Pourquoi la plupart des autorités médicales acceptent-elles, endossent-elles et encouragent-elles le dépistage génétique prénatal tout en s’opposant à l’avortement sélectif en fonction du sexe? La juxtaposition de ces 2 pratiques soulève des questions lorsqu’on les compare et que l’on se demande s’il y existe un fondement éthique crédible pour donner son aval à l’une tout en condamnant l’autre. Nous espérons susciter cette conversation sans soulever de questions plus larges concernant la moralité de l’avortement ou à savoir si les droits de la personne devraient s’appliquer aux fœtus. Nous avons pour objectif de mettre en évidence les différences dans la façon dont on envisage l’avortement sélectif de divers genres de fœtus et d’explorer s’il est éthiquement possible de défendre leur traitement de manières radicalement différentes.
Si nous sommes d’accord d’empêcher des parents de connaître le sexe de leur enfant avant la naissance, nous le faisons pour prévenir la discrimination fondée sur le sexe. Nous cherchons à affirmer l’égalité des hommes et des femmes et nous acceptons de limiter les droits des femmes lorsqu’elles penchent vers un sexisme évident et expressément «répugnant socialement». Ce faisant, nous cherchons à cultiver une société qui appuie les principes des Nations Unies concernant les droits de la personne qui sont déclarés comme suit:
Tous les êtres humains naissent libres et égaux en dignité et en droits. Par conséquent, personne ne doit souffrir de discrimination fondée notamment sur la race, la couleur, l’ethnicité, le sexe, l’âge, la langue, l’orientation sexuelle, la religion, l’opinion politique ou toute autre opinion, l’origine nationale, sociale ou géographique, l’incapacité, la fortune, la naissance ou toute autre situation établie par les principes des droits de l’homme1.
La pratique généralisée du dépistage génétique et du diagnostic prénatal, dont les résultats peuvent inciter à mettre un terme à la grossesse, accomplit presque l’opposé. Si les médecins semblent inconfortables avec les femmes qui interrompent leur grossesse motivées par le choix du sexe, ils continuent d’accepter, et parfois même d’encourager, le choix des femmes qui se font avorter lorsqu’elles reçoivent un diagnostic génétique imprévu. Notre société semble fermement opposée à la discrimination fondée sur le sexe mais elle omet de se conformer à l’esprit du code des droits de la personne des Nations Unies lorsque nous donnons notre aval à une politique qui endosse la discrimination fondée sur la capacité. Laissant de côté la question de savoir s’il s’applique au fœtus, le code semble considérer les différences de sexe et de capacité d’une manière semblable.
Avortement sélectif fondé sur le sexe
L’avortement sélectif en fonction du sexe a fait récemment l’objet de beaucoup de débats. Cette pratique est courante en Chine et en Inde et on estime que le nombre de «femmes manquantes» se situe entre 61 et 80 millions. Le CMAJ a attiré l’attention sur ce problème dans un article expliquant cette pratique fréquente et posant des postulats quant aux conséquences possibles d’une classe d’hommes célibataires, moins riches, incapables de se trouver une épouse2. Les auteurs sont aussi optimistes, dans une certaine mesure, que cette rareté de femmes donnera lieu à un sentiment grandissant de pouvoirs chez les femmes, mais des rapports de cas récents venant de l’Inde à l’effet que des femmes sont forcées à porter les enfants de toute une famille de frères suggèrent exactement le contraire3.
Historiquement et universellement, il y a eu un ratio remarquablement constant d’environ 105 naissances de garçons pour chaque tranche de 100 naissances de filles4. On désigne cette statistique sous le nom de sex ratio à la naissance (SRN) et elle représente le nombre d’hommes nés par tranche de 100 femmes. En Chine, ce nombre a constamment augmenté au cours des 30 dernières années pour atteindre un sommet de plus de 130 dans certaines parties du pays5. Le SRN en Inde suit de près, notamment à 125 dans certains états6,7.
Des tendances semblables font leur apparition en Occident et les associations médicales en place critiquent cette pratique de l’avortement sélectif en fonction du sexe. Une récente politique en matière d’éthique émise par la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada (SOGC) a fait remarquer un déséquilibre dans le ratio entre les naissances de filles et de garçons dans certains groupes de riches immigrants au Canada venant de l’Asie du Sud8. Si le SRN semble normal pour les premiers nés, les nombres commencent à favoriser les garçons dans les deuxièmes naissances après une première fille (SRN=117). Ce déséquilibre est particulièrement frappant dans les troisièmes naissances lorsque les deux premiers enfants sont des filles (SRB = 151)9. La SOGC et un éditorial dans le CMAJ proposent que cette pratique soit freinée et que le sexe du fœtus ne soit révélé qu’au moment où l’interruption de la grossesse serait difficile à obtenir pour des fins non médicales8,10. Dans leurs lignes directrices de 2012, le College of Physicians and Surgeons of British Columbia a convenu que la divulgation du sexe fœtal pour des raisons non médicales était «contraire à l’éthique» et demande aux médecins de ne pas révéler cette information étant donné les conséquences socialement répugnantes potentielles11.
Des politiques semblables émergent à l’échelle internationale, notamment celles du Conseil de l’Europe qui encouragent les états membres, en particulier l’Albanie, l’Arménie, l’Azerbaïdjan et la Géorgie, à adopter des lois interdisant cette pratique et à prendre des mesures concrètes pour limiter le déséquilibre croissant entre les naissances de garçons et de filles12. Pareillement, des états américains et australiens ont adopté des directives et des lois interdisant de faciliter les avortements sélectifs selon le sexe13,14.
La condamnation massive de cette pratique tant par les autorités médicales que politiques dans les pays développés met en évidence une opposition apparente et généralisée à toutes formes de discrimination basée sur le sexe. Il est intéressant de constater que cette opposition ne semble pas la même pour certaines autres formes de discrimination.
Avortement sélectif fondé sur la capacité
Le dépistage génétique prénatal est maintenant considéré une norme de soins dans la plupart des pays occidentaux. La principale auteure du guide de pratique du American College of Obstetricians and Gynecologists sur le dépistage génétique prénatal, Dre Deborah Driscoll, affirmait que les médecins étaient obligés selon l’éthique d’informer entièrement les patientes concernant leurs options de soins de santé, y compris le dépistage prénatal, et exigeait qu’on offre à toutes les femmes enceintes des tests invasifs ou non pour dépister des anomalies génétiques15. Dans la même veine, la SOGC convient que l’offre de choix de tests à toutes les femmes enceintes devrait être la norme de soins pour toutes les patientes canadiennes16. Un rapport sur les tests prénatals et les recommandations à cet égard en Europe révèle que la majorité des pays européens offrent aussi à l’échelle nationale des programmes de dépistage à toutes les femmes intéressées17.
La trisomie 21, aussi connue sous le nom de syndrome de Down (SD), fait le plus souvent l’objet d’un dépistage et est détectée avant la naissance en Europe et en Amérique du Nord18–21. Un rapport de 2009 au Royaume-Uni a fait valoir que 92 % des grossesses dans lesquelles est posé un diagnostic prénatal de SD sont interrompues, 2 % se terminent en raison d’un avortement spontané et 6 % se concluent par une naissance vivante22. Ces statistiques sont assez semblables à celles observées en Amérique du Nord où l’on rapporte qu’une proportion allant jusqu’à 90 % de telles grossesses au Canada et entre 84 % et 91 % de ces grossesses aux États-Unis sont interrompues23–26.
Analyse
Le sujet mérite une réflexion à savoir s’il y a une importante distinction entre l’avortement sélectif en raison du sexe et celui en fonction de la capacité qui permette de justifier philosophiquement l’une et d’interdire l’autre. Nous allons présenter certaines des distinctions possibles qui pourraient être cernées mais, en définitive, nous énoncerons l’argument qu’aucune d’entre elles n’est satisfaisante et que, par conséquent, aucune distinction philosophiquement substantielle ne peut être conclue. Dans notre analyse, l’expression avortement sélectif en fonction de la capacité est utilisée pour décrire la pratique de dépister des anomalies génétiques et de mettre un terme à la grossesse en se fondant sur les résultats. La plupart de nos arguments et exemples à propos de cette pratique insistent sur le SD étant donné que c’est l’anomalie génétique la plus communément détectée.
Perception de fardeau
L’un des motifs couramment cités pour justifier l’interruption d’une grossesse lorsque des anomalies génétiques ont été dépistées avant la naissance est l’élimination du fardeau perçu que représentera plus tard un enfant ayant une incapacité. Toutefois, dans certaines cultures, l’avortement sélectif selon le sexe est pratiqué exactement pour la même raison. Pour certains, la naissance d’une fille exige des parents qu’ils accumulent beaucoup d’argent pour faciliter le mariage de leur fille. De plus, les filles pourraient ne pas pouvoir hériter des terres et des richesses honnêtement gagnées par leurs parents ni pourraient-elles s’attendre à être considérées égales par leurs pairs masculins sur le marché du travail et dans la société en général27. Dans une perspective purement économique, une fille représente de fait un fardeau considérable.
On pourrait plaider, qu’au lieu d’autoriser un avortement sélectif fondé sur le sexe, les sociétés devraient adapter leurs pratiques culturelles de manière à réduire les inégalités sociales qui font en sorte que les femmes soient un fardeau. Modifier les attentes quant aux dotes et régler les iniquités en milieu de travail seraient des pas dans la bonne direction. De plus, des accommodements additionnels pour les situations uniques auxquelles les femmes sont confrontées, comme les congés de maternité payés et des services de garderie plus facilement accessibles, simplifieraient pour les femmes leur présence sur le marché de l’emploi et réduiraient ainsi le fardeau associé au fait d’avoir des filles. Évidemment, le même argument pourrait s’appliquer aux personnes ayant des incapacités: un soutien gouvernemental additionnel et des programmes visant à intégrer ces personnes au marché de l’emploi réduiraient la mesure dans laquelle elles imposent un fardeau économique. Par conséquent, l’argument du fardeau économique ne semble pas établir de fondement clair sur lequel baser la distinction entre l’avortement sélectif fondé sur le sexe et celui en fonction de la capacité.
Souffrance
Une autre façon de faire une distinction entre l’avortement sélectif selon le sexe et selon la capacité est de dire que les personnes ayant des incapacités pourraient souffrir au point que leur vie ne vaudrait pas la peine d’être vécue et que l’avortement sélectif selon la capacité est pratiqué pour leur propre bien. Dans un certain sens, la même réponse s’applique ici aussi: les femmes aussi souffrent plus que les hommes. Dans les pays développés, elles sont plus vulnérables aux violences physiques et sexuelles, elles font face à des injustices systémiques et sont les seules à éprouver les douleurs physiques associées à l’accouchement. Dans les pays en développement, la situation est souvent bien pire encore. On pourrait peut-être prendre des mesures pour atténuer ces souffrances, mais on peut aussi poser des gestes pour atténuer les souffrances des personnes ayant des incapacités. De plus, l’argument de la «souffrance» ne s’applique pas au SD, l’incapacité la plus souvent détectée, mais plutôt à un sous-groupe limité de problèmes diagnostiqués avant la naissance.
Le naturel, le nécessaire et l’utile
Une troisième façon de faire une distinction entre l’avortement sélectif selon le sexe et celui selon la capacité pourrait être de faire appel au naturel, au nécessaire et à l’utile. Le naturel dans ce sens est souvent invoqué dans les débats publics pour dire qu’une chose ou un état sont ce qu’ils étaient initialement supposés être, sans intervention ou distorsion inappropriée. Le nécessaire signifie que la continuation de la vie humaine ne serait pas possible sans lui et l’utile implique qu’une chose contribue de manière significative au bien-être des humains.
En ce qui a trait au naturel, il est évident que 2 sexes distincts ont toujours fait partie de l’humanité et sont indéniablement nécessaires à sa perpétuation. Comme il est mentionné plus tôt, un déséquilibre dans le ratio hommes-femmes considérablement plus élevé que les habituels 5 % semble être associé à des problèmes sociaux majeurs. Réciproquement, les anomalies génétiques sont souvent décrites comme des maladies. Les personnes (même celles ayant des incapacités) semblent culturellement enclines à supposer que, au contraire de la féminité, une incapacité est un cas où «quelque chose a mal fonctionné». Qu’importe la raison, les problèmes associés à une société dépourvue de personnes atteintes du SD ne viennent pas immédiatement à l’esprit aussi clairement que les problèmes d’une société sans femmes.
Nous rejetons cette distinction pour 2 raisons. Premièrement, nous croyons que la définition de l’utilité sociale d’une personne, de son caractère nécessaire ou du naturel de son état et sa valorisation en fonction de tels attributs est un projet dangereux et faussé. Deuxièmement, même si on voulait envisager la valeur d’une personne en fonction de son utilité sociale, les personnes ayant des incapacités ont des contributions sociales précieuses et uniques à apporter.
Il peut être facilement démontré qu’il y a des variations dans l’utilité générale des individus. Les personnes sont généralement payées pour le travail qu’elles font en fonction de la valeur de ce travail pour ceux qui en bénéficient. Un médecin est habituellement payé plus qu’un peintre en bâtiment parce que ceux qui sont desservis par le médecin valorisent son travail plus que ceux qui bénéficient du travail du peintre apprécient le travail de ce dernier. (Il peut sembler étrange qu’un hockeyeur professionnel soit payé plus qu’un médecin, mais c’est parce que chaque joueur individuel peut four-nir des bienfaits à un plus grand nombre de personnes en même temps. Un médecin, s’il procure de bien plus grands bienfaits à chaque individu qu’il aide, il ne peut généralement aider qu’une seule personne à la fois. Si un médecin était plus utile socialement qu’un joueur de hockey, il pourrait alors demander plus pour ses services qu’un hockeyeur). Sauf quelques exceptions (services fournis à des enfants ou à d’autres qui n’ont pas les moyens de payer pour ce qu’ils valorisent), nous pouvons généralement constater que les personnes dans une société capitaliste sont rémunérées en fonction de l’utilité de leurs actions. Il y a des variations dans les montants qui sont payés aux personnes et il y a des variations dans l’utilité des individus.
Compte tenu de ces variations, la valorisation des personnes en se fondant sur leur utilité semble un très dangereux projet. Il s’ensuivrait la conclusion évidente que tuer un athlète professionnel est un crime plus grave que tuer un peintre. Si le salaire est une bonne indication de l’utilité, alors tuer un athlète pourrait donc être 100 fois pire que tuer un peintre. Peut-être que les écrivains ne sont pas nécessaires pour perpétuer la race humaine, mais nous sommes certainement mieux du fait de l’existence passée de Shakespeare et de George Bernard Shaw (quoique Shaw n’eut peut-être pas été d’accord). Si le caractère nécessaire est le critère, alors combien de sans-abri sacrifieriez-vous pour sauver un médecin? Le simple fait de poser la question met en évidence le problème que pose ce genre de raisonnement.
Nos systèmes d’éthique contemporains se fondent sur la valorisation des personnes comme ayant une valeur absolue et non pas comme un moyen à d’autres fins. En déontologie médicale, on s’attend des médecins qu’ils traitent les patients en tant qu’individus ayant une valeur égale et non interchangeable. Ne pas administrer un traitement qui sauve la vie à un patient «moins valable» est clairement inacceptable. Par conséquent, faire une distinction entre l’avortement sélectif selon le sexe et celui selon la capacité en comparant l’utilité ou la caractéristique nécessaire des femmes par rapport à celles des personnes ayant des incapacités est non seulement dangereux mais aussi incohérent par rapport à notre façon d’envisager d’autres questions en éthique médicale.
Laissant de côté l’aspect de l’utilité, que dire de la valorisation d’une personne en se basant sur la caractéristique naturelle de son état? Peut-être est-il naturel d’être une femme et d’être handicapé ne l’est pas. Cet argument semble intuitivement raisonnable, mais il se fonde sur une distinction entièrement arbitraire entre ce qui est naturel et ce qui ne l’est pas. C’est peut-être socialement populaire d’évoquer le naturel, mais c’est impossible de définir objectivement si une chose fait partie de ce que le monde naturel est «supposé être» ou si elle représente une distorsion De plus, même si nous pouvions distinguer clairement le naturel de ce qui ne l’est pas, qui pourrait dire qu’une chose vaut plus parce qu’elle est naturelle? Il existe de nombreux produits pharmacologiques synthétiques qui sont bien plus utiles et valables que les produits à base d’herbes naturelles. Faire une distinction entre l’avortement sélectif selon le sexe ou selon la capacité en se fondant sur l’aspect naturel de ces situations est donc plutôt arbitraire et repose sur une prémisse non justifiée que le naturel est mieux.
Le syndrome de Down: Même si une personne rejetait tous les arguments qu’on vient d’exposer, peut-elle être sûre que l’incapacité ne peut pas être utile, nécessaire ou naturelle? Nous avons de bonnes raisons de croire que les personnes atteintes du SD, par exemple, ont tous ces attributs.
John Langdon Down a initialement décrit officiellement le syndrome de Down en 1866. Par ailleurs, l’histoire fait valoir que ce syndrome fait partie de la famille humaine depuis des millénaires28. En Amérique centrale entre 1500 av. J.C. et 300 apr. J.C vivait une tribu appelée les Olmèques. Les vestiges de leurs statues dépeignent des enfants plutôt obèses avec des visages ronds, des replis formant une troisième paupière et les yeux bridés, un nez court avec une aile plate et des membres courts, tous des phénotypes classiques du SD29. Étant donné la présence persistante de la trisomie 21 depuis plus de 3 500 ans, la possibilité que des personnes atteintes du SD aient joué un rôle important dans notre société devrait être envisagée. Même si toute chose qui persiste n’a pas nécessairement de valeur, la persistance évidente semble une bonne raison d’examiner avec soin si une valeur est de fait présente. D’une façon ou d’une autre, 3 500 ans d’existence renforcent certainement l’assertion que le SD est naturel.
Dans des entrevues avec des mères dont les enfants avaient le SD, elles insistaient sans cesse sur la capacité des enfants d’établir des relations avec les autres, leur sens de l’humour, leur bonne humeur et leur intuition30. Plusieurs ont commenté qu’en comparaison de leurs enfants au développement normal, ceux qui avaient le SD étaient plus conscients des efforts, des émotions et des besoins de leurs parents qui passaient inaperçus chez leurs frères et sœurs et qu’ils manifestaient une gratitude et une affection véritables30. Un récent article de recherche intitulé «It’s not what you were expecting, but it’s still a beautiful journey» présente un récit révélateur des expériences de mères qui donnent naissance et élèvent leurs enfants atteints du SD31. Dans un commentaire particulièrement pertinent, une mère explique:
Si nous avions connu le diagnostic assez tôt, nous aurions été confrontés à une décision difficile de mettre un terme ou non à la grossesse. Je suis très heureuse que nous n’ayons pas eu cette option, parce que ça aurait été la plus grande erreur de ma vie31.
(traduction libre)
Une autre mère mentionnait que sa fille était la meilleure chose qui lui était arrivée et ce, exposant mille. Facilement, la meilleure des choses.31 Sans minimiser les défis que représente nécessairement le fait d’élever un enfant avec une incapacité, il est essentiel de reconnaître leurs contributions uniques aux familles et à la société en général. Les mères interviewées ont conclu qu’avoir un enfant ayant le SD avait raffermi les relations dans la famille, avait favorisé l’épanouissement personne, la compassion et une meilleure acceptation. Elles en avaient été renforcées émotionnellement. Même si les mères interviewées avaient d’autres enfants, elles trouvaient que d’élever leur enfant ayant un SD leur avait apporté un épanouissement considérable qu’elles n’auraient peut-être pas connu autrement31.
Aux Olympiques de 2010, le skieur Alexandre Bilodeau a été le premier Canadien à gagner une médaille d’or olympique en sol canadien. Quand il a franchi la ligne d’arrivée, son plus jeune frère Frédéric l’acclamait avec vigueur au bas de la pente. Quand on a demandé à Alexandre combien de cette médaille d’or appartenait à son frère, atteint de paralysie cérébrale, le skieur aurait répondu: «Mon frère est mon inspiration. Grandir avec une personne handicapée remet les choses en perspective et il m’a appris tant de choses dans la vie»32. Les spectateurs du monde entier ont dit que de voir les 2 frères ensemble après la victoire d’Alexandre a été l’un des plus beaux moments de ces Olympiques.
Si l’on en juge les récits et les commentaires de ceux qui vivent étroitement avec des personnes ayant des incapacités, il semble assez raisonnable de supposer que ces personnes handicapées sont naturelles, nécessaires et véritablement utiles.
Conclusion
Les autorités médicales et politiques semblent actuellement assez à l’aise de promouvoir l’avortement sélectif en fonction de la capacité tout en s’opposant avec véhémence à l’avortement sélectif fondé sur le sexe. À la suite d’une analyse globale, il n’est pas évident qu’il existe un fondement permettant de défendre une telle distinction. Par conséquent, en l’absence d’une telle distinction, les autorités médicales et politiques devraient chercher à régler cette incohérence. Il y a 2 options pour atteindre cette cohérence. On peut soit minimiser la possibilité des avortements sélectifs selon le sexe et selon la capacité ou encore donner accès sans restrictions aux services d’avortement, qu’elle qu’en soit la motivation. Compte tenu de la présente analyse, les auteurs sont d’avis que la première option est le choix éthique à faire.
Footnotes
Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.
The English version of this article is available at www.cfp.ca on the table of contents for the March 2014 issue on page 212.
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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