
Dans ce numéro, Beaulac et coll. (page e122) nous apprennent que l’activité physique est bénéfique non seulement pour la condition physique mais également pour le moral.1 Ils basent cette affirmation sur une revue systématique de la littérature Cochrane2 publiée en 2009 et sur une étude clinique contrôlée3 comparant l’activité physique aux antidépresseurs. Même si les conclusions de la méta-analyse appellent à la prudence, les bénéfices étant moins démontrés lorsque seules les études rigoureuses sont considérées, les auteurs concluent néanmoins que l’exercice semble améliorer les symptômes dépressifs chez les personnes souffrant de dépression. Quant à l’étude clinique comparative citée par les auteurs, réalisée auprès de 202 adultes, elle démontre que la pratique de l’activité physique est au moins aussi efficace que les antidépresseurs. Intéressant, surtout lorsqu’on considère le nombre de personnes qui prennent actuellement de tels médicaments.
Ces observations en soi n’ont cependant rien de surprenantes. Autrement, comment expliquer le comportement de ceux qui vont régulièrement s’entraîner au gymnase sur l’heure du midi ou courir après leur journée de travail, ou simplement qui vont au boulot en vélo? Certains le font sans doute pour garder la forme qui est toutefois bien relative. Il suffit de pratiquer une nouvelle activité pour découvrir que nous avons des muscles dont on ignorait jusque-là l’existence et pour finalement réaliser qu’être en forme peut varier selon les circonstances. D’autres le font dans l’espoir de rester en santé et d’éviter la maladie; mais pour la plupart, cette dernière demeure une éventualité lointaine et abstraite jusqu’à son apparition. Comme personne n’est à l’abri d’une catastrophe ou de l’inévitable, tous conviendront que la pratique de l’activité physique est sûrement bénéfique mais ne garantit en rien la longévité éternelle. Il est donc probable que la plupart de ceux qui pratiquent régulièrement l’activité physique le font essentiellement en raison du bien-être qu’elle leur procure, endorphine oblige.
En tout cas, quant à moi, je le dis ouvertement: «Je fais de l’exercice car c’est bon pour mon moral». Et même si je n’ai aucune idée de mon taux de cholestérol (simplement que je n’arrive pas à me trouver un médecin de famille mais ça, c’est une autre histoire!); et même si ma connaissance de mon taux de glycémie tient uniquement au fait que le réflectomètre que nous utilisons à l’Unité de Médecine Familiale est si compliqué, que je dois me pratiquer sur moi-même lorsque je veux m’en servir; et même si je fais attention à mon poids, uniquement parce qu’on me surveille à la maison; et finalement, même si je n’ai aucune idée de mon VO2 max, je suis néanmoins convaincu, comme tous les autres «addicts», que la pratique de l’activité physique m’est bénéfique.
Quand tout va mal, quand je suis fatigué, je sors mon vélo ou bien je vais à la piscine. Rien n’indique que ce faisant, je ne mourrai pas d’un infarctus du myocarde ni que je ne serai pas affligé d’un accident vasculaire cérébral, ni emporté par un terrible cancer, mais pour l’instant, je savoure les moments de fatigue et de délice que me procure l’activité physique. Que je gagne ou perde mes matchs de tennis m’importe peu (ou tant soit peu!). La découverte et la pratique d’un nouveau sport confèrent des instants de délice et de plaisir. Je me suis récemment initié au kite sur neige: de la folie, du plaisir à l’état pur. «Vieux fou» me disaient mes amis. Effectivement, et je suis bien heureux de l’être!
Au moment où vous lirez ces lignes, le printemps aura fait son apparition: «Heureux d’un printemps qui me chauffe la couenne4». Enfourchez vos vélos, allez marcher dans le sentier. Ne sentez-vous pas le soleil qui chauffe votre peau? Le vent qui caresse vos joues? La pluie qui vous fait frissonner et apprécier l’intérieur?
Je n’ai aucune idée si le fait d’être un exemple pour nos patients a une influence quelconque sur leur participation à l’activité physique, mais faites-le donc plutôt pour vous. Comme le dit l’adage, si l’activité physique n’ajoute pas des années à votre vie, elle ajoute certainement de la vie à vos années. Allez hop!
Footnotes
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Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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This article is also in English on page 397.
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