
Dans son récent bestseller, Outliers: The Story of Succes1, Malcolm Gladwell raconte l’histoire fascinante de la population de Roseto, Pa, entièrement composée de citoyens provenant du village de Roseto Valfortore, en Italie. Intrigués par la très faible incidence de maladies dans cette ville, dont l’absence de coronaropathie chez les moins de 55 ans, des chercheurs médicaux ont étudié ce phénomène durant les années 1960. Conclusions choquantes, les Rosétains ne s’alimentaient pas bien, ne faisaient pas d’activité physique, l’obésité était fréquente ainsi que le tabagisme. Leurs proches qui vivaient ailleurs avaient une incidence élevée de maladies, d’où l’exclusion d’une explication génétique. La population des villes avoisinantes sous un même climat et de semblables influences environnementales avait une incidence 3 fois plus grande de cardiopathie que ses voisins rosétains.
Faute de réponse, l’équipe de recherche s’est tournée vers des sociologues. La structure sociale du village se caractérisait par un partage unique d’expériences. Il y régnait un sentiment de confiance et de sécurité, les gens de la ville ayant toujours quelqu’un qu’ils connaissaient à qui demander de l’aide. La santé extraordinaire de cette population ne pouvait s’expliquer que par la présence d’une famille élargie, une communauté.
Dre Barbara Starfield et ses collaborateurs2 démontraient, 4 décennies plus tard, que l’accès régulier à un milieu de soins primaires et à son propre médecin donne de meilleurs résultats pour la santé. Outre les déterminants sociaux de la santé, ces contacts pourraient jouer un grand rôle pour le bien-être de notre population.
Les patients suivis régulièrement par un médecin jouissent de nombreux avantages: diagnostics plus hâtifs et plus précis, meilleur taux d’immunisation, moins de tabagisme, utilisation accrue de la ceinture de sécurité, moins d’obésité, moins d’admissions à l’urgence ou à l’hôpital, meilleure prise en charge pour une maladie chronique, moins de réactions indésirables aux médicaments, soins moins chers et satisfaction accrue 2. Macinko et ses collègues ont étudié 19 pays de l’OCDE et ont conclu que plus l’orientation est axée sur les soins primaires, plus faibles sont les taux de mortalité toutes causes confondues et spécifiques à une origine respiratoire et cardiovasculaire3. Selon une étude au R.-U., pour chaque omnipraticien de plus, il y avait une baisse des hospitalisations (14/100 000 pour maladies aiguës et 11/100 000 pour maladies chroniques)4. Diverses études ont conclu à des baisses considérables du taux de décès dans la population pour chaque médecin de soins primaires de plus. Selon les données probantes, il importe d’avoir à la fois un milieu de soins primaires et un médecin régulier pour obtenir ces résultats, mais ce sont les personnes qui ont leur propre médecin sur une base continue qui2.
L’influence puissante des soins primaires et de la pratique familiale sur la santé s’explique habituellement par les éléments qui définissent la médecine familiale: soins complets, continuité et coordination des soins, sans compter la relation continue entre le patient et le médecin personnel, qui donne des conseils et des soins fiables, quel que soit le problème ou la période de la vie d’une personne et de sa famille.
Comme à Roseto, la santé de la population est meilleure quand on a une ressource fiable vers qui se tourner en cas de problème - une personne qu’on connaît et qui nous connaît avec le temps. Les médecins de famille et leur pratique de soins primaires ont fait leur preuve à cet égard. Les patients se sentent confiants et en sécurité, sachant qu’ils ont leur propre médecin de famille compétent pour les aider à se maintenir en santé et, s’ils sont malades, leur donner une meilleure chance de guérison. Les médecins de famille qui offrent des soins complets et continus deviennent membres de la famille élargie du patient.
Selon une multitude de données probantes, il est clairement justifié de revendiquer plus d’investissements pour les soins primaires et les médecins de famille. Venez entendre Barbara Starfield vous en parler au Forum en médecine familiale, le 29 octobre, à Calgary, en Alberta, et unissez-vous au Collège pour communiquer aux décideurs la valeur indiscutable pour tous les Canadiens d’avoir son propre médecin de famille.
Footnotes
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This article is also in English on page 768.
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