Un consommateur d’alcool à risque est une personne qui boit plus que la quantité d’alcool recommandée dans les Directives de consommation d’alcool à faible risque du Canada (DCAFR)1, mais qui ne correspond pas aux critères cliniques des troubles liés à l’usage d’alcool (TUA). Les troubles liés à l’usage d’alcool font partie des maladies psychiatriques se trouvant dans la 5e édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (MDSTM-V) et sont définis comme étant un usage d’alcool causant une déficience ou une détresse cliniquement importante. Ils se caractérisent par un contrôle insuffisant de la consommation, la poursuite de l’habitude malgré la conscience des conséquences et la négligence des responsabilités. Selon le manuel de diagnostic MDSTM-V, les TUA sont classés comme étant légers, modérés ou sévères. Les médecins seront peut-être plus familiers avec les catégories de diagnostics se trouvant dans l’édition précédente du MDSTM : l’abus d’alcool et la dépendance à l’alcool. L’abus d’alcool correspond à des TUA plus légers, tandis que la dépendance à l’alcool équivaut à des TUA plus sévères.
Les DCAFR canadiennes indiquent que les dommages à long terme liés à la consommation d’alcool peuvent être minimisés si les femmes adultes ne boivent pas plus de 2 consommations par jour ou 10 par semaine et que les hommes adultes n’en boivent pas plus de 3 par jour ou 15 par semaine. Les effets nocifs aigus de l’alcool peuvent être minimisés en ne buvant pas plus de 3 consommations par occasion pour les femmes et pas plus de 4 pour les hommes. La consommation réduite ou l’abstinence sont conseillées aux personnes qui risquent le plus de subir des effets nocifs (p. ex. les patients prenant des médicaments sédatifs, les femmes enceintes et les jeunes).
L’usage abusif d’alcool est courant dans la société canadienne; environ 14 % des personnes de 15 ans et plus excédaient les DCAFR quant au risque de consommation chronique et 10 % dépassaient les directives de consommation pour limiter les risques à court terme2. De plus, environ 2,6 % de la population répond au critère de la dépendance à l’alcool, soit l’équivalent des TUA de modérés à sévères3.
L’abus d’alcool fait partie des plus importantes causes de décès et d’invalidité évitables au Canada4. Les personnes qui abusent de l’alcool (et leurs familles) subissent des effets néfastes physiques, mentaux et sociaux, notamment des accidents de la route, la violence conjugale, les blessures, la dépendance, plusieurs types de cancers, des maladies hépatiques, des maladies cardiaques et des maladies mentales, ainsi que des troubles causés par l’alcoolisation fœtale5. Les coûts pour la société canadienne sont également énormes : selon une étude, on estime les coûts totaux reliés à l’abus d’alcool en 2002 à 14,6 milliards $, dont 3,3 milliards $ en coûts directs des soins de santé6.
Les patients ayant des TUA présentent des taux élevés d’autres troubles et problèmes psychologiques dont ceux liés à l’usage d’autres substances, des problèmes de santé mentale, de la violence conjugale, des situations de logement précaires, la pauvreté et des maladies chroniques. Ils présentent également des taux élevés de syndrome de stress post-traumatique résultant d’événements indésirables durant l’enfance comme les mauvais traitements, la négligence et les bouleversements familiaux7.
Description du cas : visite initiale
H.M., une femme de 43 ans, vient vous voir pour un bilan de santé. Dans le cadre du bilan, vous lui faites passer le test validé de dépistage à question unique8 de l’usage de l’alcool à effets néfastes pour la santé et lui demandez : « À combien de reprises durant la dernière année avez-vous bu plus de 4 consommations d’alcool lors d’une même occasion ? »
Elle répond : « Je ne sais pas. Assez souvent. Une fois par semaine peut-être? »
Vous la questionnez davantage sur sa consommation d’alcool. Elle boit habituellement la plupart des jours de la semaine à raison d’environ 3 consommations par jour. Par ailleurs, les fins de semaine, elle boit souvent plus de 5 consommations le soir. Elle boit habituellement de la bière, mais occasionnellement des alcools forts. Vous vous inquiétez de la quantité qu’elle boit et lui en faites part. Vous passez en revue les DCAFR canadiennes1 avec elle et lui distribuez de la documentation9. Vous lui mentionnez que réduire ou cesser sa consommation peut être difficile, mais que vous pouvez l’aider en tant que médecin.
Vous lui demandez de prendre un autre rendezvous. Elle accepte.
Sources des données
Nous avons effectué une analyse documentaire non systématique en utilisant des expressions de recherche portant sur les soins primaires, les TUA, la dépendance à l’alcool, l’abus d’alcool, l’usage abusif de l’alcool, la consommation d’alcool néfaste pour la santé, ainsi que le dépistage, la détermination et l’évaluation dans le contexte des soins primaires.
Principaux messages
Dépister chez tous les patients, au moins une fois par année, une consommation d’alcool néfaste pour la santé à l’aide d’un test validé de dépistage à question unique. Dépister les patients qui se présentent avec des problèmes médicaux ou psychosociaux qui pourraient être reliés à l’alcool. Les médecins de soins primaires devraient utiliser un test de dépistage validé pour le dépistage de la consommation d’alcool néfaste pour la santé. Ils devraient considérer l’utilisation du test de dépistage à question unique recommandé par le National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism : À combien de reprises durant la dernière année avez-vous bu plus de 4 consommations d’alcool pour une femme ou 5 pour un homme, lors d’une même occasion8,10,11? Si la réponse à la question est une fois ou plus, le résultat du dépistage est positif. Ce test de dépistage à question unique a une sensibilité de 82 % et une spécificité de 79 % dans la détection de la consommation d’alcool néfaste pour la santé8. Elle a une sensibilité plus élevée (87 %) pour détecter les TUA, mais une spécificité moins élevée (67 %). C’est un test de dépistage très simple et il permettra aux médecins de détecter la plupart des cas de consommation d’alcool à risque et de TUA chez leurs patients.
Un autre test de dépistage communément utilisé est l’AUDIT (test d’identification des troubles liés à l’usage d’alcool). La version la plus longue, qui comporte 10 questions, AUDIT-10 (www.integration.samhsa.gov/AUDIT_screener_for_alcohol.pdf) a une sensibilité et une spécificité de 92 % et de 94 %, respectivement, pour la détection des TUA. L’AUDIT-C plus court, qui compte 3 questions, (www.integration.samhsa.gov/images/res/tool_auditc.pdf) a une sensibilité de 86 % et une spécificité de 72 %. Ce sont d’excellents tests de dépistage; par contre, ils prennent plus de temps à compléter. Le questionnaire CAGE identifiera la plupart des patients ayant des TUA, mais passera à coté de plusieurs patients ayant une consommation d’alcool à risque12.
Les médecins devraient aussi dépister tous les patients qui se présentent avec des problèmes de santé pouvant être associés à l’usage d’alcool. (Tableau 1). Si la suspicion clinique de la présence d’un TUA est élevée, on devrait envisager le dépistage à l’aide de l’AUDIT-10 au lieu du test de dépistage à question unique pour augmenter la sensibilité et la spécificité. Par ailleurs, les médecins ne devraient pas se fier seulement à l’identification des cas. Des études démontrent qu’à moins que les professionnels de la santé emploient le dépistage universel à l’aide d’un test validé, plusieurs patients ayant une consommation d’alcool à risque ou des TUA légers ne sont pas dépistés et d’autres sont faussement catégorisés comme ayant un trouble13–15.
Problèmes liés à l’alcool souvent observés en soins primaires
Déterminer si les patients qui obtiennent des résultats positifs présentent une consommation d’alcool à risque ou des TUA. Les médecins devraient poser des questions spécifiques concernant la durée de la problématique reliée à l’alcool, le nombre de consommations et la fréquence de la consommation. Ils devraient questionner les patients concernant leurs envies de boire et leurs tentatives de modérer ou d’arrêter. Ils devraient déterminer si l’alcool a eu un effet sur la vie sociale, la santé physique ou la santé mentale du patient. Les médecins devraient s’informer sur le sevrage et la tolérance. Les patients font souvent mal la distinction entre les symptômes de sevrage et l’anxiété. Ils peuvent aussi être réticents à reconnaître qu’ils ont des symptômes de sevrage à cause de leur grande association avec « l’alcoolisme ». Ainsi, le médecin devrait éviter d’utiliser le terme sevrage, mais peut plutôt demander : « À quelle heure de la journée prenez-vous votre première consommation? Comment vous sentez-vous avant votre première consommation? Trouvez-vous que vos mains tremblent un peu lorsque vous tentez de prendre une tasse de café ou un autre objet? Est-ce que le tremblement disparaît après la première consommation? » Les médecins peuvent déterminer la tolérance en demandant aux patients après combien de consommations ils ont un sentiment d’euphorie ou qu’ils ressentent un effet sur leur humeur16.
Les consommateurs d’alcool à risque ne boivent habituellement pas une quantité qui soit bien au-dessus de celle recommandée par les DCAFR. Leur usage d’alcool a peu d’effets néfastes sur leur vie. Ceux qui souffrent de TUA légers boivent souvent de plus grandes quantités, mais rarement quotidiennement. Ils prennent habituellement moins de 40 consommations par semaine et n’ont pas de symptômes de sevrage sérieux. L’alcool a certains effets néfastes sur leur vie. Ceux qui souffrent de TUA modérés boivent habituellement de l’alcool quotidiennement et peuvent avoir des symptômes de sevrage. Ils peuvent consommer de l’alcool quotidiennement ou de façon intermittente, mais importante (alcoolisme périodique). Ceux qui souffrent de TUA sévères boivent habituellement sur une base quotidienne et prennent plus de 40 consommations par semaine. Ils présentent souvent des symptômes de sevrage sévères et la situation a des répercussions importantes sur leur vie.
Les médecins devraient se référer aux critères du MDSTM-V pour poser un diagnostic de TUA légers, modérés ou sévères (Encadré 1).
Critères d’un TUA selon la 5e édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux : Un résultat de 2 à 3 représente un TUA léger, de 4 à 5 désigne un TUA modéré et de 6 ou plus décrit un TUA sévère.
Chaque réponse positive vaut 1 point :
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TUA—trouble lié à l’usage d’alcool
Les médecins devraient communiquer clairement le diagnostic au patient tout en étant faisant preuve de délicatesse. Ils devraient admettre que la réduction ou la cessation de la consommation peuvent être très difficiles. Il est très important que les médecins mentionnent qu’ils peuvent offrir des traitements efficaces pour encourager les patients à avoir un suivi (Encadré 2). L’approche est similaire à celle utilisée lors de nouveaux diagnostics de tout autre problème médical sérieux.
Communiquer un diagnostic de TUA
Le médecin devrait de manière claire mais avec délicatesse communiquer au patient le diagnostic de TUA :
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TUA—trouble lié à l’usage d’alcool
Procéder à une évaluation plus approfondie des patients souffrant de TUA
Sevrage d’alcool : Tous les patients qui souffrent de TUA plus sévères devraient être questionnés à propos des symptômes antérieurs et courants de sevrage qui sont soulagés par la consommation d’alcool. À moins que les symptômes de sevrage soient très légers, le sevrage ne devrait pas être pris en charge à l’aide d’une ordonnance à prendre à la maison car ce n’est pas sécuritaire.
Les patients ayant des antécédents de sevrage alcoolique sévère ou de crises de sevrage devraient être admis pour prise en charge médicale dans un hôpital ou dans une unité de désintoxication médicale (ou, dans des situations urgentes, à l’urgence). Les personnes présentant des comorbidités médicales ou psychiatriques importantes, qui manquent de soutien social ou les femmes enceintes devraient également être admises dans ces établissements pour une prise en charge du sevrage17.
Les patients qui ne présentent pas ces facteurs de risque pourraient subir un traitement facultatif de sevrage dans un cabinet de médecin18. Les patients doivent être motivés, fiables et s’engager à être abstinents après le traitement. Ils doivent aussi suivre un plan de traitement. Le sevrage en cabinet est conforme à la philosophie de la pratique des soins primaires. Les médecins qui n’ont pas d’expérience de désintoxication en cabinet peuvent consulter un spécialiste des dépendances afin d’obtenir de l’aide pour la prise en charge. Une description détaillée de la prise en charge en cabinet des sevrages alcooliques est disponible dans CFPlus*.
Les patients qui sont capables de passer au moins 3 ou 4 jours sans consommer d’alcool et qui n’ont que des symptômes de sevrage légers n’ont habituellement pas besoin de prise en charge médicale pour le sevrage. Par ailleurs, puisque le sevrage peut être imprévisible, envisagez de demander aux patients de communiquer avec vous soit en personne ou par téléphone le jour suivant leur date de cessation. De plus, il est important de conseiller à tous les patients de se rendre à l’urgence s’ils développent des symptômes plus sérieux. Pour les patients fiables, il est raisonnable de donner quelques doses de diazépam à prendre à la maison sous la supervision d’un partenaire ou du personnel d’un centre de désintoxication non médical.
Usage concomitant d’autres substances et problèmes de santé mentale : Les patients souffrant de TUA s’adonnent souvent à l’abus d’autres substances. Il est important de questionner le patient à propos de chaque substance qu’il consomme et de déterminer si le patient fait l’objet d’une consommation à risque ou de troubles liés à d’autres substances. Les personnes aux prises avec un TUA présentent aussi des taux élevés de troubles de l’humeur et d’anxiété17. Il faut donc déterminer si les symptômes relatifs à l’humeur et l’anxiété résultent d’un trouble de l’humeur sous-jacent ou des TUA. Lorsqu’il s’agit d’un trouble sous-jacent, les symptômes d’anxiété et de dépression sont souvent apparus avant les TUA et restent importants même durant les périodes d’abstinence. Il y a aussi une étroite association entre les TUA et les autres problèmes de santé mentale incluant la schizophrénie, les troubles de la personnalité, les troubles bipolaires, le syndrome de stress post-traumatique et les dépendances19. Les médecins en soins primaires peuvent avoir besoin d’aide pour poser ce type de diagnostic.
Traumatisme : Les médecins en soins primaires devraient comprendre et reconnaître l’important lien de causalité entre les traumatismes interpersonnels de l’enfance (p. ex. les mauvais traitements, la négligence et le dysfonctionnement familial) et l’usage de substances7. Les patients souffrant de TUA présentent aussi des taux élevés de traumatismes interpersonnels. On doit s’assurer que l’environnement des patients atteints de TUA est émotionnellement et physiquement sécuritaire20. Les médecins doivent faire preuve de transparence, être dignes de confiance et établir des limites claires. Ils devraient dépister tous les patients aux prises avec un TUA lié à un traumatisme au moyen d’une approche sensible, graduelle et progressive (Encadré 3), puis offrir de référer ces patients aux services spécialisés dans ce domaine. Ils doivent expliquer clairement à leurs patients qu’ils ont le choix et le contrôle sur la divulgation de leurs renseignements personnels et sur leur traitement en général. Il n’est pas recommandé de questionner les patients à propos des détails du traumatisme puisque les études ont démontré que c’était inutile20.
Exemples d’énoncés reconnaissant les traumatismes durant l’enfance comme un facteur de risque important de troubles liés à l’usage de substances
Les énoncés suivants pourraient être utiles pour reconnaître l’importance des traumatismes durant l’enfance comme facteur de risque :
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Services de protection de l’enfance : Les médecins devraient demander aux patients s’ils prennent soins d’enfants. On doit communiquer avec les services de protection de l’enfance pour signaler les cas (ou demander conseil) si on soupçonne des mauvais traitements ou de la négligence envers un enfant (p. ex. le patient était intoxiqué alors qu’il s’occupait d’un enfant).
L’alcool et la conduite : Il est important de questionner tous les patients souffrant de TUA et de consommation d’alcool à risque à propos de la conduite avec les facultés affaiblies. Les médecins devraient savoir que l’usage d’alcool à long terme peut avoir des effets cognitifs et affaiblir les capacités de conduite. Ils se doivent de rapporter les cas de patients dont la capacité de conduire un véhicule peut être affaiblie par l’alcool (Encadré 4). Le médecin devrait expliquer à son patient l’obligation légale de déclarer son cas en mettant l’accent sur le fait que ces exigences s’appliquent à tous les type de problèmes médicaux et non à l’abus d’alcool seulement. De plus, il doit informer le patient des exigences de rétablissement du permis de conduire. Celles-ci peuvent varier selon les provinces. La plupart d’entre elles nécessitent que la personne suive un programme de traitement et qu’elle fournisse des preuves d’abstinence ou de réduction de la consommation d’alcool sur une période allant de 6 mois à un an. Ces preuves doivent être corroborées par une auto-évaluation et la mesure des taux de transaminases hépatiques.
Critères suggérés pour signaler un cas au ministère des Transports
Les critères suivants pourraient être utiles pour décider s’il faut signaler un cas au ministère des Transports :
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Examen physique et tests de laboratoire : Les médecins de soins primaires devraient effectuer un examen physique ciblé pour détecter des signes de dysfonction hépatique. Il faut demander une formule sanguine complète et une mesure des taux de transaminases hépatiques (aspartate aminotransférase, alanine aminotransférase et γ-glutamyl-transpeptidase) pour tous les patients ayant des TUA. Si les taux de transaminases hépatiques du patient ou le volume corpusculaire moyen sont élevés, les médecins devraient répéter les tests tous les 2 à 3 mois pour surveiller la réponse au traitement. Ils doivent aussi communiquer les résultats à leurs patients. La rétroaction concernant le taux des γ-glutamyl-transpeptidases et le volume corpusculaire moyen peut aider à motiver les patients qui ont réduit leur consommation d’alcool en leur donnant la confirmation objective que leur foie est en guérison. Les médecins devraient demander des examens plus approfondis pour les patients qui présentent des preuves de dysfonction hépatique ou des changements dans les taux de transaminases hépatiques qui ne peuvent être expliqués par l’usage de l’alcool.
Description du cas : visite de suivi pour une évaluation complète
Lors de la visite de suivi de H.M., vous la questionnez à propos des conséquences de sa consommation d’alcool. Elle a eu plusieurs épisodes d’amnésie durant la dernière année lorsqu’elle a trop bu; à une occasion elle est tombée et s’est blessée au poignet. Elle ne commence jamais à boire avant la soirée et nie avoir déjà conduit sous l’effet de l’alcool. Elle est mariée, mais n’a pas d’enfants. Elle a souvent des querelles avec son conjoint après avoir bu. Elle dit ne pas avoir eu de symptômes de sevrage et a passé plusieurs jours sans boire. Par ailleurs, elle a remarqué qu’elle dort peu et qu’elle est plus anxieuse lorsqu’elle ne boit pas.
Vous lui dites que vous vous inquiétez de sa consommation d’alcool et des effets à court et à long termes sur sa santé. Vous discutez avec elle des liens entre l’abus d’alcool, l’anxiété et le manque de sommeil. Elle vous avoue s’inquiéter aussi. Elle a tenté de réduire sa consommation à plusieurs reprises, mais en vain. Elle n’a pas été en mesure de changer ses habitudes depuis le dernier rendez-vous.
Vous complétez le reste de l’évaluation dont l’examen physique ciblé. Elle ne présente pas de signe de dysfonction hépatique. Vous lui remettez une requête pour analyse sanguine qui comporte la mesure du taux de transaminases hépatiques et une formule sanguine complète. Vous lui mentionnez encore que la réduction ou la cessation de la consommation d’alcool peut être difficile et que vous êtes là, en tant que médecin, pour l’aider.
Vous lui demandez de prendre rendez-vous dans une semaine pour une séance de 30 minutes afin d’examiner les résultats et de discuter de sa consommation d’alcool. Vous catégorisez votre diagnostic de TUA modéré à sévère.
Conclusion
Les soins primaires sont un milieu important pour le dépistage, la détermination et l’évaluation de la consommation d’alcool à risque et des TUA. Les médecins de famille devraient dépister chez tous les patients au moins une fois par année un usage d’alcool néfaste pour la santé à l’aide d’un test validé. Ils devraient également dépister les patients qui présentent des problèmes médicaux ou psychiatriques communément associés à l’alcool. Pour les patients qui obtiennent des résultats positifs au dépistage, il y a lieu de déterminer s’ils sont des consommateurs à risque ou s’ils souffrent d’un TUA. Les médecins devraient évaluer les problèmes mentaux concomitants, les traumatismes, les troubles liés à l’usage d’autres substances et les stress socioéconomiques ayant un lien avec les TUA. Il est aussi important de déterminer si les patients qui souffrent de TUA sévères nécessitent une prise en charge médicale du sevrage. Les médecins doivent signaler certains cas aux services de protection de l’enfance et au ministère des Transports. Un article complémentaire (page e266) explore la prise en charge de la consommation d’alcool à risque et des TUA dans le milieu des soins primaires21.
Notes
POINTS DE REPÈRE DU RÉDACTEUR
L’alcool est une cause importante de morbidité et de mortalité au Canada. Les patients dont la consommation d’alcool est à risque ou qui souffrent de troubles liés à l’usage d’alcool (TUA) sont fréquemment en contact avec le système de soins de santé primaires, ce qui favorise le dépistage, la détermination et l’évaluation du problème.
Plusieurs outils de dépistage simplifiés et pratiques se sont révélés valides et utiles en milieu de soins primaires. Les facteurs qui influencent les résultats pour les patients dont la consommation d’alcool est à risque ou qui ont des TUA devraient être examinés.
Un article complémentaire dans ce numéro explore la prise en charge de la consommation d’alcool à risque et des TUA dans le milieu des soins primaires.
Footnotes
Cet article donne droit à des crédits Mainpro-M1. Pour obtenir des crédits, allez à www.cfp.ca et cliquez sur le lien vers Mainpro.
Cet article fait l’objet d’une révision par des pairs.
The English version of this article is available at www.cfp.ca on the table of contents for the June 2015 issue on page 509.
↵* Une description détaillée de la prise en charge en cabinet du sevrage alcoolique se trouve en anglais à www.cfp.ca. Allez au texte intégral de l’article et cliquez sur CFPlus dans le menu du coin supérieur droit de la page.
Collaborateurs
Les 2 auteurs ont contribué à la recherche documentaire et à l’interprétation des données et à la préparation du manuscrit aux fins de présentation.
Intérêts concurrents
Le Dr Kahan a reçu des honoraires de Reckitt-Benckiser pour la présentation de séances de formation médicale continue sur la Suboxone (buprénorphine-naloxone).
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