Scénario
Vous participez à une activité de développement professionnel continu dans votre région et vous écoutez une présentation sur la vaccination. « Où se situe le Canada selon vous par rapport à d’autres pays à revenu élevé sur le plan de la vaccination? Sommes-nous dans le quart supérieur, le milieu ou près des derniers rangs? » Quelqu’un répond « dans le premier quart » et vous auriez répondu la même chose. Le conférencier répond : « Malheureusement, selon une étude de l’UNICEF en 2013, le taux du Canada, soit 84 %, se classe au 28e rang sur 29 pays. La Finlande, par exemple, avait un taux de plus de 95 %1. » Vous êtes surpris et vous vous demandez pourquoi le Canada occupe un rang si bas.
Données probantes
Pour la plupart des professionnels de la santé, la justification de la vaccination va de soi : c’est l’une des 10 plus importantes interventions en santé publique. Par ailleurs, la population en général ne l’apprécie pas toujours à sa juste valeur. De nos jours, les parents de jeunes enfants n’ont pas vécu la rougeole, les oreillons ou la rubéole, ni certainement la diphtérie et la variole. C’est pourquoi l’effet protecteur des vaccins peut leur sembler théorique. Est-ce alors surprenant qu’ils hésitent à soumettre leur nourrisson heureux et en bonne santé à la douleur d’une aiguille? Ou qu’ils se sentent coupables lorsqu’ils voient leur enfant le bras rouge et enflé après un vaccin? Dans la plus récente Enquête sur la couverture vaccinale nationale des enfants au Canada, 70 % des parents ont indiqué qu’ils s’inquiétaient des effets secondaires des vaccins, 37 % croyaient que le vaccin pouvait causer la même maladie que celle qu’il devait prévenir et une petite proportion des répondants croyaient que l’homéopathie et la chiropratique pouvaient éliminer la nécessité de se faire vacciner2. Certains hésitaient devant la notion d’administrer 5 vaccins tous à la fois dans une même injection. De plus, beaucoup de désinformation circule. Par exemple, la plupart des parents avaient entendu dire que les vaccins pouvaient causer l’autisme et tous ne se rendaient pas compte que cette association frauduleuse a depuis longtemps été réfutée3.
Même s’il se peut que notre taux calculé de vaccination de 84 % soit une sous-estimation parce que nous ne tenons pas de registre national, le Canada doit tout de même améliorer son taux d’immunisation. Notre statut d’éradication de la rougeole n’est pas assuré à long terme et la coqueluche continue de circuler et de causer des flambées. Étant donné le spectre de la résistance aux antimicrobiens4, la prévention des infections avant qu’elles se produisent importe plus que jamais. Heureusement, il y a un corpus de recherche grandissant sur l’hésitation face aux vaccins, qui permet d’éclairer une approche constructive pour y répondre. Par exemple, il n’est pas judicieux de défendre trop énergiquement les vaccins, parce que la recherche démontre que cette stratégie augmente en réalité les doutes face aux vaccins5. Comme pratique exemplaire, il vaut mieux explorer systématiquement les points de vue de vos patients ou de leurs parents concernant les vaccins et adapter vos messages en conséquence6. S’ils acceptent l’immunisation, renforcez l’argument selon lequel les vaccins favorisent la résilience et discutez des effets secondaires courants pour maintenir leur confiance. S’ils hésitent face aux vaccins, établissez un rapport, acceptez les questions et les inquiétudes, et donnez des renseignements sur les risques et les avantages. Avec les personnes qui refusent systématiquement les vaccins, évitez les débats de part et d’autre; ne prolongez pas la discussion, mais laissez la porte ouverte. Sachez où trouver les ressources qui réfuteront la désinformation.
En définitive
Le Canada a la chance d’avoir un grand nombre de vaccins financés par le secteur public. Toutefois, il nous reste des progrès à faire avant de pouvoir être fiers de nos taux de vaccination nationale. La bonne nouvelle, c’est que les professionnels de la santé canadiens ont de plus en plus accès à un ensemble de données probantes et aux ressources nécessaires pour y arriver7.
Notes
RMTC RELEVÉ DES MALADIES TRANSMISSIBLES AU CANADA
Les faits saillants du RMTC font la synthèse des dernières données probantes sur les maladies transmissibles tirées de récents articles publiés dans le Relevé des maladies transmissibles au Canada, une revue révisée par des pairs publiée en ligne par l’Agence de la santé publique du Canada. Ces faits saillants ont été rédigés par la Dre Patricia Huston, médecin de famille spécialisée en santé publique et rédactrice en chef du Relevé des maladies transmissibles au Canada.
Footnotes
The English version of this article is available at www.cfp.ca on the table of contents for the January 2017 issue on page e18.
- Copyright© the College of Family Physicians of Canada