L es patients atteints de bronchopneumopathies chroniques obstructives (BPCO) modérées ou graves développent progressivement une obstruction des voies aériennes et une dyspnée qui peuvent être incapacitantes. Les bronchodilatateurs aux β-agonistes fonctionnent en se fixant sur le muscle mou des voies aériennes et en le relaxant. Cette relaxation produit une dilatation des voies aériennes et permet à un plus grand volume d'air emprisonné de s'échapper à chaque expiration. La réduction de l'emprisonnement d'air joue un rôle physiologique important dans le soulagement de la dyspnée chez les patients atteints de BPCO1. En raison des effets cliniques et physiologiques impressionnants, tous les guides de pratique clinique sur les BPCO publiés préconisent l’utilisation des bronchodilatateurs aux β-agonistes à brève action et à effet prolongé pour réduire la dyspnée, améliorer la tolérance à l'activité physique et la qualité de vie des patients ayant une BPCO symptomatique2,3 .
Il n’y a que 2 raisons d’abandonner une thérapie avec des bronchodilatateurs aux β-agonistes pour une BPCO: s'il est démontré qu'elle n'est pas efficace ou si le risque d'événements indésirables causés par ces médicaments éclipse leurs bienfaits. Dans les paragraphes suivants, je présente en résumé les données scientifiques tirées des études cliniques prouvant que les bronchodilatateurs aux β-agonistes sont efficaces et sûrs dans le traitement des BPCO.
Efficacité
Les données scientifiques qui corroborent l’efficacité des β-agonistes à brève action et à effet prolongé pour le traitement des BPCO sont innombrables. Une synthèse critique par le Centre de collaboration Cochrane de 13 études cliniques évaluait l'efficacité clinique des β-agonistes à brève action. La méta-analyse de ces 13 études démontrait que l'utilisation régulière des β-agonistes à brève action chez les patients ayant une BPCO stable était associée à une amélioration de la fonction pulmonaire et à une réduction considérable de l'essoufflement par rapport au placebo. Les sujets de l'étude étaient 10 fois plus enclins à préférer le traitement aux β-agonistes plutôt que le placebo. Les auteurs de la synthèse du Centre de collaboration Cochrane ont donc conclu qu'une thérapie aux β-agonistes à brève action était bénéfique pour les patients atteints d'une BPCO4 .
Les plus récents β-agonistes ont une durée d'action plus longue. Des études cliniques ont fait valoir que ces médicaments provoquaient un dégonflement substantiel des poumons dans les cas de BPCO et réduisaient la dyspnée associée à l'activité physique. Les patients qui prenaient du salmétérol (un β-agoniste à effet prolongé) augmentaient de 58% leur endurance maximale à l'effort en comparaison du placebo5 .
Une synthèse critique par le Centre de collaboration Cochrane en 2006 évaluait l’efficacité clinique des β-agonistes à effet prolongé6. La synthèse portait sur 23 études cliniques dans lesquelles participaient 6 061 sujets randomisés. La méta-analyse de ces 23 études cliniques a démontré que la fonction pulmonaire était améliorée de manière significative grâce au salmétérol (50 μg 2 fois par jour) en comparaison du placebo. Elle signalait aussi des différences considérables au chapitre de la qualité de vie sur le plan de la santé attribuables au salmétérol (50 μg 2 fois par jour) par rapport au placebo. L’usage régulier du salmétérol réduisait l’incidence des exacerbations des BPCO en comparaison du placebo (nombre nécessaire à traiter = 21). Il est clairement démontré que les β-agonistes à effet prolongé sont efficaces pour traiter les BPCO.
Innocuité
Dans une récente méta-analyse, Salpeter et ses collègues cherchaient à savoir si les β-agonistes pouvaient être associés à un risque accru de décès de causes respiratoires par rapport au placebo7. Une étude plus approfondie des données utilisées dans la méta-analyse de Salpeter révèle plusieurs lacunes importantes. Elle n’incluait que 4 études publiées. Aucune tentative n’a été faite par les auteurs pour obtenir des données sur la mortalité tirées de grandes études randomisées sur la thérapie aux β-agonistes pour les BPCO, qui auraient pu contribuer des renseignements importants (comme l'étude Calverley8 en 2003 portant sur 1 465 patients randomisés atteints de BPCO). Dans la méta-analyse de Salpeter, 60% de la pondération était accordée aux résultats d’une seule étude. De plus, la méta-analyse de Salpeter contient des données de publications en duplicata. Les données tirées de l’étude de Donohue apparaissaient aussi dans l’étude de Brusasco. La publication en double des résultats provenant exactement des mêmes patients a indûment influencé les résultats de la méta-analyse de Salpeter. Bref, en raison de la méthodologie déficiente et de l’inclusion d’études douteuses, les résultats de la méta-analyse de Salpeter ne sont pas fiables.
Une analyse plus fiable de l’innocuité des β-agonistes à effet prolongé pour les BPCO pourrait plutôt provenir de la plus importante étude clinique de la thérapie pour les BPCO effectuée jusqu'à présent, qui évaluait la mortalité comme principal résultat9. Dans l’étude TORCH (Towards a Revolution in COPD Health), on choisissait au hasard 6 112 patients atteints d’une BPCO modérée ou grave, qui recevaient à double insu pendant 3 ans une thérapie au salmétérol (n = 1521), au fluticasone (n = 1534), au fluticasone et au salmétérol (n = 1533) ou un placebo (n = 1524). Le principal critère de résultat était la mortalité toutes causes confondues9. Il importe de signaler que le risque de décès dans le groupe traité en monothéra-pie avec le salmétérol était légèrement moins élevé que dans le groupe ayant reçu un placebo (ratio de danger de décès avec le salmétérol par rapport au placebo = 0,88, intervalle de confiance à 95% de 0,73–1,06). Il est évident, dans cette très grande étude clinique d’une durée de 3 ans, qu’aucun indice ne fait valoir que la thérapie au sal-métérol pourrait entraîner une hausse excessive de décès de causes respiratoires par rapport au placebo; de fait, le rapport de cotes de 0,88 démontre que le salmétérol pourrait avoir un léger (sans être statistiquement significatif) effet protecteur contre la mortalité. L’étude TORCH comptait plus de patients dans ses groupes prenant du salmétérol et un placebo que dans toutes les études de la méta-analyse de Salpeter combinées. Par conséquent, les résultats de cette étude auraient certainement plus de poids que ceux de la méta-analyse de Salpeter. L’étude TORCH a clairement démontré que la thérapie aux β-agonistes à effet prolongé est sûre et qu'elle n'est pas associée à une mortalité excessive chez les patients atteints de BPCO9.
En résumé, la thérapie à long terme avec des bron-chodilatateurs aux β-agonistes est efficace et sûre pour le traitement de la dyspnée associée aux BPCO. Il n'est donc pas justifié d'éviter les β-agonistes chez les patients atteints de BPCO symptomatiques.
Notes
CONCLUSIONS FINALES
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Des études physiologiques démontrent que les β-agonistes dilatent les voies aériennes et réduisent l'emprisonnement d'air associé aux bronchopneu-mopathies chroniques obstructives, ce qui améliore la fonction pulmonaire et la tolérance à l'activité physique des patients.
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Les études cliniques démontrent clairement que les β-agonistes à brève action et à effet prolongé améliorent la dyspnée et la qualité de vie, et réduisent les exacerbations respiratoires chez les patients atteints de bronchopneumopathies chroniques obstructives.
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Une très grande étude clinique récente a démontré sans équivoque que l’utilisation à long terme des β-agonistes pendant une période de 3 ans est sans danger et est associée à un risque légèrement moins élevé de mortalité par rapport au placebo.
Footnotes
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Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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