L’accès aux soins de santé dans les milieux ruraux* est un défi. Environ 20 % de la population canadienne habite en milieu rural et elle est servie par seulement 8 % des médecins1,2. De plus, de nombreux Canadiens voyagent en milieu rural pour leurs vacances et ils requièrent un accès aux soins de santé à proximité pour leurs besoins plus urgents.
Il est difficile de recruter des médecins dans ces milieux éloignés des attractions de la ville, des écoles où plusieurs médecins souhaitent envoyer leurs enfants, et des perspectives d’emploi pour leur conjoint. En revanche, plusieurs médecins s’y installent de façon temporaire. Il est donc important d’avoir des stratégies pour y favoriser la rétention.
C’est la raison pour laquelle le CMFC a travaillé avec la Société de la médecine rurale du Canada de 2014 à 2017 pour établir le Plan d’action pour la médecine rurale3. Pour que ces recommandations ne finissent pas sur une tablette, le Collège a mis en place un comité de mise en œuvre qui comprend non seulement des organismes du milieu médical, mais aussi d’autres groupes représentant entre autres les municipalités, les chaires de recherche, les autres professionnels de la santé et les Autochtones.
J’ai été impliqué dans le recrutement de médecins dans ma région pendant de nombreuses années et j’ai beau-coup appris de cette expérience. Le succès est le résultat de nombreuses initiatives, et cela demande la collaboration de multiples acteurs tant aux niveaux local, régional et provincial que fédéral. Les initiatives locales sont les plus importantes. C’est la raison pour laquelle certains milieux s’en tirent mieux que d’autres alors qu’ils bénéficient des mêmes aides externes.
D’abord, il faut que les milieux ruraux soient constamment en mode recrutement. Parfois, l’erreur est de cesser de recruter quand les effectifs semblent complets. Inévitablement, un départ inattendu survient et l’équipe se retrouve en déficit, sans solution à sa portée. Ensuite, l’ambiance de travail doit être agréable. Les jeunes médecins cherchent un milieu où ils seront soutenus et où la collaboration et l’entraide sont au rendez-vous.
Le recrutement doit se faire en collaboration avec les leaders communautaires locaux. Pour recruter un médecin, il faut recruter une famille. Il faut lui offrir des occasions de se créer un réseau social local. Il faut l’aider à trouver une gardienne et des activités pour ses enfants, et, idéalement, un emploi pour son conjoint. Les maires et les autres organismes locaux doivent collaborer avec les médecins afin de personnaliser l’approche pour chaque candidat. Ceci est d’autant plus important, car un médecin qui aime sa pratique, ses collègues et sa nouvelle communauté risque de rester plus longtemps. Il est souvent plus facile de retenir un médecin que d’en recruter un nouveau. Par contre, pour donner une chance aux communautés rurales de recruter, certains acteurs externes doivent faire leur contribution.
D’abord, les facultés de médecine doivent recruter des étudiants qui seront plus enclins à aller pratiquer en milieu rural. En collaboration avec notre Collège et le Collège royal, elles doivent aussi s’assurer que les médecins ont les compétences nécessaires pour pratiquer la médecine dans ces contextes. Ensuite, les gouvernements provinciaux et le gouvernement fédéral doivent mettre en place les infrastructures nécessaires pour soutenir la médecine en milieu rural et la rendre intéressante. Par exemple, ils doivent mettre en place des ententes de transfert efficaces. Ils doivent également mettre en place et maintenir des incitatifs financiers pour appuyer les efforts de recrutement au niveau local.
Finalement, pour prendre de bonnes décisions, il faut de bonnes données. Pour cela, il est nécessaire que le gouvernement fédéral appuie un réseau pancanadien de recherche en médecine rurale.
Le Comité sur la mise en œuvre du Plan d’action pour la médecine rurale a débuté ses travaux et a déterminé ses priorités. Il militera pour un resserrement des normes pour améliorer les transferts de patients vers les services de santé en milieu urbain puis le retour dans les communautés rurales ainsi que pour l’établissement de compétences nécessaires pour la pratique en milieu rural. Il fera de grands efforts, également, pour trouver des moyens d’impliquer les communautés et pour mettre sur pied un réseau pancanadien de recherche en médecine rurale.
Les Canadiens qui vivent ou qui voyagent en milieu rural ont droit à des soins accessibles et de grande qualité. Les médecins de famille y contribuent grandement, et c’est une des plus-values de notre spécialité. Grâce au Plan d’action pour la médecine rurale et à son comité de mise en œuvre, nous réussirons certainement à faire avancer cette noble cause.
Remerciements
Je remercie Dre Ivy Oandasan, Dre Francine Lemire, et Dre Véronique Duplessis pour la révision de cet article.
Footnotes
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