Notre collègue affirme ce qui suit : « Des faussetés ont causé la crise des opioïdes et des faussetés la font persister »1. La fausseté qu’il propage est que la crise contemporaine des opioïdes n’a qu’une seule et récente origine. Les humains utilisent les opioïdes depuis des millénaires, et les tentatives pour atténuer les préjudices en éliminant les drogues se poursuivent depuis 1729, lorsque l’empereur de Chine a interdit les importations d’opium à cause des torts qu’il causait2. La « guerre contre les drogues » a échoué à répétition à contrer leur usage abusif, incitant de nombreux pays à adopter des stratégies de réduction des préjudices, et à accroître la reconnaissance et le traitement de la toxicomanie.
Réduire la compulsion de consommer abusivement des substances comme le tabac, l’alcool et les drogues devrait être notre objectif à atteindre par des changements fondamentaux dans la société afin de réduire la pauvreté, les incidents indésirables durant l’enfance et la dysfonction familiale3. Il faut de toute urgence atténuer la stigmatisation entourant la toxicomanie de manière à ce que les utilisateurs ne consomment pas dans l’isolement et ne meurent pas d’une surdose parce qu’on ne leur a pas administré de naloxone.
Nous sommes surprises que notre collègue ait omis de mentionner les résultats dévastateurs du fentanyl à bon marché importé en Amérique du Nord et vendu comme de l’héroïne, de l’ecstasy et de la cocaïne. Entre janvier et octobre 2017, du fentanyl a été détecté dans environ 83 % des cas de décès par surdose de drogues illicites en Colombie-Britannique, un phénomène bien plus fréquent que les décès associés aux prescriptions.
Dans sa citation de statistiques en provenance des États-Unis et de l’Ontario, et en les extrapolant à toutes les régions, notre collègue ne reconnaît pas que les prescriptions d’opioïdes varient dramatiquement d’une région à l’autre du Canada5 et que des stratégies différentes pourraient être nécessaires selon l’endroit. Par exemple, le taux de mortalité associée aux opioïdes pharmaceutiques de 3,9 par 100 000 habitants en Colombie-Britannique est demeuré stable de 2004 à 20136. Ce taux inclut tous les décès reliés aux opioïdes pharmaceutiques (y compris la méthadone pour le maintien), intentionnels ou non, opioïdes prescrits et détournés. Ce profil est remarquablement différent de celui en Ontario.
De nombreux patients aux prises avec la douleur ont un faible risque d’usage abusif et prennent leurs médicaments comme prescrits, mais à cause de recommandations et d’autres règlements, les médecins réduiront ou cesseront les opioïdes. La douleur de nombreux patients ne sera pas contrôlée adéquatement, entraînant des conséquences comme la recherche de médicaments de la rue par certains patients.
Si les médecins ne prennent pas le temps de comprendre les complexités, la politique et l’éthique de ce problème compliqué, ils pourraient décider qu’il est plus simple d’éviter tout simplement de prescrire des opioïdes.
Footnotes
Intérêts concurrents
La Dre Gallagher accepte des honoraires pour des conférences éducatives de Purdue Pharma. La Dre Hatcher a été membre de conseils ou de comités consultatifs de Purdue Pharma, Lilly, AstraZeneca, Tilray et Paladin, et a reçu des honoraires de conférence ou de cours de Purdue Pharma, Lilly, Tweed, Catalytic Health, Tilray, Knight Therapeutics, CME AWAY, mdBriefCase et du Collège des médecins et chirurgiens de l’Ontario. Elle était membre du panel d’experts chargé de la mise à jour des recommandations canadiennes 2017 sur les opioïdes.
The English version of this article is available at www.cfp.ca on the table of contents for the February 2018 issue on page e58.
Ces réfutations sont les réponses des auteurs des débats dans le numéro de février (Can Fam Physician 2018;64:101–4 [ang], 105–9 [fr]).
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