
Les résultats du Sondage national des médecins (SNM) de 2007 racontent une histoire bien connue: nous n’avons toujours pas assez de médecins pour répondre aux besoins des Canadiens. La pénurie se fait le plus sentir en pratique familiale. La réponse du public et des médias au SNM prouve une fois de plus que la pénurie de MF préoccupe toujours les Canadiens. Les médias ont porté une attention particulière à la difficulté de trouver un médecin de famille. Les entrevues avec les médias, les émissions interactives et les lettres à la rédaction ont répété sans cesse le même message: les Canadiens estiment grandement les MF et veulent avoir accès à leur propre MF. Pour jeter de l’huile sur le feu, CBC présentait en janvier 2008 un documentaire «Desperately Seeking Doctors», dans lequel des Canadiens d’un océan à l’autre disaient combien ils se sentaient vulnérables sans MF.
Un problème évident
Il s’est écoulé plus de 3 ans depuis la publication du rapport final de la Stratégie en matière d’effectifs médicaux pour le Canada (Groupe de travail deux). Il mettait en évidence la mauvaise planification des effectifs médicaux (EM) des dernières décennies, qui a laissé la population de ce pays sans les médecins, infirmières ou autres professionnels de la santé dont elle a besoin. Il recommandait l’établissement immédiat d’une stratégie panca-nadienne en matière d’EM pour régler cette inacceptable situation et empêcher qu’elle se reproduise.
Les gouvernements ont-ils donné suite à cette recommandation critique? Non. Ce qui a été créé, par contre, c’est une nouvelle «industrie des listes d’attente»: certains services médicaux sont en concurrence pour obtenir des fonds tandis que des douzaines d’autres - patients et praticiens compris - sont laissés pour compte. Les réunions, groupes de travail, remue-méninges associés aux listes d’attente consomment des millions de dollars. Une bonne part de ces fonds devrait aller à la formation, au recrutement et au soutien d’un plus grand nombre de médecins, infirmières, pharmaciens et autres professionnels dont la population a besoin.
Solution possible
Malgré l’absence d’une stratégie nationale des EM, on a pris quelques mesures. Depuis 2000, le nombre d’inscriptions en 1re année de médecine est passé de 1 500 à près de 2 500. Chaque année, plus de diplômés en médecine internationaux sont formés et obtiennent leur permis. Nous avons cependant besoin d’au moins 3 000 étudiants dans chaque nouvelle cohorte pour compenser les 2 000 médecins qui prennent leur retraite chaque année et les 35% épuisés professionnellement qui réduisent leur pratique. Le Canada est presque au dernier rang des pays de l’OCDE au chapitre du nombre d’étudiants en médecine et de médecins en pratique par habitant.
On voit poindre au pays une stratégie progressiste grâce à laquelle des équipes interprofessionnelles pourraient, aider les trop peu nombreux MF à mieux répartir leurs tâches cliniques. Bien que nous devions mieux comprendre les rôles de tous les membres de l’équipe et avoir des données probantes étayant de meilleurs résultats et une plus grande satisfaction des patients et des praticiens, notre Collège appuie la valeur ajoutée potentielle d’un travail en collaboration entre les MF et les autres professionnels de la santé qui pourrait accroître l’accès aux soins. Beaucoup de nos membres nous ont dit que s’ils pouvaient compter sur un système de rémunération et des régimes d’assurance professionnelle, ils seraient favorables au travail d’équipe avec des infirmières praticiennes et autorisées. Nous croyons que fait de pouvoir offrir aux patients les compétences stratégiquement combinées de médecins et d’infirmières dans un même lieu de pratique est un avantage incontestable, surtout dans le cas des soins préventifs et de la prise en charge des maladies chroniques.
Un effort d’équipe?
En octobre 2007, le Collège des médecins de famille du Canada demandait leur appui aux dirigeants gouverne-mentaux afin d’atteindre, dans une proportion de 95% d’ici 2012, l’objectif d’un médecin de famille pour chaque personne au Canada, dans chaque collectivité. Dans ce contexte, le Collège et l’Association des infirmières et infirmiers du Canada ont publié un énoncé de vision conjoint, dans lequel ils s’engagent à travailler ensemble à créer un milieu de pratique où les soins seraient dispensés par un médecin de famille et une infirmière autorisée ou praticienne.
Il faut pour ce faire un véritable travail d’équipe et une franche collaboration. Avec notre nombre limité de médecins et la pénurie prévue de plus de 100 000 infirmières d’ici 2012, nous devons adopter des modes de pratique très avisés. Ceux qui préconisent des modèles où les infirmières offrent supposément les mêmes services que les MF vont à l’encontre de l’objectif des soins interprofessionnels centrés sur le patient. Ceux qui privilégient ces modèles au lieu d’une véritable collaboration entre MF et infirmières devront le faire sans nous.
Footnotes
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This article is also in English on page 480.
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