Chers collègues,
Depuis mon entrée en fonction comme directrice générale, j’ai consacré beaucoup d’énergie à la nouvelle section des médecins de famille avec intérêts particuliers ou pratiques ciblées. Le présent article nous rappelle d’où nous venons, mais aussi tente de dissiper les malentendus, de faire le point sur nos progrès en éducation et d’exposer franchement les incertitudes.
L’intégration des compétences avancées en médecine familiale n’est pas un phénomène nouveau. Au début de ma carrière clinique, qui s’échelonne sur plus de 30 ans, j’exerçais comme MF anesthésiste, en plus de dispenser de nombreux soins intrapartum dans ma collectivité. Puis ma pratique a évolué, et j’ai accordé une plus grande place aux soins d’urgence et assumé plus de responsabilités administratives. Ce sont surtout les besoins de la collectivité et les intérêts personnels qui tracent l’évolution vers les domaines d’intérêt particulier.1 Les résultats du Sondage national des médecins de 2010 révèlent qu’environ 30 % des MF développent des intérêts particuliers ou des pratiques ciblées.2
C’est en médecine d’urgence que le CMFC définit les compétences avancées et délivre des titres de compétences depuis le plus longtemps. Notre objectif était de mieux préparer les MF dispensant des soins d’urgence à répondre aux besoins de leur collectivité. Pour de nombreux médecins de famille, la pénurie relative de médecins au Canada et le besoin d’offrir des services d’urgence ont mené à un engagement à temps plein en médecine d’urgence. Si je mentionne ces faits, c’est que je veux souligner que pour tous les médecins, les décisions concernant les champs de pratique sont multifactorielles et influencées par des facteurs qui vont au-delà des normes d’éducation dont le Collège royal des médecins et chirurgiens du Canada et le CMFC sont responsables. Par ailleurs, il est bon de rappeler que les MF sont nombreux à continuer d’intégrer les soins d’urgence à leur pratique complète et globale et que la plupart des soins d’urgence au pays sont donnés par des MF.
La médecine palliative est un domaine de soins avancés agréé conjointement par le Collège royal et le CMFC. Sa mise en œuvre a permis d’améliorer l’accès aux soins en fin de vie et de répondre à un besoin sociétal important. Au Canada, la majorité des soins palliatifs sont dispensés par des MF œuvrant dans une pratique complète et globale ou ciblée. Alors que la plupart des MF qui jouent un rôle prépondérant en soins palliatifs ont choisi ce domaine après avoir travaillé plusieurs années dans une pratique traditionnelle, la plupart de ceux qui l’ont choisie ces dernières années se sont engagés dans cette voie avant d’avoir dispensé des soins complets, globaux et continus dans des pratiques de médecine familiale. Cette tendance aura des conséquences sur l’avenir de la formation en compétences avancées.
Le Conseil d’administration du CMFC a approuvé l’attribution de certificats de compétence additionnelle (CCA) dans trois domaines supplémentaires : anesthésie en MF, soins des personnes âgées et médecine du sport et de l’exercice. Par ailleurs, le Conseil a approuvé trois voies d’accessibilité à un CCA : la formation en compétences avancées; la voie de l’expertise qui, pour une durée limitée, permettra de reconnaître l’expertise des chefs de file de la MF et de faciliter l’obtention d’un CCA; et la voie de la pratique, qui n’a pas encore été élaborée3, mais qui nécessitera un portfolio et peutêtre même une évaluation par des pairs. Il ne faut pas non plus oublier les grands domaines émergents se rapportant à la médecine familiale où les compétences additionnelles ont souvent été acquises par des chefs de file de la MF (p. ex. le VIH, la dépendance, la gestion de la douleur).4
Le Conseil d’administration et d’autres parties intéressées nous ont mis en garde contre le risque de fragmenter notre profession.5 Nous comprenons cette tension. Mais notre initiative a également reçu des commentaires favorables. Nous avons même observé certaines influences positives, notamment l’inclusion des MF ayant des compétences avancées dans notre famille professionnelle; la définition des compétences des MF ayant des compétences avancées; une meilleure intégration des MF ayant des compétences avancées dans les pratiques de médecine familiale et dans un rôle de personne-ressource auprès de leurs collègues; la promotion des droits et des politiques dans ces domaines cliniques; et la redéfinition des compétences essentielles pour tous les MF.
Si une chose exige de « l’énergie », cela ne signifie pas pour autant qu’elle doive être abandonnée. Plusieurs questions se posent : À quels domaines devrait-on attribuer un CCA? Quelles devraient être les exigences pour le maintien d’un CCA? Les MF qui détiennent un CCA devraient-ils maintenir leur compétence dans la spécialité primaire : la médecine familiale? Dans ce cas, comment le CMFC pourra-t-il en surveiller l’application? La plupart s’accordent pour dire qu’il est important que le CMFC définisse les compétences avancées. Quel rôle devrions-nous jouer pour assurer que ces MF ont réellement les compétences nécessaires pour dispenser des soins de qualité? Savons-nous si ces médecins contribuent à dispenser des soins efficaces qui répondent aux besoins de la société? Devrons-nous imposer des frais additionnels à ceux qui souhaitent obtenir un CCA? Ce ne sont là que quelques-unes des questions à l’étude.6
Je vous fournirai d’autres mises à jour dès que ces questions et d’autres enjeux auront fait l’objet d’une analyse plus approfondie. N’hésitez pas à transmettre vos commentaires et suggestions au CMFC et à votre section provinciale.
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