
Une fois que nous croyons en nous-mêmes, nous pouvons risquer la curiosité, l’émerveillement, l’enchantement spontané ou toute expérience qui révèle l’esprit humain.
e.e. cummings (traduction libre)
Dans ce numéro du Médecin de famille canadien (MFC), nous célébrons la croissance et la diversité de la recherche en médecine familiale au Canada. Au cours des 2 dernières décennies, les activités de recherche en médecine familiale ont connu une expansion remarquable. De nombreux départements de médecine familiale au pays ont formé de solides noyaux regroupant des médecins de famille et des chercheurs en santé subventionnés possédant une infrastructure et un soutien administratif stables.1,2 Ces chercheurs décrochent des subventions et publient les résultats de leur recherche dans des revues réputées, comme le MFC et Annals of Family Medicine, des revues de médecine familiale de grande qualité et à fort impact, qui se consacrent à la publication d’excellents travaux de recherche dans la discipline.
Le commentaire de Dr William Hogg (page e354) met en évidence la reconnaissance accrue et les possibilités grandissantes de la recherche en médecine familiale dans le contexte de l’initiative sur les soins de santé primaires des Instituts de recherche en santé du Canada3. Vous pourrez aussi lire dans ce numéro (page e401) un aperçu de la structure et des objectifs du Réseau canadien de surveillance sentinelle en soins primaires, le premier article d’une série au sujet du RCSSSP intitulée L’œil de la sentinelle4. Le Canada traîne de l’arrière par rapport à de nombreux autres pays dans la création d’un tel réseau de recherche axée sur la pratique en soins primaires, et le RCSSSP, créé avec la collaboration de l’Agence de la santé publique du Canada, est une addition des plus bienvenues sur la scène de la recherche.
Ce numéro présente aussi un article par Jyoti Kotecha et d’autres membres du RCSSSP (page 1165), qui examine les défis que posent les comités institutionnels d’éthique de la recherche pour l’exécution de travaux de recherche dans un réseau centré sur la pratique5. Pour accompagner cette étude, un commentaire critique (page 1115) par Dr Ross Upshur, médecin de famille et directeur du Centre mixte pour la bioéthique à l’University of Toronto, propose des suggestions pour aider les chercheurs et les comités d’éthique de la recherche des établissements à travailler ensemble6.
Et comme par enchantement, la page couverture du mois met en vedette une chercheuse en médecine familiale, Dre Margaret McGregor, lauréate d’un prix du programme des cliniciens-chercheurs basés dans la communauté de l’University of British Columbia. Ce programme permettait aux médecins de famille de consacrer jusqu’à la moitié de leur temps à la recherche pendant trois ans et insistait plus particulièrement sur les projets à l’intention des populations vulnérables. Les travaux de Dre McGregor, portaient sur l’examen et l’évaluation des politiques sur la santé et de leurs influences sur les personnes en foyers d’accueil en Colombie-Britannique7,8.
Bien que nous ayons beaucoup de raisons de nous réjouir, il pourrait aussi y avoir un « thème négligé » à cette célébration de la recherche. En rétrospective, après avoir analysé les 2 premières années et les 110 articles de recherche publiés dans les Annals of Family Medicine9, les rédacteurs ont déploré qu’en dépit de la diversité des modalités du savoir représentées, le faible pourcentage d’études qui présentent des sujets cliniques selon le point de vue unique des soins primaires met en évidence une connexion trop serrée avec le paradigme réductionniste dominant d’un système de santé qui semble largement considéré comme défaillant9.
Depuis plus de 10 ans10,11, Dr Ian McWhinney essaie d’attirer notre attention sur le fait que les médecins de famille en pratique, pas seulement les chercheurs, sont en position privilégiée pour poser des questions (et y répondre) selon la perspective de la présentation véritable de la santé et de la maladie chez des personnes, des familles et des communautés relativement indéterminées9. Il a fait valoir que les découvertes et les intuitions cliniques venant de la pratique devraient constituer une catégorie en elles-mêmes dans les revues de médecine familiale, appelées peut-être Découvertes12. Il s’est aussi posé la question: «Comment ces travaux devraient-ils être jugés?». Il propose 4 critères: le caractère plausible; une corroboration des sciences fondamentales et des ouvrages spécialisés pertinents; la clarté des concepts; et la reproductibilité des procédures12.
Par le passé, le MFC a justement publié ce genre de travaux descriptifs, axés sur la pratique, réalisés par des médecins de famille en pratique clinique13, mais nous devons encourager l’exécution d’un plus grand nombre de ces travaux. À cette fin, nous sollicitons la présentation de ce type d’articles de recherche sous le titre de Découverte clinique. Pour en savoir plus, visitez www.cfp.ca.
Footnotes
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