
Chers collègues,
En tant que fournisseurs de soins de santé, nous avons le privilège d’accompagner les patients tout au long des soins qu’ils reçoivent dans leur parcours vers la santé. C’est ainsi que, parfois, la chance nous est donnée de vivre des expériences qui marquent profondément notre existence. Lors de ma quatrième année d’études en médecine, j’ai eu la chance de séjourner au Kenya pendant 3 mois et d’y pratiquer la pédiatrie et la médecine interne. Je me souviens des multiples pathologies dont souffraient de nombreux patients à ma charge, de l’obligation de compter sur un jugement clinique sûr plutôt que sur la technologie (un adolescent chez qui on avait récemment diagnostiqué un diabète sucré a également reçu un diagnostic de syphilis en raison de soupçons cliniques de dents d’Hutchinson ; on a confirmé le diagnostic de myasthénie grave chez un homme d’âge moyen grâce à un test à l’édrophonium en prenant la pression du patient avec un sphygmomanomètre) et des longues distances que parcouraient les patients, avec peu de moyens, pour consulter un médecin. Avant, je n’avais jamais envisagé de faire carrière en médecine familiale, mais c’est peu après mon retour que je me suis mise à y songer.
Comme le suggéraient Loignon et coll. dans un article du Médecin de famille canadien publié en novembre 2016, de plus en plus de données probantes indiquent que « les expériences médicales internationales auraient le potentiel de favoriser la compétence culturelle et les connaissances en santé globale, ainsi que l’engagement à soigner les personnes vulnérables1. » « La culture façonne le milieu dans lequel ont lieu les rencontres entre les patients, leurs familles et les médecins2. » Par compétence culturelle, on entend « un ensemble de comportements, d’attitudes et de politiques grâce auquel un système, un organisme ou un groupe de professionnels peut fonctionner efficacement en contexte interculturel1,3. »
Le numéro d’aout 2017 de Partenaire4, le bulletin de nouvelles de la Fondation pour l’avancement de la médecine familiale (FAMF), vous a révélé que la FAMF concentrera dorénavant ses efforts de financement sur les activités du Centre Besrour, une initiative visant à renforcer les capacités en matière de médecine familiale et de soins primaires des pays plus démunis que nous en ressources. Il y a de nombreuses raisons pour lesquelles le CMFC et sa FAMF occupent une position d’influence. En voici quelques-unes :
Notre collaboration avec les 17 départements universitaires de médecine de famille et, du même coup, avec leurs partenaires internationaux a constitué un élément clé du parcours.
Le système d’éducation médicale du Canada jouit d’une excellente réputation internationale.
La diversité de notre pays ainsi que ses deux langues officielles sont des atouts.
Le système de santé canadien assurant une couverture universelle des soins influence énormément notre travail. Une réforme serait bienvenue ; néanmoins, le régime d’assurance-maladie a assez bien servi la population canadienne au fil des années.
Le CMFC, sa communauté universitaire et ses membres ont grandement contribué à définir et à moderniser la discipline de la médecine familiale.
L’implication du CMFC dans les enjeux de santé mondiaux et la création d’un centre peuvent sembler toutes récentes. En réalité, c’était en préparation depuis longtemps, avec la mise sur pied du Comité sur la santé globale en 2004, la participation des dirigeants du CMFC à des consultations stratégiques et, finalement, la décision de mon prédécesseur Dr Cal Gutkin de donner une plus grande place à la santé mondiale dans les activités du Collège.
Notre objectif est de renforcer, grâce aux efforts du Centre Besrour, les capacités en matière de médecine familiale des pays disposant de moins de ressources que nous, et ce, en mettant en œuvre des actions orientées par notre mission première : l’éducation, y compris l’établissement de normes, l’agrément, la certification et le développement professionnel continu ; l’amélioration de la qualité et la recherche en médecine familiale et en soins primaires ; et la lutte pour que la prestation de soins de qualité en médecine familiale et en première ligne soit le noyau central des systèmes de santé. Notre rôle n’est pas d’apporter du secours humanitaire ; d’autres organisations canadiennes le font très bien. Compte tenu de l’importance du contexte dans la prestation de soins en première ligne ou en médecine de famille, notre objectif est plutôt de travailler avec nos partenaires au renforcement de leurs capacités. Autrement dit — comme le veut le proverbe chinois — au lieu de leur « donner du poisson », nous partageons les leçons de notre expérience pour leur « apprendre à pêcher ».
Nous sommes conscients des effets transformateurs que peut avoir l’action internationale. C’est pourquoi, grâce aux efforts du Centre Besrour, nous tenterons de mieux comprendre ce que cela implique et de mettre à profit les leçons de notre expérience internationale afin d’améliorer la qualité des soins que nous offrons aux populations vulnérables du Canada. Il s’agit avant tout d’apprendre comment devenir de meilleurs médecins et de meilleurs citoyens et comment mieux répondre aux besoins de notre communauté.
Au cours des semaines et des mois à venir, restez à l’affut des initiatives réjouissantes qu’entreprendra le Centre Besrour.
Remerciements
Je remercie Mme Valerie Molloy, Mme Ophelia Michaelides et Dre Katherine Rouleau pour leur révision de cet article.
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