Dre Kay lance un débat intéressant1, en affirmant que nous dramatisons à l’excès l’épuisement professionnel chez les médecins de famille. Elle explique que la prévalence élevée d’épuisement professionnel rapportée dans plusieurs études est alarmante et que les liens entre le stress au travail, l’épuisement professionnel et les soins aux patients ne sont pas nécessairement causals. Dre Kay prétend que les taux élevés de prévalence combinés avec le désordre méthodologique peuvent avoir des «conséquences sérieuses autant sur les médecins en tant qu’individus que sur la profession» 1.
Je pense plutôt que si l’on ne tient pas compte des 25 années de recherche sur l’épuisement professionnel ou qu’on les considère insignifiantes, nous risquons une conséquence encore bien plus sérieuse—le déni de l’épuisement professionnel chez les médecins. Lors de ma formation en médecine, il y a presque 30 ans, la culture médicale projetait une image du médecin comme étant invulnérable, immunisé contre le stress imputable à la pratique. À un moment donné, durant ma deuxième année, j’étais dépassée et, pourtant, j’ai vécu secrètement ma détresse. D’une façon détournée, j’avais reçu le message tacite que je serais une «lâcheuse» si je révélais ma vulnérabilité.
Un important changement culturel s’est produit. Par exemple, à la McMaster University, à Hamilton, en Ontario, «les soins et la conscience de soi» sont officiellement reconnus dans le cursus sur les compétences professionnelles pour les étudiants en médecine de premier cycle. Nous encourageons les médecins à parler du stress inhérent à la profession et incitons les étudiants à réfléchir aux soins de soi durant leur formation professionnelle.
Dre Kay suggère que le discours à propos de l’épuisement professionnel chez les médecins peut mener à la stigmatisation. Je considère plutôt que le dialogue ouvert concernant l’épuisement professionnel réduit la stigmatisation en permettant aux étudiants de chercher de l’aide au besoin. Un soutien aux étudiants est disponible dans notre établissement par l’entremise du Bureau des affaires étudiantes, d’un programme de mentorat par des étudiants de cycle supérieur et de professeurs conseillers. Pour les médecins, l’Ontario Medical Association offre un service d’assistance confidentielle, grâce au Programme de santé des médecins (http://php.oma.org).
Dre Kay soutient qu’il y a peu de recherche sur les interventions appropriées pour les médecins qui sont en détresse ou sur la promotion de la santé des médecins. L’étude2 que mes collègues et moi avons menée sur la résilience des médecins a été faite exactement pour cette raison. Notre échantillon prémédité de médecins très résilients (identifiés par les pairs) a permis d’identifier une quantité de stratégies et de concepts qui favorisent le bien-être. L’émergence de la «résilience» et du «bien-être» des médecins au lieu de «l’épuisement professionnel» comme concentration de recherche est une tendance santé.
Selon Dre Kay, en tant que médecins, nous sommes envoûtés par ce drame de plus en plus apparent d’épuisement professionnel. Je suis d’avis que le discours à propos de l’épuisement professionnel nous a aidés à reconnaître notre propre vulnérabilité et à vivre plus sainement.
Footnotes
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Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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Ces réfutations sont les réponses des auteurs des débats dans le numéro de juillet (Can Fam Physician 2012;58:730–3 [ang], 734–7 [fr]).
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