L’allergie aux arachides est courante chez les enfants et c’est la cause la plus fréquente de décès dus à une allergie alimentaire en Amérique du Nord1. Il peut se produire de graves expositions accidentelles dans les écoles, et le système scolaire est mal préparé pour traiter d’éventuelles réactions subséquentes. En outre, surtout en bas âge, il existe un risque de contact avec des allergènes dans d’autres activités (comme les bricolages). Par conséquent, les arachides devraient être interdites dans les écoles, surtout durant les premières années.
Risques et politiques déficientes
Il se produit effectivement de graves expositions accidentelles à l’école.
Les enfants d’âge scolaire passent plus de la moitié de leur temps d’éveil en classe2, et la possibilité d’une exposition à un allergène durant ce temps est considérable. Une étude signalait que les enfants qui ont une allergie alimentaire ont effectivement des expositions accidentelles à des allergènes et des réactions allergiques en milieu scolaire, notamment 18 % des enfants qui avaient eu au moins 1 réaction à l’école au cours des 2 années précédentes. Dans 36 % des cas, les réactions affectaient 2 organes ou plus, 32 % comportaient de la sibilance et, dans une proportion aussi élevée que 15 %, elles avaient dû être traitées avec de l’épinéphrine3. Par contre, parmi les 80 écoles participantes, seulement 33 % n’avaient pas pris de mesures pour les enfants souffrant d’une allergie alimentaire. Une étude réalisée dans 109 districts scolaires dans l’État du Massachussetts a signalé que de l’épinéphrine avait été administrée dans 115 cas sur une période de 2 ans4.
Le système scolaire est mal préparé pour traiter les réactions allergiques.
Les lignes directrices publiées sur la prise en charge des enfants qui ont des allergies alimentaires dans les écoles et les divers services de garde recommandent un plan d’urgence personnalisé écrit et une prescription d’épinéphrine. En dépit de ces lignes directrices, des lacunes considérables ont été relevées, y compris le manque d’éducation du personnel sur les mesures préventives et le traitement d’urgence des réactions allergiques, l’absence de plans d’action écrits en cas d’allergie ou l’omission de les suivre, et l’absence d’épinéphrine à administrer en cas de réactions dangereuses pour la vie5–8.
Une très grande variabilité a été observée en Amérique du Nord en ce qui concerne l’état de préparation des écoles à traiter l’anaphylaxie. Un récent sondage auprès d’écoles aux États-Unis a révélé que dans 11 % d’entre elles, il s’était produit 1 incident anaphylactique ou plus9. L’état de préparation à la prise en charge de l’anaphylaxie variait beaucoup d’une école à l’autre, notamment au chapitre de la formation du personnel et de l’autorisation à administrer un traitement. Dans 36 % des écoles, seuls certains employés étaient formés pour reconnaître une anaphylaxie. La plupart des écoles (54 % [3024 sur 5578]) n’autorisaient que certains employés à administrer de l’épinéphrine, quoique les pourcentages fussent variables (allant de 4 à 100 %). Ce même manque d’uniformité se retrouve aussi au Canada, étant donné les politiques provinciales différentes, mais la situation n’a pas encore été bien étudiée. Par conséquent, le risque que courent les enfants allergiques aux arachides n’est pas minime. De telles politiques ne fonctionnent que si elles sont respectées et il est clair qu’elles ne le sont pas.
De plus, les allergènes des arachides sont très durables dans l’environnement. Même s’il a été clairement démontré que le nettoyage enlève facilement les allergènes d’arachides10, sans nettoyage, des Ara h 1 étaient présents sur la surface d’une table pendant 110 jours11. Il est préoccupant de ne pas savoir si un personnel approprié suit ou non cette directive en matière de nettoyage dans la vraie vie en milieu scolaire.
Il est raisonnable de bannir les arachides en salle de classe, surtout durant les premières années.
Certaines données probantes corroborent que les politiques d’interdiction des arachides sont assez efficaces. Par exemple, dans une étude auprès de 252 enfants allergiques aux arachides, quoique les réactions à l’école fussent rares, la seule qui se soit produite l’a été dans une école qui permettait les arachides12. Une étude sur les expositions accidentelles aux arachides a révélé que s’il y avait plus de réactions dans les écoles interdisant les arachides, la majorité des enfants fréquentaient aussi des écoles qui les interdisaient, ce qui veut dire que la proportion globale d’enfants qui avaient eu une réaction à l’école était marginalement plus faible dans les écoles qui ne permettaient pas les arachides par rapport à celles où elles n’étaient pas interdites (0,9 c. 2,8 %)13.
Étant donné le manque d’adhésion aux politiques, il est très raisonnable de préconiser une interdiction des arachides dans certaines situations, comme durant les premières années scolaires. Durant leurs 2 premières années à l’école, les enfants ne devraient pas être responsables de leur propre sécurité, étant donné qu’ils se fient à des adultes pour les guider dans tous les autres aspects de leur bien-être au quotidien. Les enseignants ont de nombreuses responsabilités en salle de classe. Ils devront toujours porter une attention particulière aux enfants qui ont des allergies alimentaires, ce qui peut parfois être difficile. Si les enfants mangent en salle de classe, il y a un risque que soient contaminés les surfaces, les livres et les jouets avec lesquels un enfant allergique aux arachides pourrait être en contact. Comme il est mentionné plus tôt, les protéines d’arachides peuvent rester stables dans un environnement sans nettoyage pendant 110 jours. Même si le fait de toucher une surface contaminée ne déclencherait pas nécessairement une réaction grave, les enfants portent souvent les jouets ou leurs mains à la bouche après un contact avec des objets contaminés, ce qui pourrait entraîner une ingestion et une réaction allergique subséquente. Il n’est pas réaliste de s’attendre à ce qu’un enfant s’abstienne de toucher une surface susceptible de contenir des résidus d’arachides. Les jeunes enfants pourraient aussi partager des aliments. Une interdiction complète des produits contenant des arachides durant les premières années est raisonnable s’il y a un enfant ayant une grave allergie aux arachides dans la classe.
L’interdiction des arachides ne veut néanmoins pas dire que les écoles peuvent faire preuve de laxisme à propos de leurs autres politiques. Le lavage des mains et le nettoyage des surfaces des tables après les repas sont des mesures sensées pour réduire la contamination et devraient être maintenues. Pour les plus jeunes enfants, ces mesures peuvent être très difficiles à appliquer et exiger plus de supervision que celle qui est possible.
Conclusion
Pour les très jeunes enfants allergiques aux arachides, le milieu d’apprentissage devrait être sans arachides. De plus, les aliments servis durant les événements en salle de classe devraient être sécuritaires pour les enfants allergiques aux arachides. La même règle devrait s’appliquer en ce qui a trait aux récompenses sous forme d’aliments ou aux projets de bricolage comportant des aliments (comme les mangeoires à oiseaux avec du beurre d’arachides). Même si aucune interdiction ne peut être appliquée entièrement, il est raisonnable de demander la coopération des familles dans les écoles primaires.
Notes
CONCLUSIONS FINALES — NON
Elissa M. Abrams md frcpc Wade Watson md med frcpc
Il se produit effectivement de graves expositions dans les écoles, qui peuvent causer des réactions anaphylactiques.
Les politiques scolaires concernant le traitement des réactions allergiques peuvent comporter des lacunes, d’où l’importance d’éliminer les arachides de l’environnement.
Les jeunes enfants courent un risque d’exposition par d’autres moyens que l’ingestion (comme le contact avec un jouet).
Il ne faudrait pas faire porter aux enfants la responsabilité de leur propre sécurité à l’école.
Footnotes
Cet article ont fait l’objet d’une révision par des pairs.
The English version of this article is available at www.cfp.ca on the table of contents for the October 2017 issue on page 750.
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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