
À mes débuts dans le rôle de président, je me sens comme si je me tenais debout à mi-chemin sur un pont. Derrière moi se tient le médecin de famille dévoué, parental, fort d’une expérience et d’une sagesse accumulées de longue date, plus faible du côté des titres de compétence, des certificats et de la formation, mais armé de solutions à des problèmes courants, avec empathie et compréhension et l’acceptation de l’immuable. De l’autre côté, une image plus compliquée de soins fondés sur des données populationnelles et des renseignements recueillis sur Internet, des professionnels qui collaborent ou se concurrencent, des attentes de soins proactifs et individualisés et plus de « qualifications », le tout, compliqué par une potentielle divergence rurale-urbaine. Sous le pont se trouve le courant des demandes grandissantes, des attentes d’une qualité supérieure et de l’imputabilité. Balayant le peu de cheveux qu’il me reste soufflent les vents du changement : du nouveau dans l’air qui laisse prédire des transformations ou encore des variations dans la dynamique des soins primaires et spécialisés.
La stabilité de l’après-guerre, avec son souci du civisme, son sens de l’ordre et son insistance sur le « collectif professionnel » semble se désintégrer. Pour les jeunes, plus rien n’est certain. Pour les vieux, la mort est toujours inévitable, quoique souvent compliquée par les nouvelles technologies qui la retardent. Nous sommes déconcertés par les études qui démontrent, des différences absolues de 3 % ou moins dans les traitements. D’une manière ou d’une autre, nous devons leur trouver un sens pour chaque patient tandis que d’autres préconisent le moindre avantage thérapeutique.
Est-ce donc étonnant que nos jeunes médecins soient hésitants dans leurs premiers pas en pratique, que nos médecins chevronnés soient submergés et que nos médecins plus âgés succombent aux promesses de la retraite? Dans ce contexte apparemment dystopique demeure l’espoir d’une réinvention bâtie sur les assises de la réaffirmation de nos valeurs :
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des collaborations transparentes;
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un rééquilibre des soins primaires et tertiaires;
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le mariage de la santé publique avec les soins primaires (un début, affirmé ici avec optimisme)
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un engagement renouvelé à l’endroit des déterminants non médicaux de la santé;
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plus d’attention accordée à la responsabilité sociale;
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l’égalité des chances;
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l’intégrité et le dur labeur; et, bien entendu,
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nos quatre principes de la médecine familiale.
L’important est de les mettre en œuvre dans le contexte de notre système de santé. Pour ce faire, nous avons besoin de la sagesse de nos membres, des sections, des enseignants et des sections provinciales. C’est là que se situe le défi de notre CMFC. Je crois que le travail est bien entamé, ou en voie de discussion.
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La création de Certificats de compétence additionnelle (CCA) a ironiquement aidé à réaffirmer la « marque de commerce fondamentale » des soins complets, globaux et continus. L’importance de relier les CCA avec les besoins de la communauté a été soulevée et pourrait éclairer de futurs processus entourant les CCA et les possibilités de formation avancée.
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Des changements à la gouvernance, s’ils sont ratifiés par les membres, devraient accroître l’efficacité du travail de porte-parole et de défense des intérêts, ainsi que le champ d’action au niveau national, tout en habilitant et en mobilisant les sections provinciales. La voix des membres et des sections devrait se faire entendre davantage.
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Les efforts de recherche viseront à encourager non seulement les activités au niveau individuel, mais aussi la recherche sur le plan plus large (souvent dirigée par le Collège national) dans le but de développer et de comprendre ce qu’est la pratique familiale au Canada, ses défis et ses possibilités.
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Les rôles et les responsabilités du Collège national et des sections provinciales seront de mieux en mieux compris—et en collaboration.
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Le milieu de l’enseignement impliquera plus de membres et le cursus pédagogique reflétera mieux ce qu’on attend d’un médecin de famille, qu’importe le lieu de pratique.
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Le développement professionnel continu qui engendre des améliorations à la qualité de la pratique, sera appuyé par la nouvelle plateforme Mainpro+.
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La collaboration avec nos homologues comme l’Association médicale canadienne, le Collège royal des médecins et chirurgiens et l’Association des facultés de médecine du Canada permettra une plus grande harmonisation, d’où une planification rationnelle des effectifs médicaux et de la formation et une clarté des rôles.
Ces efforts devraient se traduire, par un environnement plus clair, compréhensible et navigable pour nos membres. Nous serons bien placés pour être un porte-parole national pour nos membres et un partenaire pour nos sections, sections provinciales et départements.
J’ai commencé ma présidence avec trépidation, optimisme et humilité. Je suis convaincu que nous sommes dans la bonne direction—une orientation qui habilitera les sections et les sections provinciales à travailler avec les départements universitaires pour optimiser le cursus et apporter de la plus-value à nos membres. J’espère, qu’à la fin de l’année, des progrès auront été réalisés.
Footnotes
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This article is also in English on page 285.
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