En février 2018, l’Institut canadien d’information sur la santé a publié l’enquête internationale du Fonds du Commonwealth sur les perceptions et les expériences en santé des aînés de 11 pays développés1. Nous y retrouvons des informations très intéressantes.
D’abord, il est cocasse de noter que les aînés canadiens ont plus de maladies chroniques et prennent plus de médicaments, mais qu’ils se perçoivent en meilleure santé.
Plutôt curieux comme résultat! Nous pourrions certainement émettre plusieurs hypothèses pour expliquer cette contradiction. Certains politiciens nous diraient peut-être que le Canada est un pays où il fait si bon vivre que cela influence notre perception de notre état de santé. En tant que médecin, nous pourrions penser que, comme nous traitons beaucoup de maladies chroniques asymptomatiques, les gens s’imaginent en meilleure santé que la somme de leurs médicaments et de leurs maladies. Enfin, plutôt curieux comme résultat.
La donnée la plus inquiétante est que nos aînés sont les moins satisfaits de la qualité générale des soins de santé (67 % par rapport à une moyenne de 76 %)1. Par contre, il est rassurant de lire que leur degré de satisfaction est supérieur à la moyenne internationale en ce qui concerne leurs expériences auprès de leur fournisseur de soins de santé primaires.
Un pourcentage plus élevé d’aînés canadiens par rapport à ceux des autres pays avaient l’impression que leur médecin attitré :
connaissait mieux les informations importantes liées à leur santé
prenait assez de temps avec eux
expliquait les enjeux de façon facile à comprendre
les encourageait à poser des questions
les impliquait autant qu’ils le désiraient dans les décisions concernant leurs traitements et leurs soins
les aidait dans la coordination des soins avec les autres spécialistes et les hôpitaux
avait discuté avec eux des choix santé (alimentation, exercice, alcool, etc.)
avait révisé leur médication au cours des 12 derniers mois1
Il y a plus d’aînés canadiens qui ont un plan de soins en fin de vie1. Ils en ont davantage discuté avec leurs proches, et ils sont plus nombreux à avoir un document indiquant leur mandataire en cas d’inaptitude.
Par contre, là où notre cote est la moins bonne, c’est au niveau de l’accès. Moins d’aînés canadiens sont capables d’avoir accès à un rendez-vous en moins de 48 h (41 % c. 56 %) ou les soirs et les fins de semaine (38 % c. 51 %)1. Ils utilisent plus souvent les services d’urgence pour des problèmes qui auraient pu être traités dans un centre de soins primaires (31 % c. 28 %)1.
C’est vraiment à ce niveau que nous sommes confrontés à un défi. Comment pouvons-nous améliorer l’accès aux soins primaires au Canada? Le médecin de famille du 21e siècle ne pourra pas être disponible 24 h sur 24 h, 7 jours semaine. La clé du problème est le travail en équipe avec d’autres professionnels de la santé. Les provinces canadiennes doivent continuer à investir dans des modèles d’organisation des soins de type « Centre de médecine de famille », et les médecins de famille doivent assumer un leadership fort dans ces organisations pour améliorer l’accès.
Il faut être créatif pour trouver des façons d’y parvenir. Dans mon groupe, nous avions un médecin qui faisait le sans rendez-vous tous les jours et nous avons introduit l’accès adapté, mais cela n’était pas suffisant pour répondre à la demande d’accès à court terme. Nous avons donc obligé tous les médecins à ajouter 2 plages réservées au sans rendez-vous pour l’ensemble des patients du groupe à la fin de leur journée de travail. Ces rendez-vous ne peuvent être donnés que le matin même. Cela a grandement amélioré l’accès à court terme pour nos patients.
À une période où les médecins de famille sont soumis à d’immenses pressions au quotidien pour voir plus de patients plus rapidement, il est intéressant de constater que notre travail sur le terrain est apprécié. Bien que nous ayons un défi à relever au niveau de l’accès, nous performons bien au niveau de l’expérience des soins en première ligne. Nous avons tendance à être sévères avec nous-mêmes, mais ce sondage nous rappelle le vieil adage: « Quand on se regarde, on se désole, quand on se compare, on se console. »
Je crois que ces données démontrent l’inestimable valeur de notre contribution dans le système de santé canadien. Nous entendons parler à tous les jours dans les médias des ratés de notre système de santé, mais pas assez de l’extraordinaire travail de nos médecins de famille.
Footnotes
This article is also in English on page 397.
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Référence
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