Faye Forbes est une ministre anglicane de 64 ans qui vit à Halifax, en Nouvelle-Écosse. Elle est ardente défenseure des droits des personnes atteintes de démence depuis qu’elle a elle-même reçu un diagnostic de maladie d’Alzheimer, en 2009. Cet article résume son expérience—l’expérience d’une personne réelle, plutôt que les détails d’un cas fictif ou composite. Il la résume en rapportant ses propres paroles et évite l’interprétation médicale des détails de son histoire.
À 56 ans, j’ai consulté mon médecin de famille en raison de fatigue, de perte d’intérêt et de pertes de mémoire. Puisque je traversais d’énormes changements dans ma vie, mon médecin de famille a pensé que j’étais en dépression légère et m’a prescrit des médicaments. Même si j’étais capable de poursuivre mon travail, les symptômes se sont aggravés. Les symptômes comprenaient aussi : concentration réduite, insomnie, apathie, difficultés de communication, anxiété et problèmes avec les tâches telles que le lavage, la cuisine et le paiement des factures. Malgré le traitement, j’ai dû prendre un congé professionnel prolongé.
Les médecins de famille jouent un rôle de premier plan dans le diagnostic et la prise en charge de la démence1. Et ce rôle prend de plus en plus d’importance à mesure que la prévalence de démence augmente. Le diagnostic précoce et exact de démence, la divulgation du pronostic, de même que la discussion sur la prise en charge sont cruciaux et ont des effets à long terme substantiels sur la vie du patient et de sa famille2. Le soutien et les interventions continus peuvent améliorer la qualité de vie et retarder le besoin d’emménager en soins de longue durée. L’aiguillage vers des ressources telles que la Société Alzheimer et les programmes de jour, ou vers les soins de relève, peut aussi améliorer les résultats et la qualité de vie3,4. Un article de la série Soins aux personnes âgées publié dans Le Médecin de famille canadien résume les stratégies et les ressources disponibles4.
Les soins optimaux aux personnes atteintes de démence se heurtent à de nombreux obstacles, dont les lacunes dans les connaissances et l’incertitude chez les médecins, le manque de temps ou l’absence de rémunération pour éduquer et conseiller, et la difficulté d’identifier les ressources dans la communauté5–7. Les patients et leur famille rapportent que le dépistage et le diagnostic des troubles cognitifs arrivent souvent tardivement, et que les retards pour accéder aux ressources et au soutien sont frustrants.
On s’intéresse de plus en plus au point de vue et à l’expérience des patients et de leur famille concernant le diagnostic et la prise en charge de la démence8,9. Nous espérons qu’après avoir lu notre article, les médecins de famille comprendront mieux « l’expérience vécue » racontée par une personne atteinte de démence, et qu’ils utiliseront cette information pour améliorer les soins et les résultats.
Sources d’information
Une recherche a été effectuée dans MEDLINE sur Ovid entre janvier 2005 et février 2015, à l’aide des mots-clés anglais suivants : dementia, caregiver, perspectives et quality of health care. Les articles qui s’adressaient aux médecins de famille et aux pratiques familiales ont été sélectionnés. Des revues pertinentes et des articles de recherche originaux ont été utilisés, le cas échéant, s’ils s’appliquaient aux personnes atteintes de démence et à leurs soignants.
Message principal
Dans de nombreux cadres de référence, on a tenté d’organiser les expériences importantes décrites par les patients et les soignants. Prorok et coll. ont examiné la littérature qualitative sur les expériences en santé des personnes atteintes de démence et de leurs soignants8. Sur les 46 études relevées, 7 portaient sur des patients, 25 sur des soignants et 14 sur les 2 groupes. Les examinateurs ont fait ressortir 5 thèmes, utilisés en sous-titres des sections ci-dessous, qui reflètent l’expérience de nombreux patients atteints de démence : tenter d’obtenir un diagnostic, accéder au soutien et aux services, besoins en matière d’information, prise en charge de la maladie, et communication et attitudes. D’autres revues ont fait état de thèmes comparables, mais se sont concentrées sur le changement de la fonction et de la qualité de vie chez une personne, et sur sa réaction à ce changement.
Tenter d’obtenir un diagnostic
Vu que mes symptômes ne répondaient pas aux antidépresseurs, j’ai été recommandée en psychiatrie. Le diagnostic époustouflant du psychiatre n’était pas la dépression, mais plutôt la démence! J’ai ensuite été recommandée à une clinique du sommeil (où les résultats ont montré que je n’étais pas atteinte d’apnée du sommeil), en neurologie (le neurologue a prescrit une tomodensitométrie) et en gériatrie (le gériatre a prescrit un examen d’imagerie par résonance magnétique). Le processus diagnostique a pris presque 2 ans.
Le processus diagnostique est long et frustrant8. Un diagnostic précoce semble être lié à une transition plus en douceur et retarderait le besoin de quitter son domicile10. Le diagnostic peut être un choc ou un soulagement pour le patient, et la divulgation est une part importante de la prise en charge. Au Tableau 1 figurent des recommandations quant au contenu à présenter lors de la divulgation d’un nouveau diagnostic de démence à un patient et à sa famille11. Les médecins doivent aussi tenir compte des différences culturelles et des préférences du patient en matière de partage d’information.
Le médecin de famille est aux premières lignes du traitement et du diagnostic. Le diagnostic précoce est un soulagement pour la personne atteinte de démence et sa famille. J’ai remarqué que personne ne mentionne le mot démence dans les stades précoces de l’investigation. C’est un mot stigmatisé. La personne atteinte de démence entrera en déni, en pensant que son cas est sans espoir, n’attendant qu’une fin indigne dans un foyer de soins infirmiers. Il est essentiel que le médecin de famille enraye cette stigmatisation, car la vie existe au-delà du diagnostic. La prise en charge active de la maladie prolonge la qualité de vie.
Pour beaucoup, il s’écoule plus de 3 ans entre les premiers symptômes et le diagnostic de démence. Le déni et les tergiversations ne font rien pour apaiser la crainte et l’inquiétude du patient. Un patient atteint de démence ne peut prendre à lui seul sa propre défense.
La présence d’un déficit cognitif mesurable sans effet notoire sur la fonction est désignée déficit cognitif léger. Quoiqu’il soit facilement défini, il est souvent difficile de déterminer si et quand le déficit cognitif léger progresse vers la démence, ce qui complique encore plus le diagnostic pour les patients et le médecin12.
Accéder au soutien et aux services.
Les patients et les soignants rapportent souvent que les professionnels de la santé ne connaissent pas les différentes options de soutien et les services offerts, ce qui retarde l’accès à ces services une fois le diagnostic posé8. Bien que les services spécialisés non dispensés par un médecin de famille soient vus d’un bon œil, le délai d’attente pour une évaluation en clinique de la mémoire et pour des services semblables est prolongé, ce qui est frustrant tant pour les patients que pour les médecins13. Une étude canadienne a révélé que les médecins de famille reconnaissent l’importance des services de soutien, mais ne connaissent pas les options offertes dans leur localité et croient que d’autres organismes coordonnent mieux les ressources13. Il est parfois nécessaire de se tourner vers d’autres professionnels, ou de collaborer avec eux pour organiser le soutien et les services (p. ex. travailleurs sociaux pour les questions financières, gestionnaires de cas pour les soins à domicile, infirmière spécialisée en psychogériatrie, ou psychiatre pour les problèmes comportementaux ou psychologiques).
Le médecin de famille devrait avoir une liste à jour de toutes les options de soutien et de tous les services offerts, de même que de leurs coûts. Je pense que c’est important parce que beaucoup de personnes atteintes de démence ont dû quitter leur emploi et leur revenu s’en trouve grandement réduit. Cette maladie impose à tous un fardeau financier, même les personnes âgées. Une fois qu’on arrête de conduire la voiture, par exemple, et qu’il n’y a pas de transport public où on vit, les coûts de déplacement sont exorbitants (en temps et en argent).
La Société Alzheimer est une bonne ressource pour les patients, les familles et les médecins de famille. La Société Alzheimer connaît l’offre dans chaque localité. Elle offre aussi des séances de soutien et d’éducation à l’intention des personnes atteintes de démence et de leur famille ou soignants (http://www.alzheimer.ca/fr/We-can-help/Resources/For-health-care-professionals).
Répondre aux besoins en matière d’information.
Le type et la quantité de renseignements communiqués aux personnes atteintes de démence constituent une question d’importance pour les patients et les médecins. Les patients et les soignants rapportent avoir dû « pousser » pour obtenir des renseignements adéquats et apprécient la communication claire, y compris l’information écrite. Les sujets d’importance courants sont les tests cognitifs, la médication, l’évolution de la maladie, les questions d’ordre financier et légal, et les comportements8. Les soignants rapportent que leur principale source d’information sont les médecins, mais notent que souvent, les médecins de famille parlent plus de médicaments que d’autres sujets, tels que l’évolution de la maladie et la planification à long terme14.
Plus les médecins en sauront sur la personne atteinte de démence et sa famille, mieux ils comprendront. Comment un esprit « normal » peut-il comprendre le brouillard et le mélange qui existe dans l’esprit des personnes atteintes de démence simplement en lisant à ce sujet? Bien que chaque personne atteinte de démence ait des similarités avec d’autres personnes comme elle, il y a aussi beaucoup de différences.
Les personnes aux stades précoces doivent s’informer sur la maladie. Les autorités régionales de santé et la Société Alzheimer, notamment, tiennent des séances d’information. Il existe des livres rédigés par des personnes atteintes de démence à l’intention des personnes atteintes de démence. Les médecins de famille et autres spécialistes peuvent aussi être une source d’éducation, mais il faut toujours se rappeler que les personnes atteintes de démence doivent recevoir l’information dans un vocabulaire de tous les jours et, parfois, plus le vocabulaire est simple, mieux c’est. Je trouve que mon groupe de soutien à la Société Alzheimer est riche en information. Au gré de nos conversations sur ce qui arrive dans nos vies, nous décrivons souvent la même chose et nous savons alors que ce n’est pas le fruit de notre imagination. L’Internet fournit aussi de l’éducation. Mais certains sites ne sont pas fiables et pourraient donner de faux renseignements et de faux espoirs.
Les médecins doivent s’informer des questions d’ordre légal comme la délégation de pouvoir, les testaments de vie et les volontés personnelles. Ils peuvent être la voix des patients lorsque ces derniers se sont tus.
Prise en charge de la maladie
Le gériatre m’a prescrit le donépézil. En quelques jours, les symptômes étaient réduits, mais ça a pris quelques semaines avant de ressentir toute l’ampleur de l’effet. Lorsque la posologie a été réglée, ma vie est devenue plus facile à gérer. Depuis mon diagnostic en 2009, j’ai bien répondu aux médicaments. La dose de donépézil a été augmentée et après 18 mois, j’étais au maximum et l’effet s’est aplani. On a fait l’essai de la galantamine, mais mes symptômes n’ont pas répondu. Ils ont par ailleurs bien répondu au timbre de rivastigmine. J’utilise pour le moment le timbre à 5 mg que je porte pendant 48 heures, tout en ajoutant un nouveau timbre à 24 heures. Cela est équivalent à une dose de 7,5 mg.
Les soignants et les patients notent qu’ils ressentent souvent le besoin d’amorcer eux-mêmes la discussion sur les enjeux de prise en charge, tels que la sécurité, la conduite automobile et les médicaments. Ils notent également que la connaissance du médecin de première ligne en matière de démence est un facteur de taille dans l’efficacité perçue de la prise en charge de la maladie8. Ce ne sont pas tous les patients atteints de la maladie d’Alzheimer qui répondent aussi bien aux médicaments que Faye l’a fait, mais la perception du patient et de sa famille est cruciale pour le médecin de famille qui tente d’évaluer comment les symptômes répondent au traitement. De petits gains fonctionnels, tels qu’une plus grande indépendance pour s’habiller, peuvent améliorer l’estime de soi du patient et alléger le fardeau pour les soignants. Quelques paroles pleines de sagesse de Faye sur la prise en charge de la maladie se trouvent dans l’Encadré 1.
Comment Faye gère sa maladie d’Alzheimer
Voici quelques conseils pour les patients sur la prise en charge de la maladie :
Prendre ses médicaments comme le médecin l’a prescrit. Ne pas tenter de s’automédicamenter. Les questions doivent être posées au pharmacien ou au médecin de famille. Il existe de nombreux gadgets qui aident à se rappeler de prendre ses médicaments (p. ex. plaquettes alvéolées, piluliers, alarmes)
S’alimenter sainement
Faire de l’exercice physique et mental
Bien dormir. Le cerveau s’active 2 fois plus qu’avant pour se maintenir hors du brouillard, et cela est physiquement fatiguant
Je fais des listes (je n’en ai jamais fait), j’utilise des alarmes (p. ex. lorsque j’utilise le poêle ou le fer à repasser), des notes auto-adhésives et des étiquettes, et un calendrier (j’y inscris tout)
Je me fie aux vieilles habitudes et à la routine, quoique ce soit plus difficile dernièrement
Communication et attitudes
Mon médecin de famille est mon médecin depuis plus de 30 ans, donc il me connaît bien. Sa patience d’écoute était exemplaire, surtout lorsque j’étais incapable de communiquer ma pensée comme je le pouvais auparavant. Non seulement il s’est fié à ce qu’il voyait, mais il a aussi parlé avec ma famille. Au début, je le voyais toutes les semaines, puis 2 fois par mois; maintenant je le vois chaque mois. Nous parlons de sujets variés et je sais qu’il se sert de ces conversations pour tester mon processus de pensée et ma mémoire. Il écoute toutes mes préoccupations et je ne me suis jamais sentie négligée ni poussée à partir. Je sais qu’il a pris le temps d’investiguer la démence et toutes les façons dont elle se manifeste, et aussi la façon dont elle invalide non seulement la personne atteinte, mais aussi toute la famille. Je ne dis pas qu’il est un expert de la maladie, mais je crois qu’il a pris le temps de s’informer. Je continue de fréquenter la clinique de gériatrie. Mes médicaments sont maintenant prescrits par mon médecin de famille, sous la recommandation des spécialistes en gériatrie. Mon médecin de famille pense qu’il est plus familier avec les médicaments et qu’il les connaît mieux maintenant.
La communication et les attitudes sont importantes pour les patients et les soignants durant tout le continuum de la maladie. La volonté du médecin de famille d’obtenir l’opinion du patient était perçue positivement. Il n’est pas surprenant que chez le médecin de famille, la sensibilité, le respect et les tentatives de préserver la dignité des patients aient été des aspects importants, et la mauvaise communication était un aspect qui faisait obstacle à la réussite du traitement.
L’attitude du médecin de famille (gentillesse, compréhension et, par-dessus tout, honnêteté) peut changer la perspective d’une personne quant à la démence. Les paroles prononcées et la façon dont elles sont interprétées portent sur la vie et la qualité de vie de cette personne. Si vous trouvez difficile de parler ouvertement avec votre médecin de famille, ou qu’il ou elle n’écoute pas ou n’a pas le temps, trouvez-en un autre! Un groupe de soutien peut aider.
Citations choisies de Faye
Les personnes atteintes de démence et leur famille doivent défendre leurs propres droits. Le temps où l’on pouvait se fier totalement à un médecin pour avoir de l’information, connaître les traitements disponibles, les options de rechange, etc. est révolu. Commencez par vous renseigner par vous-même et à poser des questions, surtout aux médecins de famille. Ce sont eux qui vous connaissent le mieux et peuvent vous aider à déterminer les meilleures options.
Les médicaments ont fonctionné dans mon cas. J’ai trouvé qu’une fois que les symptômes de démence étaient soulagés par les médicaments, j’ai pu recouvrer certains aspects de mon ancienne vie, quoique avec certaines modifications.
Je suis patiente avec moi-même. Certaines choses, comme lire et suivre des instructions détaillées, causent plus de frustration que de plaisir, je les ai donc abandonnées. Je continue à faire des mots croisés. Les réponses aux indices flottent dans ma tête. Au début, j’insistais pour essayer de m’en rappeler, mais je suis maintenant plus patiente avec moi-même et je laisse les autres signaux et indices raviver ma mémoire. Et même s’ils prennent plus de temps à le faire, ils font travailler mes méninges dans un semblant d’ordre.
La spiritualité est ce qui réconforte, ce qui calme les remous dans le cœur. La spiritualité, ça peut être n’importe quoi, comme profiter du plein air (la plage, le jardinage, la marche, l’ornithologie, s’asseoir sur une balançoire, la méditation, le yoga, etc.). La spiritualité vous met le cœur en chanson et vous fait danser durant les mauvaises journées en espérant en avoir de meilleures. Elle soulage l’anxiété et permet à l’esprit et au corps de se détendre. Se perdre dans son passe-temps favori, même pour un bref moment, ravive l’esprit et réoriente ses turbulences. Je crois fermement qu’on doit passer une partie de chaque journée dans la spiritualité, peu importe la forme.
Je n’ai aucun problème à être admise en soins prolongés lorsqu’il sera impossible de rester à la maison. Je ne veux pas que les membres de ma famille passent leur vie à me garder. Ils ont leur propre famille et leur propre vie à vivre, et je ne veux pas qu’ils doivent tout abandonner pour prendre soin de moi. Je sais qu’ils le feraient sans hésiter. Je peux vivre une vie agréable dans un établissement de soins prolongés, dont beaucoup ressemblent à la maison de nos jours. Je pourrai sortir et rendre visite à ma famille et à mes amis, et vice-versa. Ma famille connaît ma volonté de ne pas vouloir de visites de sympathie ou de culpabilité.
J’ai eu une belle vie. Je pense que j’ai fait les meilleurs choix pour moi et pour ma famille. Je choisis de mourir de la même façon. Ma foi me donne la confiance de ne pas avoir peur de la mort et de ne pas souhaiter qu’elle soit repoussée. J’adore la vie. Chaque jour, je vis avec enthousiasme, et je chéris chaque moment, peu importe ce qu’il m’apporte. Quelqu’un a dit : « Hier est passé, demain est un mystère, aujourd’hui est le cadeau de Dieu; c’est pourquoi on l’appelle le présent. » Célébrons-le! Célébrons ce qui est bon dans mon monde!
Un domaine de soins qui s’insère dans tous ces thèmes et qui est souvent mal compris par les familles, les patients et les médecins est la nature terminale de la maladie d’Alzheimer15. La mortalité est liée en partie au vieillissement, mais une dimension palliative serait appropriée pour les personnes atteintes de démence avancée, sans égard à l’âge16–18. Les discussions sur la désignation d’un fondé de pouvoir et la planification des soins avancés doivent avoir lieu aussi tôt que possible dans l’évolution de la maladie, lorsque la personne est encore capable de prendre des décisions. Il importe que les médecins, les patients et les mandataires soient prêts à discuter des objectifs de soins qui évoluent à mesure que la maladie progresse. Dans les cas de démence grave, le mandataire sera probablement très impliqué; il est donc crucial qu’il comprenne bien les volontés du patient19,20.
[Dans mon rôle de ministre anglicane] j’ai cheminé plusieurs fois avec des personnes qui ont souffert de démence ou de cancer. J’ai été témoin de leur douleur (physique, mentale et émotionnelle). J’ai vu des familles qui, pour nulle autre raison que la culpabilité et l’obligation, ont continué de visiter les foyers de soins infirmiers, même lorsqu’il n’y avait plus aucune reconnaissance ni conversation. J’ai beaucoup réfléchi à la fin de la vie durant ma vie adulte. Ces pensées et ces idées ne sont pas des coups de tête. J’ai sondé ma foi et mon amour pour ma famille avant d’arriver à ces conclusions. Ce sont mes décisions personnelles et je me rends compte que certaines personnes ne seront pas d’accord. Sur ce point, nos réflexions sont personnelles et la seule chose sur laquelle on peut probablement se mettre d’accord est qu’on souhaite être traité avec amour et respect. J’ai partagé mes réflexions et mes volontés avec mes enfants. Ils comprennent mon raisonnement et l’acceptent. Je suis fermement en faveur de vivre bien plutôt que de vivre longtemps. La vie ne s’évalue pas en fonction du nombre d’années, mais plutôt de la qualité de ces années.
Conclusion
Les médecins de famille jouent un rôle crucial dans la prise en charge de la démence. Les patients et les soignants parlent souvent d’importants enjeux de prise en charge dans les domaines du diagnostic et de la divulgation, des ressources communautaires et de soutien, du partage d’information, de la prise en charge de la maladie, ainsi que des attitudes et des compétences en communication. Les médecins doivent tenir compte de ces thèmes lorsqu’ils tentent de comprendre l’expérience et le point de vue des personnes atteintes de démence et de leurs soignants afin de pouvoir dispenser des soins optimaux.
Notes
POINTS DE REPÈRE DU RÉDACTEUR
Les médecins de famille ont un rôle important à jouer dans le diagnostic et la prise en charge de la démence. Les soins optimaux sont truffés d’obstacles, y compris des lacunes dans les connaissances et l’incertitude chez les médecins, le manque de temps ou l’absence de rémunération pour éduquer et conseiller, et la difficulté d’identifier les ressources dans la communauté.
Les patients et les soignants rapportent que le diagnostic est souvent posé tardivement, et que les retards pour accéder aux ressources et au soutien sont frustrants; ils parlent souvent aussi d’importants enjeux de prise en charge dans les domaines du diagnostic et de la divulgation, des ressources communautaires et du soutien, du partage de l’information, de la prise en charge de la maladie et des attitudes, de même que des compétences en communication. Ils notent qu’ils ressentent souvent le besoin d’amorcer eux-mêmes la discussion sur les enjeux de prise en charge, tels que la sécurité, la conduite automobile et les médicaments.
Pour dispenser les soins de la meilleure qualité, les médecins doivent envisager la prise en charge dans ces contextes et tenter de comprendre l’expérience et le point de vue des personnes atteintes de démence et de leurs soignants. Il est parfois nécessaire de se tourner vers d’autres professionnels, ou de collaborer avec eux pour organiser le soutien et les services. La perception du patient et de sa famille est cruciale pour le médecin de famille qui tente d’évaluer comment les symptômes répondent au traitement. De menus gains fonctionnels, tels qu’une plus grande indépendance pour s’habiller, peuvent améliorer l’estime de soi du patient et alléger le fardeau pour les soignants.
Footnotes
Cet article donne droit à des crédits d’autoapprentissage certifiés Mainpro+. Pour obtenir des crédits, rendez-vous sur www.cfp.ca et cliquez sur le lien Mainpro+.
Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.
The English version of this article is available at www.cfp.ca on the table of contents for the January 2017 issue on page 22.
Collaborateurs
Les 2 auteurs ont contribué à l’examen et à l’interprétation de la documentation, ainsi qu’à la préparation du manuscrit aux fins de soumission.
Intérêts concurrents
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