L’éducation est un genre de dialogue continu, et de par sa nature même, le dialogue présume différents points de vue.
Robert Maynard Hutchins (1899–1977, traduction libre)
Robert Maynard Hutchins était un philosophe pédagogue, doyen de la Faculté de droit à la Yale University à New Haven, au Connecticut, et recteur et chancelier de l’University of Chicago, en Illinois1. Hutchins est devenu l’un des membres les plus influents de l’école du pérennialisme en éducation. Les pérennialistes croient que l’on devrait enseigner les choses que l’on croit être d’une grande importance pour tous, en tout temps et en tous lieux. Ils croient que les plus importants sujets développent une personne. Parce que les faits changent constamment dans les détails, ils ne peuvent pas être les plus importants. Par conséquent, on devrait enseigner des principes et non des faits1. Il n’est pas étonnant que cette vision de l’éducation ait suscité la controverse.
L’éducation en médecine familiale au Canada subit elle-même une transformation et fait l’objet de débats au sujet des meilleures façons de former les résidents pour les préparer au monde changeant de la pratique, à un cheminement d’apprentissage permanent et au maintien de la compétence. Jusqu’à récemment, la formation postdoctorale était principalement axée sur le temps, ce que Hodges désigne comme étant une approche «d’infusion» à la formation médicale postdoctorale2. Les résidents passent du temps en formation dans diverses spécialités et différents milieux dans le but d’acquérir les connaissances, les habiletés, les valeurs professionnelles et la motivation voulues pour entrer en pratique. La dernière décennie a été la scène d’un mouvement d’éloignement d’une formation axée sur le temps pour se tourner vers un modèle de formation médicale axée sur les compétences (FMAC), qui insiste sur des résultats observables et mesurables. Parmi les forces motrices de ce changement se trouve l’importance accordée à la gestion du risque, aux droits des consommateurs, à la sécurité des patients et à l’expansion des effectifs médicaux3.
Au cours des prochains mois, les lecteurs du Médecin de famille canadien verront un plus grand nombre d’articles sur la formation en médecine familiale axée sur le développement des compétences. Dans le présent numéro se trouve le premier d’une série d’articles de recherche révisés par des pairs, rédigé par Allen et ses collaborateurs (page e331)4, qui décrit le processus suivi par le Bureau des examinateurs pour définir la compétence en médecine familiale. On y trouve aussi une pratique description de programme, produite par Ross et ses collègues (page e323), qui présente une méthode pour évaluer la compétence des résidents en médecine familiale dans diverses habiletés5.
La formation médicale fondée sur les compétences fait aussi l’objet de critiques3,6. Talbot déclare qu’en formant des médecins, nous aspirons à quelque chose qui ressemble plus à l’expertise qu’à la compétence et que, sur le plan de l’évaluation des compétences, le danger est toujours de poser des questions sur des sujets plus facilement mesurables plutôt que les questions les plus difficiles6. La FMAC est portée à établir des normes uniformes dans les différents milieux, mais on se demande si cette façon de faire ne limitera pas la réflexion, l’intuition, l’expérience et l’ordre élevé des compétences nécessaires pour une pratique experte, holistique ou bien développée6.
En dépit de telles critiques, la FMAC en médecine familiale est là pour rester. Reconnaissant les défis d’élaborer et de mettre en œuvre la FMAC, un groupe de professeurs de médecine a mis sur pied en 2009 une collaboration internationale sur la FMAC. Les collaborateurs ont pour objectifs de passer en revue les ouvrages internationaux sur la FMAC, d’identifier les controverses qu’il faut clarifier, d’explorer les orientations futures et de proposer des définitions consensuelles qui peuvent être utiles aux professeurs partout dans le monde7. Le Médecin de famille canadien a bien hâte de vous présenter plus de renseignements et de discussions sur la formation médicale axée sur le développement des compétences dans les mois qui viennent.
Footnotes
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This article is also in English on page 981.
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Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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