
Notre dilemme, c’est d’haïr et d’aimer en même temps le changement; ce que nous voulons vraiment, c’est que les choses restent les mêmes, mais en mieux.
Sydney J. Harris (traduction libre)
Il ne fait nul doute que le changement fait partie intégrante de la condition humaine et de la vie quotidienne. Nous entendons parler et nous discutons de gestion du changement, de théorie du changement, d’obstacles au changement et de moteurs de changement. Les médecins de famille sont comme le reste de la planète - nous désirons la sécurité pour nous-mêmes et nos proches et nous aspirons à la promesse d’un meilleur avenir et de jours meilleurs. Souvent, je souris lorsque j’entends qu’en tant que médecin, on m’identifie comme un obstacle au progrès. En réalité, il est juste de dire que les médecins en général sont considérés collectivement comme un groupe qui déteste le changement et veut à tout prix maintenir le statu quo.
Comprenez-moi bien. Je n’essaie pas de dire que tous les médecins de famille sont prêts à épouser la réforme des soins de santé et à changer la façon dont nous soignons nos patients. Par contre, je crois que la plupart des médecins de famille voient le train venir depuis un certain temps. L’appréhension que nous éprouvons est bien compréhensible - je ne suis jamais monté auparavant dans un train sans savoir où il allait et je parie que la majorité des personnes fiables et équilibrées qui lisent cet article ne l’ont jamais fait non plus. Il y a bien ces aventuriers qui vont à l’aéroport et prennent le premier avion en partance, mais même ces gens connaissent leur destination avant d’arriver; ils savent à quoi s’attendre, s’il fera chaud ou froid, s’ils se retrouveront sur la plage ou à la montagne. Ne serait-ce donc pas trop demander aux médecins de famille que de confier leur propre avenir - et les soins et la sécurité de leurs patients - au gré de changements qui n’ont pas de destination connue ou de but fixe?
Dégager la voie
Il me semble parfaitement raisonnable de dire que nous devrions - non, nous devons - définir un cheminement, pour nos patients et pour les médecins de famille - qui mène à une meilleure santé de la population, à de meilleurs résultats, à des patients et médecins plus satisfaits. Je crois que notre Collège a déjà commencé à tracer cette voie à travers la culture des soins de santé au Canada, ce que nous appelons le concept du medical home des patients. Nous sommes convaincus qu’il servira de modèle pour l’avenir des soins de santé primaires au pays. Il ne s’agit clairement pas d’un modèle universel; de fait, il situe chaque patient comme le point central de sa propre prise en charge médicale. Il ne laisse pas entendre que nous, en tant que fournisseurs, nous ne faisons pas un bon travail dans nos réalités actuelles, mais il préconise la vision d’une nouvelle réalité dans laquelle nous pouvons offrir le genre d’approche en équipe qui, selon les données scientifiques, donnera de meilleurs résultats à coûts moindres dans l’ensemble pour le système. Des données publiées dans le numéro de mai 2010 de Health Affairs démontrent des améliorations dramatiques dans les taux de recours aux urgences, d’hospitalisation et de satisfaction des patients, ainsi qu’une réduction des niveaux d’épuisement professionnel, le tout avec une baisse de 20 % des coûts. Cette étude portait sur un modèle semblable, mis en œuvre dans une population desservie par Group Health à Seattle, Washington1.
Montrer le chemin
Pensons-nous vraiment que des résultats comme ceux-là sont impossibles à atteindre au Canada? Je crois que ce sont des objectifs parfaitement raisonnables - des buts qui peuvent servir de phares à mesure que nous naviguons vers ce nouveau modèle de soins. Même si de telles données probantes existent depuis un certain temps, il est clairement nécessaire d’avoir un modèle pancanadien qui définirait ce à quoi les patients peuvent s’attendre quand ils ont accès à leur propre médecin de famille.
Ce dont nous avons besoin, c’est encore davantage du genre de soins que les Canadiens s’attendent de nous - avec compassion, fondés sur la relation, compétents et professionnels - et d’une prestation de tels soins reposant sur une nouvelle base de travail en équipe centré sur le patient.
La même chose, juste différemment.
Footnotes
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This article is also in English on page 373.
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Référence
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