Action Cancer Ontario (ACC) est un organisme provincial responsable d’améliorer les résultats de la lutte contre le cancer en Ontario. Financé par le ministère de la Santé et des Soins de longue durée, l’ACC planifie et entreprend des programmes de lutte contre le cancer en partenariat avec 13 programmes régionaux de cancérologie dans la province. Au cours de la dernière décennie, le groupe des programmes cliniques d’ACC a travaillé avec les cliniciens des programmes régionaux pour améliorer la qualité, la sécurité et l’accessibilité des services de cancérologie allant du diagnostic aux soins palliatifs en passant par le suivi à long terme1. Dans le Plan de lutte contre le cancer en Ontario 2008–20112, on reconnaît que les professionnels des soins primaires jouent un rôle essentiel en cancérologie tout au long de l’expérience des patients. Ils influencent grandement la façon dont les patients comprennent les programmes de dépistage et y participent. Ils ont particulièrement contribué à améliorer les taux de dépistage et de détection précoce du cancer colorectal, du sein et du col de l’utérus. Les patients font confiance à leurs médecins de famille pour les conseiller et faire en sorte que le réseau de cancérologie réponde localement à leurs besoins durant leur expérience avec le cancer, tout en leur fournissant des soins continus ainsi qu’à leur famille. Par contre, avant 2008, l’ACC n’incluait généralement pas les médecins de famille dans la planification, la coordination et l’élaboration des services visant à améliorer la qualité des soins aux patients atteints du cancer.
En 2007, l’ACC et le Collège des médecins de famille de l’Ontario ont coparrainé un symposium dans le but de solliciter des conseils auprès des médecins de famille sur des façons de mieux intégrer et mettre à contribution les soins primaires dans le système de cancérologie3. De nombreuses recommandations ont été présentées, y compris la nomination de médecins de famille à des postes de direction reliés aux programmes régionaux de cancérologie. D’autres compétences provinciales et nationales ont nommé des professionnels des soins primaires à des postes régionaux de direction au sein de leur système de cancérologie. Le réseau Uniting Primary Care and Oncology au Manitoba a pour but de resserrer les partenariats entre les médecins de famille et le système de cancérologie et des «chefs MF» dans 18 pratiques collectives qui ont en commun des dossiers médicaux électroniques sur le cancer, entreprennent des séances d’éducation en petits groupes et sollicitent la rétroaction des patients4. Un rapport par Leese et ses collaborateurs sur des cliniciens en soins primaires occupant des postes de direction en cancérologie au Royaume-Uni a contribué à faire connaître certains des défis à relever dans l’établissement en Ontario d’un programme semblable à celui du Royaume-Uni5. Par exemple, ces dirigeants au Royaume-Uni ne sont pas nécessairement des médecins, mais ils doivent avoir de l’expérience et de la crédibilité, des contacts, de l’intérêt, et des habiletés en communication et en planification stratégique.
L’ACC a publié une description de sa stratégie provinciale sur les soins primaires dans la lutte contre le cancer6. En 2008, l’ACC a recruté une directrice provinciale des soins primaires (DPSP) chargée d’optimiser l’engagement et l’intégration des soins primaires dans la lutte contre le cancer. Elle devait tout d’abord concentrer ses efforts sur l’amélioration des taux de dépistage et de détection précoce du cancer en soins primaires, plus particulièrement pour le cancer colorectal. À plus long terme, l’objectif visé est de mieux intégrer les soins primaires dans l’ensemble de l’expérience des patients atteints de cancer. Pour s’acquitter de ce mandat, il était essentiel de créer un réseau de directeurs régionaux des soins primaires (DRSP) dans toutes les régions de la province. C’est pourquoi on a élaboré un processus pour recruter des DRSP dans chacun des 13 programmes régionaux de cancérologie. Le présent document résume brièvement ce processus de recrutement.
13 directeurs, 13 programmes et 14 réseaux
Les programmes régionaux de cancérologie d’Action Cancer Ontario sont des réseaux d’intervenants, de professionnels de la santé et d’organisations qui participent à la prévention et au traitement du cancer dans chacun des 14 réseaux locaux d’intégration des services de santé (RLISS) de la province. Chaque programme est dirigé par un vice-président régional (VPR) de l’ACC7. Au moment du recrutement des DRSP, on comptait 13 programmes régionaux de cancérologie, celui de Mississauga Halton/Centre Ouest couvrant 2 RLISS. Ainsi, 13 DRSP ont été recrutés dans 13 programmes régionaux de cancérologie et 14 RLISS.
Élaboration du contrat et des modalités de financement
Action Cancer Ontario s’est doté de réseaux provinciaux de dirigeants cliniques et en soins infirmiers dans divers secteurs: pathologie et médecine de laboratoire, chirurgie, thérapie systémique, radiothérapie, médecine de soins palliatifs et soins infirmiers oncologiques1. Chacun de ces réseaux cliniques provinciaux de dirigeants officiellement désignés sur les plans provincial et régional fonctionne en vertu d’une entente contractuelle semblable, telle que décrite dans leur mandat, et sous la direction du vice-président des programmes cliniques de l’ACC. Action Cancer Ontario met à contribution l’expertise de ces réseaux provinciaux pour l’aider à élaborer des stratégies pour appuyer les professionnels des soins oncologiques dans la province.
Action Cancer Ontario a établi une relation «d’achat de services»7 avec les hôpitaux régionaux et a de l’expérience dans la conclusion d’ententes pour recruter des dirigeants cliniques dans les spécialités oncologiques. Les ententes de recrutement sont conclues entre l’ACC et les hôpitaux régionaux dotés de programmes de cancérologie connexes. C’est au vice-président des programmes régionaux de l’ACC qu’il incombe de formuler ces ententes.
Le financement se fait à partir du nouveau programme ContrôleCancerColorectal qui prévoit l’équivalent du salaire d’un jour par semaine pour chaque DRSP. Les ententes sur un an sont structurées pour entrer en vigueur au moment du recrutement des DRSP.
Défis du recrutement de dirigeants des soins primaires
Chaque programme régional avait de l’expérience dans le recrutement de spécialistes régionaux en cancérologie à titre de dirigeants cliniques; par ailleurs, le recrutement des DRSP était légèrement différent.
D’abord, il y a de nombreux médecins de famille répartis un peu partout dans chaque région, pratiquant en milieu urbain ou rural et selon divers modèles de pratique et de financement. Rares étaient les programmes régionaux de cancérologie qui connaissaient leur communauté de soins primaires ou avaient des listes les décrivant.
Deuxièmement, les médecins de famille ont des relations avec les centres régionaux de cancérologie qui sont différentes de celles qu’entretiennent les spécialistes en oncologie. Les spécialistes en cancérologie travaillent souvent directement à l’hôpital, tandis que les médecins de famille travaillent surtout à leur cabinet et ne se rendent parfois jamais à l’hôpital. Certains programmes de cancérologie exigent que leurs dirigeants cliniques aient des privilèges hospitaliers, mais ils restreignent l’accès à de tels privilèges pour les médecins de famille.
Troisièmement, certains médecins de famille limitent leur participation au traitement des patients atteints du cancer, tandis que d’autres s’impliquent entièrement dans tous les aspects des soins de cancérologie à leurs patients.
Quatrièmement, l’étendue des responsabilités d’un DRSP, même si les fonctions ne concernaient initialement que le dépistage du cancer colorectal, est plutôt vaste et dépasse largement la journée par semaine allouée. Il faut gérer avec prudence les attentes des programmes provinciaux et régionaux, car les ressources à l’appui de ces postes sont très limitées.
Pour toutes ces raisons, quand on a rédigé les ententes contractuelles régionales, il était nécessaire de tenir compte de la nature évolutive du poste et du manque de précision entourant ce qu’il en adviendra éventuellement.
Processus du recrutement
La DPSP a organisé une téléconférence avec tous les VPR pour discuter du processus de recrutement conjoint dans chaque région et le confirmer. On visait à miser sur leur expérience dans le recrutement d’autres dirigeants cliniques (chirurgie, soins palliatifs, etc.). Quoique certains VPR aient trouvé le processus de recrutement plus formel que celui habituellement suivi, tous étaient d’accord pour le mettre à l’essai.
Tous les VPR ont accepté de partager avec ACC les listes en leur possession, ou qu’ils pourraient obtenir de leur RLISS ou d’autres sources, pour commencer à établir un profil des médecins de famille dans la province. En général, la plupart des programmes régionaux de cancérologie envoient des lettres de recrutement invitant le plus grand nombre de médecins de famille possible dans la région à poser leur candidature. L’encadré 1 présente les qualités et les compétences recherchées du candidat idéal, qui étaient expliquées dans la lettre de recrutement, et l’encadré 2, montre la version finale de l’aperçu du poste de DRSP.
Qualités et compétences du candidat idéal comme DRSP
Le candidat idéal a…
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Et le candidat idéal est…
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DRSP - Directeur régional des soins primaires
Aperçu du poste de DRSP
Le DRSP est appelé à…
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DRSP - Directeur régional des soins primaires
Initiative de recrutement régional
Chaque région a mis en place un processus de recrutement semblable :
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On a formé un comité de recrutement composé, dans la plupart des cas, du VPR à titre de président, de la DPSP, d’un dirigeant clinique régional, d’un dirigeant administratif régional (DAR), et d’un médecin de famille respecté et chef de file.
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On a envoyé la lettre de recrutement au plus grand nombre de médecins de famille possible, la plupart en juin et juillet 2008, dans laquelle on précisait les coordonnées pour obtenir plus de renseignements et la date limite pour faire parvenir les demandes, soit environ un mois plus tard.
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Les dates des entrevues ont été fixées bien à l’avance pour assurer la présence de la DPSP. On a aussi établi les dates des réunions pour évaluer les demandes, faire une présélection des candidats, et préparer l’entrevue et les questions à poser.
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On a remis au VPR une liste de questions génériques pour simplifier le processus. Certaines régions ont élaboré leur propre processus tandis que d’autres ont choisi d’imiter les expériences des autres régions. Dans une région, les personnes interviewées étaient appelées à faire une présentation formelle de leur vision du poste.
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La DPSP a débuté les entrevues en donnant un bref résumé du processus à ce jour et des attentes préliminaires envers les dirigeants régionaux sur le plan provincial. Le VPR poursuivait en expliquant brièvement les attentes sur le plan régional.
On a réalisé au total environ 35 entrevues dans la province. La DPSP s’est rendue dans la plupart des régions (sauf 2) pour les entrevues, et a aussi visité le centre de cancérologie et les bureaux du programme de prévention et de dépistage. Les entrevues se sont bien déroulées et les processus étaient légèrement différents d’une région à l’autre, mais partout, il y avait consensus sur les nouveaux DRSP choisis.
Contrats, annonces et orientation
Contrats régionaux avec les DRSP
On a rédigé un contrat générique pour simplifier les ententes avec les DRSP. Une des régions a aidé à la rédaction du contrat qui a ensuite été distribué aux autres régions.
Lettres d’annonce régionale
Chaque région était responsable d’annoncer la nomination des personnes concernées. La plupart des régions ont préparé une courte annonce d’une page qui a été distribuée aux dirigeants régionaux et provinciaux en cancérologie. Certaines régions ont envoyé un communiqué de presse aux médias locaux, qui coïncidait avec le lancement du Réseau provincial sur les soins primaires et le cancer (RPSPC). Au 31 décembre 2008, les 13 DRSP avaient été recrutés.
Présentations des enjeux provinciaux aux DRSP
La DPSP a communiqué avec les DRSP immédiatement après qu’ils aient accepté leur poste et souvent, avant même que les contrats soient signés, afin d’apporter des précisions sur les grands enjeux provinciaux et de discuter des attentes à l’endroit des DRSP selon la perspective provinciale. On a réglé les questions en suspens et on a exploré le cadre conceptuel de la stratégie pour les soins primaires et le cancer comme première étape dans la préparation à l’exercice du rôle régional.
Dirigeants administratifs régionaux
Dans la plupart des régions, il y a un programme de prévention et de dépistage et un DAR, qui est la personne responsable d’administrer et de coordonner ce programme, y compris le programme de dépistage ContrôleCancerColorectal. Le DAR est directement concerné par la réussite de la stratégie d’intégration des soins primaires et de la cancérologie. Pour offrir des conseils et du soutien administratifs aux nouveaux DRSP dans leurs fonctions, le VPR les jumelle à des DAR (ou à d’autres personnes assumant des rôles semblables). Dans la plupart des régions, les DRSP et les DAR travaillent en étroite collaboration.
Réseau provincial sur les soins primaires et le cancer
Le RPSPC est formé de la DPSP, de la gestionnaire du programme provincial des soins primaires, des 13 DRSP et des 13 DAR6. Le réseau a été lancé officiellement à Toronto, en Ontario, les 30 et 31 octobre 2008. Plus de 90 personnes ont assisté à ce lancement8.
Comme les autres réseaux provinciaux de spécialistes cliniques, le RPSPC a pour but de planifier des initiatives provinciales, de discuter des problèmes et des réussites sur le plan régional et de créer un cadre de dirigeants responsables d’améliorer l’intégration et l’engagement des soins primaires dans le système de cancérologie. Le RPSPC se fait le porte-parole des soins primaires auprès du système de cancérologie et celui de la cancérologie auprès des soins primaires. On a récemment élaboré un plan stratégique pour le RPSPC, et les membres de ce réseau participent chaque mois à des téléconférences et se réunissent deux fois l’an à Toronto.
On a produit une brochure sur le RPSPC pour présenter les membres du réseau ainsi que les coordonnées pertinentes. Tous les membres du réseau ont reçu un dispositif électronique qui les relie entre eux et qui relie leurs renseignements. Ils ont tous reçu une formation sur l’utilisation des webinaires pour de futures rencontres virtuelles interactives et sont membres d’un espace de travail en ligne consacré à leur réseau.
Dès la fin de 2008, l’ACC avait comblé tous les postes de DRSP et avait un RPSPC fonctionnel. La première tâche était d’élaborer des plans de travail stratégiques régionaux avec des buts et objectifs à court et à long termes. Durant cet exercice formel, on produira un ensemble d’indicateurs de réussite. Un bilan provincial évaluera le RPSPC en fonction de chaque indicateur.
Liens
Depuis le début, la stratégie sur l’intégration des soins primaires et de la cancérologie a exploré des façons d’améliorer l’efficacité en encourageant les relations avec d’autres intervenants comme les organisations médicales et de soins infirmiers, ainsi que d’autres organismes concernés. On continue d’entretenir des liens avec le Collège des médecins de famille de l’Ontario dans le contexte de la campagne de sensibilisation au programme ContrôleCancerColorectal.
Parallèlement, les gestionnaires régionaux de l’Ontario Medical Association entretiennent des rapports avec les DRSP. On a aussi établi des contacts avec la Nurse Practitioners’ Association of Ontario. Les projets futurs incluent des efforts spéciaux pour rallier les infirmières praticiennes de soins primaires qui participent activement au dépistage du cancer et à d’autres soins en cancérologie tout au long du cheminement des patients atteints du cancer.
Évaluation du rendement
Durant l’année, on a conçu 2 processus pour évaluer l’efficacité et la confiance des DRSP dans l’exercice de leurs fonctions. D’abord, on a réalisé un sondage par voie électronique sur la confiance et l’efficacité auprès de tous les DRSP durant l’été 2009. Deuxièmement, la DPSP a visité les 13 régions. Les résultats de ces évaluations font présentement l’objet d’une analyse et éclaireront l’évolution future de la stratégie d’intégration des soins primaires et de la cancérologie.
Footnotes
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Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.
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This article is also in English on page 628.
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Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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