiques aux arachides, mais un taux supérieur à 0,1 kUA/L n’exclut pas une allergie. Environ 21 % des nourrissons dont le taux d’IgE était inférieur à 0,35 kUA/L (généralement considéré un résultat négatif) auront des résultats positifs à la provocation alimentaire orale7. Les nourrissons présentant un eczéma léger ou modéré, ou sans eczéma ni autre allergie alimentaire, ne nécessitent pas d’autres évaluations. La mesure des IgE sanguins pour de nombreux aliments n’est pas recommandée en raison des résultats faux positifs. Il existe des lignes directrices et des recettes pour introduire les arachides dans l’alimentation6.
Notes
Les articles d’Outils pour la pratique dans Le Médecin de famille canadien (MFC) sont une adaptation d’articles publiés dans le site web du Collège des médecins de famille de l’Alberta (CMFA) qui résument les données médicales probantes en insistant sur des questions particulières et des renseignements susceptibles de modifier la pratique. Les résumés du CMFA et la série dans le MFC sont coordonnés par le Dr G. Michael Allan, et les résumés sont rédigés conjointement par au moins 1 médecin de famille en pratique active et ils font l’objet d’une révision par des pairs. Vous êtes invités à faire part de vos commentaires à toolsforpractice{at}cfpc.ca. Les articles archivés sont accessibles sur le site web du CMFA: www.acfp.ca.
Footnotes
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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