Le tai-chi est un art martial méditatif pratiqué depuis des siècles en Chine et qui gagne en popularité en Occident1. Il consiste en une série de mouvements ralentis qui renforcent et relaxent le corps et l’esprit2. Il existe différentes écoles de tai-chi, mais elles ont toutes en commun des caractéristiques fondamentales, telles que la pleine conscience, l’alignement structurel et la souplesse (Tableau 1)3. De nouvelles formes de tai-chi continuent de voir le jour, y compris des protocoles raccourcis à l’intention des personnes âgées. Certaines formes, comme le tai-chi taoïste, s’attachent au rétablissement de la santé4.
Caractéristiques fondamentales du tai-chi
Étant donné sa popularité grandissante, les patients pourraient vouloir savoir si le tai-chi serait bénéfique pour eux. Cette révision entend résumer les données probantes sur les bienfaits thérapeutiques du tai-chi pour que les cliniciens puissent faire des recommandations éclairées à leurs patients.
Description de cas
B.G., une femme de 48 ans, se présente à votre bureau pour un suivi de son hypertension limite et de sa glycémie légèrement élevée. Elle a travaillé pendant toute sa vie adulte et récemment, le dernier de ses 3 enfants a quitté le foyer familial. Lorsque vous lui demandez comment elle va, elle répond qu’elle va bien, mais qu’elle se sent épuisée. Elle s’est négligée; elle ne fait pas d’exercice régulier, elle a pris du poids et se sent déprimée par le vide à la maison. Elle vous pose des questions sur le tai-chi en précisant que sa mère ne jure que par ça. Sa mère affirme qu’elle dort mieux, que son arthrose est moins douloureuse et qu’elle est maintenant plus socialement active que jamais. À l’examen, la tension artérielle de B.G. est de 140/85 mm Hg, son indice de masse corporelle est de 29 kg/m2 et ses tests de dépistage révèlent un score positif de dépression. Que devriez-vous faire? Quelles sont vos recommandations sur le tai-chi?
Sources d’information
Nous avons examiné la « revue systématique de revues systématiques » de 2014 intitulée Evidence Map of Tai Chi, effectuée par l’Evidence-based Synthesis Program Centre pour le Department of Veterans Affairs des États-Unis1. Nous avons ensuite effectué une revue sur MEDLINE des revues systématiques et essais randomisés contrôlés publiés entre 2014 et octobre 2015. Nous avons évalué les données probantes portant sur différentes affections, de même que les données étayant un bienfait sur la santé en général et la forme physique, puis les avons classées dans 1 des 5 catégories suivantes : les données étayant un bienfait étaient excellentes lorsque de nombreuses revues systématiques notaient des données cohérentes étayant un bienfait, bonnes lorsque plusieurs revues systématiques montraient généralement un bienfait, acceptables lorsque quelques revues systématiques montraient un bienfait dans l’ensemble, mais auraient pu inclure des résultats mixtes, et préliminaires lorsque seuls quelques essais ou 1 ou 2 revues systématiques existaient; les données n’étayant aucun bienfait direct s’appuyaient sur des revues systématiques qui ne montraient aucun bienfait direct sur l’affection à l’étude (même lorsqu’un bienfait sur la santé en général était documenté).
Message principal
La recherche sur le tai-chi a explosé au cours des 45 dernières années. Une analyse bibliométrique d’études cliniques publiées entre 1958 et 2013 a donné lieu à plus de 500 études menées sur le tai-chi, principalement financées par des fonds publics, dans 21 pays5. Le nombre d’articles publiés sur le tai-chi dans les revues scientifiques sur PubMed a augmenté exponentiellement (Figure 1). En 2015, on comptait en moyenne 15 publications par mois.
Citations de l'article sur le tai-chi par année : janvier 1974 à octobre 2015
Les données probantes portant sur la santé en général et sur la forme physique, de même que sur 25 affections différentes, ont été examinées puis organisées selon la qualité des données probantes : excellente, bonne, acceptable, préliminaire et données probantes n’étayant aucun bienfait direct.
Excellentes données étayant un bienfait.
De nombreuses revues systématiques ont donné lieu à des données probantes cohérentes étayant le bienfait du tai-chi pour 5 affections : prévention des chutes chez les personnes âgées vivant dans la communauté, arthrose, maladie de Parkinson, maladie pulmonaire obstructive chronique (MPOC) et fonctionnement cognitif.
Prévention des chutes dans la communauté : On a compté 14 revues systématiques résumant les essais sur la prévention des chutes chez les personnes âgées vivant dans la communauté6–19. Certaines se sont penchées sur de multiples interventions, dont le tai-chi6–14, et d’autres, exclusivement sur le tai-chi15–19. Invariablement, les revues ont constaté une baisse du risque de chutes dans les groupes répartis au tai-chi, baisse qui était habituellement associée à un meilleur équilibre statique et dynamique. Une revue a conclu que le tai-chi était l’intervention de prévention des chutes la plus économique12. En outre, 4 revues systématiques ont révélé que le tai-chi réduisait la peur de tomber15,19–21. Le tai-chi ne s’est pas avéré aussi bénéfique auprès des personnes nécessitant des services de soutien, comme les adultes déficients visuels vivant en établissement de soins22. Cela corrobore les résultats d’une revue Cochrane ayant conclu que la plupart des interventions, y compris tous les programmes d’exercice, étaient inefficaces pour prévenir les chutes chez les personnes âgées frêles et institutionnalisées23, et d’un récent essai clinique n’ayant montré aucun bienfait chez les adultes précliniquement handicapés24.
Arthrose : On a compté 10 revues systématiques portant sur l’arthrose; toutes ont conclu que l’exercice, y compris le tai-chi, était lié à un soulagement, en particulier de l’arthrose du genou25–34. Une méta-analyse incluant des essais portant sur le tai-chi dans l’arthrose a donné lieu à un soulagement statistiquement significatif de la douleur (p = 0,0005) et de la raideur (p = 0,04), et à une amélioration de la fonction physique (p < 0,00001)29. Des essais récents ont corroboré ces conclusions35,36 et un autre essai est en cours37. Le tai-chi est maintenant une recommandation conditionnelle de l’American College of Rheumatology pour l’arthrose de la main, de la hanche et du genou38.
Maladie de Parkinson : On a compté 8 revues systématiques portant sur le tai-chi dans la maladie de Parkinson39–46. La constatation principale était que les personnes atteintes de la maladie de Parkinson qui prenaient des médicaments et faisaient du tai-chi avaient une meilleure mobilité et un meilleur équilibre que les personnes qui ne prenaient que des médicaments. Depuis la publication d’une étude dans le New England Journal of Medicine47, les essais cliniques se sont multipliés48–52, y compris une étude montrant que le tai-chi était rentable52. Un essai randomisé contrôlé est en cours53.
Maladie pulmonaire obstructive chronique : On a compté 6 revues systématiques portant sur le tai-chi dans l’asthme et la MPOC qui ont relevé une amélioration du test de marche de 6 minutes et du volume expiratoire maximal en une seconde, ainsi qu’une diminution de la dyspnée54–59. D’autres essais définitifs sont présentement en cours60,61.
Fonctionnement cognitif : Cinq revues systématiques ont observé que le tai-chi améliorait le rendement cognitif62–66. Une méta-analyse a comparé des témoins à un groupe pratiquant le tai-chi et a observé une amélioration de l’attention (p < 0,001) et de la vitesse de traitement (p < 0,001) chez les patients du groupe tai-chi64. L’ampleur de l’effet était modérée même en comparaison avec les témoins actifs65. Ces observations ont été confirmées dans de récents essais randomisés67,68.
Bonnes données étayant un bienfait.
Plusieurs revues systématiques ont généralement montré un bienfait pour 4 affections : dépression, réadaptation cardiaque, réadaptation après un AVC et démence.
Dépression : On a compté 8 revues systématiques portant sur le tai-chi et la dépression69–76. Bien que de nombreux essais aient porté sur un petit échantillon et que la plupart aient été brefs, les résultats étaient uniformément positifs. Plus récemment, un essai de plus longue durée, soit de 24 semaines, comptant plus de 200 participants obèses et dépressifs a montré une baisse de la sévérité de la dépression chez les patients du groupe tai-chi (p < 0,001)77.
Réadaptation cardiaque et après un AVC : On a compté 6 revues systématiques portant sur le tai-chi et la réadaptation cardiaque78–83. Bien que les premiers essais fussent de petite envergure, le bienfait était omniprésent. Le tai-chi serait particulièrement utile chez les femmes atteintes de coronaropathie84,85 et les personnes âgées86. Des essais récents ont constaté une hausse de l’indice fonctionnel après un infarctus du myocarde87, et le tai-chi était une solution de rechange efficace chez les patients incapables de se soumettre à la réadaptation formelle88.
On a compté 5 revues systématiques portant sur le tai-chi dans la réadaptation après un AVC89–93; toutes ont produit des résultats positifs, quoique les échantillons fussent de petite taille. Les études menées depuis la dernière revue systématique ont donné lieu à un bienfait cohérent94,95 et d’autres essais sont prévus96,97.
Déficit cognitif et démence : On a compté 2 revues systématiques portant sur le tai-chi dans le traitement du déficit cognitif et de la démence, qui ont montré une amélioration du score à l’échelle MMSE (Mini-Mental State Examination)65,98. La revue Cochrane sur les programmes d’exercice à l’intention des personnes atteintes de démence a conclu que le tai-chi était supérieur à l’activité physique pour améliorer la fonction exécutive98. Cela corrobore les données sur l’amélioration de la capacité cognitive chez les personnes âgées62–66. Cependant, l’atteinte de ce bienfait demande du temps; une étude récente à court terme portant sur le tai-chi chez les personnes atteintes d’un déficit cognitif n’a pas observé d’amélioration99.
Données acceptables étayant un bienfait.
Quelques revues systématiques ont étayé l’efficacité générale du tai-chi dans 4 affections : qualité de vie des patients cancéreux, fibromyalgie, hypertension et ostéoporose, mais certaines revues incluaient des essais qui n’ont pas fait ressortir de bienfait.
Qualité de vie des patients cancéreux : On a compté 7 revues systématiques portant sur la qualité de vie des patients cancéreux, la plupart ayant été menées auprès de patientes atteintes de cancer du sein100–106. Bien que les résultats aient été contradictoires, en partie en raison des différents paramètres d’évaluation, dans l’ensemble, l’effet regroupé était positif en matière de vitalité et de santé mentale, ce qui est comparable aux résultats obtenus avec l’exercice régulier. Un essai récent a montré une meilleure qualité de vie liée à la santé et l’amélio-ration des biomarqueurs chez les survivantes du cancer du sein qui pratiquaient le tai-chi107.
Fibromyalgie : On a compté 4 revues systématiques portant sur la fibromyalgie108–111. Les paramètres d’évaluation et les durées variaient; certains essais n’ont pas montré de bienfait. Une étude publiée par le New England Journal of Medicine a fait ressortir un effet positif, mais l’échantillon était petit112. Dans l’ensemble, les revues indiquaient que les personnes atteintes de fibromyalgie qui pratiquaient le tai-chi rapportaient moins de douleur et une amélioration du fonctionnement. Ces bienfaits étaient confirmés dans de récents essais cliniques113,114. La durée de l’essai pourrait expliquer en partie la variabilité initiale. Un essai de 6 mois a montré que le soulagement de la douleur chronique était apparu seulement après 4 à 6 mois113. Un essai de comparaison directe de 1 an portant sur l’exercice aérobique et le tai-chi dans la fibromyalgie est en cours115. Dans l’intervalle, certains pays d’Europe ont commencé à inclure le tai-chi dans leurs lignes directrices pour le traitement de la fibromyalgie116.
Hypertension : On a compté 4 revues systématiques portant sur l’hypertension ayant conclu que les tensions artérielles systolique et diastolique étaient abaissées par le tai-chi; cependant, ces constatations s’appuient sur des essais dont la méthodologie présentait des failles, et dont les échantillons étaient généralement petits117–120. Un essai d’envergure récemment publié dans l’American Journal of Cardiology a conclu que le tai-chi abaissait la tension artérielle et l’indice de masse corporelle chez les personnes âgées121.
Ostéoporose : On a compté 3 revues systématiques portant sur l’ostéoporose122–124. Une revue a rapporté un ralentissement du déclin de la densité minérale osseuse (DMO) chez les femmes ménopausées comparativement à des témoins sédentaires dans la plupart des essais inclus, mais les données probantes étaient limitées122. Une autre revue a rapporté des résultats contradictoires123. La troisième revue n’a pas rapporté le taux de DMO, mais a constaté que le tai-chi améliorait l’équilibre et pouvait donc prévenir les chutes124. Un essai récent a conclu que l’association tai-chi et entraînement contre résistance donnait les meilleurs résultats125. De nouveau, la durée de l’intervention est importante. Un essai de 9 mois a révélé que les patients du groupe tai-chi qui participaient à au moins 75 % des séances montraient une hausse statistiquement significative de la DMO à la tête du fémur comparativement aux patients du groupe sous les soins habituels126.
Données préliminaires étayant un bienfait.
Une revue systématique portant sur la prévention primaire des AVC comptait 36 études et au total plus de 2300 participants. Cette revue a révélé une baisse significative des AVC non mortels dans le groupe qui pratiquait le tai-chi (p = 0,03)127. Une revue Cochrane sur le tai-chi en prévention primaire des maladies cardiaques a noté que les résultats n’étaient pas concluants, et précisait que des essais de plus longue durée étaient nécessaires128. Deux revues systématiques ont montré que le tai-chi serait utile contre l’anxiété69,129. Une revue systématique130 et 3 essais récents131–133 laissent croire que le tai-chi aurait un effet bénéfique sur la lombalgie. Une revue systématique a montré que le tai-chi aidait les patientes atteintes de cancer du sein après la chirurgie, car il a uniformément amélioré la mobilité du bras touché134. Trois essais sur le tai-chi et la sclérose en plaques ont produit des résultats prometteurs, surtout pour améliorer l’équilibre135–137, et un autre essai a montré une amélioration de la qualité de vie138. Des essais préliminaires ont montré un bienfait contre la schizophrénie139,140 et l’état de stress post-traumatique141,142. Deux essais ont produit des résultats prometteurs dans les cas de trouble déficitaire de l’attention143,144 et une revue systématique est prévue145. Des études uniques ont montré que le tai-chi était utile chez les personnes ayant subi une lésion de la moelle épinière146, une blessure traumatique du cerveau147 et chez les patients atteints de cancer du rhinopharynx ayant subi une chirurgie afin d’accroître la mobilité du cou148.
Données n’étayant aucun bienfait direct.
Des données laissaient croire que le tai-chi n’avait aucun bienfait direct sur 3 affections : le diabète de type 2, la polyarthrite rhumatoïde et l’insuffisance cardiaque chronique.
On a compté 4 revues systématiques portant sur le tai-chi et le diabète149–152 lesquelles n’ont montré aucun effet sur le taux d’hémoglobine A1c. Un essai récent n’a donné lieu à aucune variation de la glycémie à jeun121, mais un autre a conclu que le tai-chi améliorait la qualité de vie153. Trois revues systématiques portant sur le tai-chi dans la polyarthrite rhumatoïde n’ont montré aucun soulagement de la sensibilité articulaire, de la douleur ou de l’enflure, mais ont constaté une amélioration de l’ampleur du mouvement154–156, et une récente étude a montré une amélioration de la qualité de vie157. Deux revues systématiques ayant porté sur le tai-chi et l’insuffisance cardiaque n’ont montré aucun changement dans la concentration de la fraction terminale du peptide natriurétique de type B(NT-proBNP)158,159, mais ont donné lieu à une amélioration de la performance159, et une autre a montré une amélioration de la qualité de vie160.
Le tai-chi pour la santé en général et la forme physique.
Le tai-chi procure un certain nombre de bienfaits sur la santé en général et la forme physique. Il existe d’excellentes données selon lesquelles le tai-chi améliore l’équilibre de façon constante, ce qui a été démontré dans 10 revues systématiques161–170 et 3 essais récents171–173. D’excellentes données tirées de 5 revues systématiques159,174–177 et de 2 essais récents172,178 laissent croire que le tai-chi améliore la capacité aérobique, particulièrement chez les personnes sédentaires. Il existe de bonnes données selon lesquelles le tai-chi améliore la force, surtout dans les membres inférieurs chez les adultes en mauvaise forme physique159,178–182, et des données préliminaires indiquent que le tai-chi améliorerait la souplesse163,173,178,182.
Sur le plan de la santé en général, il existe des données acceptables selon lesquelles le tai-chi améliore le bienêtre général69,183–185 et le sommeil186,187. L’amélioration du sommeil semble être liée à une baisse des marqueurs de l’inflammation, tels que la protéine C-réactive et les cytokines pro-inflammatoires188–191. Il existe 1 revue systématique qui laisse croire que le tai-chi renforcerait la capacité immunitaire192 et des données très préliminaires selon lesquelles il améliorerait la fonction rénale121,193 et la qualité de vie chez les patients sous hémodialyse194.
Le Tableau 2 résume les bienfaits du tai-chi en fonction du niveau de données probantes pour des affections précises et la santé en général et la forme physique6–19,25–59,62–95,98,100–114,117–127,129–144,146,147,149–194.
Recherche sur le tai-chi : Résumé des données tirées de 120 revues systématiques et récents essais cliniques; il existe très peu de données pour les affections en italique.
Excellent profil d’innocuité.
On a compté 1 revue systématique portant sur 153 essais ayant évalué l’innocuité du tai-chi195; seuls 50 avaient inclus un rapport des manifestations indésirables. Les manifestations indésirables les plus courantes étaient mineures et en prédominance de nature musculosquelettique, comme une douleur légère au genou et au dos (présumément en raison d’un mauvais alignement); aucune manifestation indésirable grave liée à l’intervention n’a été rapportée.
DISCUSSION
Il existe plus de 500 études et 120 revues systématiques ayant évalué les bienfaits du tai-chi sur 25 affections différentes, de même que sur la santé et la forme physique. Les résultats ont produit des données étayant un bienfait qui varient d’excellentes à bonnes, à acceptables et à préliminaires, et des données n’étayant aucun bienfait direct. Les données les plus robustes étayent un bienfait pour la prévention des chutes chez les personnes âgées vivant dans la communauté, l’arthrose, la maladie de Parkinson, la réadaptation pour la maladie pulmonaire obstructive chronique et l’amélioration de la capacité cognitive chez les personnes âgées. Les nombreuses revues systématiques et méta-analyses et de plus en plus d’essais randomisés contrôlés de bonne qualité inclus dans ce corpus de recherche sont ce qui en fait la force. Le fait que nous soyons restés conservateurs dans l’évaluation de la qualité des données donne sa puissance à notre recherche. Par exemple, bien qu’il existe plus de 36 études sur le tai-chi en prévention primaire des AVC, et qu’une méta-analyse ait fait ressortir un effet statistiquement significatif sur les AVC non mortels, nous avons quand même catégorisé ces résultats comme des données préliminaires étayant un bienfait, puisque beaucoup des essais étaient petits et que l’ampleur de l’effet était minime. Le tai-chi semble être excellent pour l’équilibre et le rétablissement de la capacité aérobique chez les personnes en mauvaise forme physique et pour prévenir ou améliorer de nombreux malaises qui apparaissent avec l’âge.
Ces données probantes s’accompagnent de limites, tant du point de vue de la recherche que de celui du tai-chi. Du point de vue de la recherche, nombreux étaient les essais qui étaient de petite envergure et dont la méthodologie présentait des failles. Une faille fondamen-tale était l’absence d’insu des participants, mais cela a été neutralisé en imposant l’insu aux personnes qui ont analysé les résultats. Puisque le tai-chi est doté de nombreuses caractéristiques (Tableau 1)3, il est difficile de déterminer quel aspect du tai-chi a le plus grand effet2,196. Aussi, on n’a pas pu déterminer le mode d’action du tai-chi. Par exemple, une recherche récente s’est penchée sur les raisons pour lesquelles le tai-chi est si bénéfique pour l’équilibre197–200 et sur la façon dont il contribue à l’amélioration de la fonction cognitive201–203. Le tai-chi compte différents styles, enseignants, durées et fréquences. On ignore si un style serait meilleur pour une affection, mais pas pour les autres, si les séances plus longues sont plus bénéfiques que les séances plus brèves, ou si 2 séances ou plus par semaine sont optimales. Une dernière faille de la recherche sur le tai-chi est qu’une durée de 6 à 12 semaines pour les essais serait insuffisante pour évaluer les bienfaits, surtout dans le cas des affections chroniques. Heureusement, plusieurs études à long terme sont présentement en cours.
Du point de vue du tai-chi, la recherche sur cette forme d’art n’a peut-être pas encore révélé tous ses bienfaits. Notre expérience nous dit que les personnes qui pratiquent le tai-chi décrivent des bienfaits n’ayant pas encore fait l’objet d’études, comme une meilleure digestion, des mains et des pieds moins froids et une sensation générale de jeunesse. Bien qu’il soit utile de savoir que les bienfaits s’observent après à peine quelques semaines, les personnes qui pratiquent le tai-chi depuis plusieurs années notent que les bienfaits s’accumulent toujours, même après des dizaines d’années de pratique.
Beaucoup plus de recherches sont en cours, y compris des essais cliniques de plus longue durée et plus rigoureux, et des évaluations des bienfaits sur d’autres affections. On s’intéresse beaucoup au mode d’action du tai-chi au niveau biochimique. Les données probantes précoces laissent croire que le tai-chi altère les cytokines associées à la perception de la douleur204, active les lymphocytes T205 et affecte la fonction des cellules mononucléées chez les patients cancéreux206. Il serait intéressant d’évaluer l’effet du tai-chi sur la longueur des télomères, un indicateur de résilience et de longévité globale207.
Résolution du cas
Vous sympathisez avec la situation de B.G. et la rassurez en lui disant qu’il existe des moyens d’améliorer sa santé et son bien-être. Vous lui dites que maintenant que les enfants sont partis, le moment est idéal pour essayer quelque chose de nouveau. Vous êtes d’accord pour dire que le tai-chi est un bon choix; c’est une activité aérobique tout en douceur qui améliore aussi l’équilibre et la force. Vous ajoutez qu’il existe de bonnes données probantes selon lesquelles le tai-chi pourrait atténuer sa dépression, et des données probantes acceptables selon lesquelles il pourrait améliorer la tension artérielle. Vous discutez d’autres recommandations pour la dépression, l’hypertension et la glycémie, et lui demandez de revenir vous voir pour un suivi.
Conclusion
Les médecins peuvent maintenant donner des recommandations factuelles sur le tai-chi à leurs patients, en sachant qu’il s’agit d’un domaine de recherche actif. Comme c’est le cas pour les programmes d’exercice, le suivi médical continu est indiqué pour toute affection clinique.
Notes
POINTS DE REPÈRE DU RÉDACTEUR
Le tai-chi est un art martial méditatif qui consiste en une série de mouvements ralentis visant à renforcer et à relaxer le corps et l’esprit. De plus en plus, les effets thérapeutiques du tai-chi sont passés à la loupe. Cette révision résume les données probantes sur les bienfaits thérapeutiques et physiques du tai-chi afin que les cliniciens puissent fonder sur elles leurs recommandations à leurs patients.
Plus de 500 études et 120 revues systématiques ont été publiées. Les données les plus robustes étayant un bienfait sont liées à la prévention des chutes chez les personnes âgées vivant dans la communauté, à l’arthrose, à la maladie de Parkinson, à la réadaptation pour la maladie pulmonaire obstructive chronique, et à l’amélioration de la capacité cognitive, de l’équilibre et de la capacité aérobique.
Footnotes
Cet article donne droit à des crédits d’autoapprentissage certifiés Mainpro+. Pour obtenir des crédits, rendez-vous sur www.cfp.ca et cliquez sur le lien Mainpro+.
Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.
The English version of this article is available at www.cfp.ca on the table of contents for the November 2016 issue on page 881.
Contributions
Les 2 auteurs ont contribué à la revue et à l’interprétation de la littérature ainsi qu’à la préparation du manuscrit aux fins de soumission.
Intérêts concurrents
La Dre Huston pratique le tai-chi depuis 3 ans et apporte son aide dans une classe de tai-chi taoïste de rétablissement de la santé. Depuis 21 ans, le Dr McFarlane tire les enseignements du tai-chi taoïste et l’enseigne; il est aussi conseiller médical auprès de la Société de tai-chi taoïste du Canada.
- Copyright© the College of Family Physicians of Canada
Références
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