
Dr Mark Nowaczynski est médecin de famille à Toronto, en Ontario, certifié et fellow du Collège des médecins de famille du Canada, clinicien et enseignant dévoué, et artiste photographe accompli. Jusqu’au 11 octobre 2010, le Royal Ontario Museum expose 36 de ses photographies sous le thème « Visites à domicile avec mon appareil photo ».Si vous vivez à Toronto ou visitez la ville, ne ratez pas cette exposition.
Les visites à domicile ont toujours été une part importante de la pratique générale de la médecine dans l’histoire de notre profession. Depuis les dernières années, nous voyons toutefois un déclin du nombre de ces visites1, ce qui s’explique par divers facteurs1: rémunération insuffisante, circulation urbaine, problèmes de stationnement, manque de temps pour les médecins aux prises avec les exigences créées par la pénurie de médecins, le vieillissement de la population et la complexité grandissante des problèmes médicaux. Même s’il est plus facile de faire certains tests diagnostiques et traitements en cabinet ou à l’hôpital, ceux qui font des visites à domicile savent que les patients, les médecins, la relation patient-médecin, qui est essentielle à de meilleures résultats, bénéficient tous des connaissances acquises et des liens qui se créent durant ces rencontres. Pour les patients dont les problèmes physiques, mentaux ou socioéconomiques les empêchent de sortir de chez-eux, des visites à domicile prévues régulièrement peuvent en réalité être vitales.
Nowaczynski consacre sa pratique aux soins aux personnes âgées, marginalisées et confinées à la maison, dans le centre-ville de Toronto. Il valorise également la vie de chaque personne et a fait en sorte de prodiguer des soins médicaux à ceux qui n’en auraient autrement pas eus. Ses patients sont généralement négligés et luttent pour survivre. Ce qui a commencé en tant qu’élément d’une pratique familiale générale en cabinet est devenu l’ensemble de son travail à plein temps. Il travaille maintenant avec une équipe d’infirmières, d’ergothérapeutes, de travailleurs sociaux et d’autres professionnels de la santé. Ensemble, ils répondent aux besoins médicaux de tous ceux qu’ils rencontrent et coordonnent leurs soins - c’est un « medical home » mobile centré sur le patient! Nowaczynski est souvent accompagné d’étudiants en médecine ou de résidents en pratique familiale, à qui il offre des expériences d’apprentissage enrichissantes.
En dépit de la nécessité et de la réussite du travail de Nowaczynski, notre système n’a pas encore fourni le soutien nécessaire aux visites à domicile auprès de la population âgée et confinée à la maison, et les médecins de famille ne font pas la queue pour offrir ces services. Ceux qui ont le plus besoin d’évaluations et de traitements médicaux à la maison - personnes âgées, frêles et handicapées - ne reçoivent pas l’attention ni les soins dont ils ont besoin.
Nowaczynski, frustré par cette stagnation, n’a pas abandonné. Il a trouvé d’autres moyens de montrer la valeur de tels services, et la satisfaction et le bonheur qu’on en tire. Sa sensibilité et sa compassion s’expriment non seulement dans sa pratique, mais aussi dans ses photos en noir et blanc, prises (avec le consentement de ses patients) durant ses visites. Ces photos et le texte qui les accompagne transmettent ce que son esprit a appris, ce que son coeur a ressenti et ce qu’il a vu, de ses yeux et au travers de la lentille. Ses récits nous rappellent la dure réalité que vivent tant de nos personnes âgées, accrochées aux derniers vestiges de leur vie passée, délaissées par une société à laquelle ils ont pourtant contribué de bien des façons. À ceux d’entre nous qui ont la capacité et la responsabilité de donner aux personnes qui luttent à la fin de leur vie les soins médicaux dont ils ont besoin et qu’ils méritent, il rappelle qu’ils pourraient et devraient le faire.
Dans son éditorial du Toronto Star, Carol Goar qualifie l’exposition au Royal Ontario Museum de puissante et de profondément respectueuse2. Elle espère que l’exposition saura inciter les médecins, surtout les jeunes, à raviver une tradition de visites à domicile qui n’aurait jamais dû disparaître; les bureaucrates de la santé à reconnaître que l’empressement à augmenter le nombre d’interventions laisse pour compte ceux qui ont bâti le pays; et la population à être plus consciente des foyers délabrés où vivent les aînés qui craignent l’institutionnalisation autant que la mort.
« Demandez-vous, dit-elle, si ce pourrait être votre grand-père ou votre mère ou, un jour, vous-même. »
Visites à domicile, soins aux aînés, le rôle du médecin de famille - s’agit-il seulement des souvenirs d’un passé lointain ou pourraient-ils revivre et redevenir des segments importants d’un plan de soins de santé futur? En combinant la compétence et la compassion d’un médecin de famille à son génie photographique, Nowaczynski aurait-il redécouvert un art perdu?
Footnotes
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This article is also in English on page 724.
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