Les médecins de famille jouent un rôle important dans l’évaluation et la prise en charge des commotions cérébrales1. À la suite de la publication en 2017 du consensus qui s’est dégagé de la 5e Conférence internationale sur les commotions cérébrales dans le sport2, cet article décrit le rôle des médecins de famille et offre des conseils pratiques sur 3 étapes des soins pour une commotion : la visite initiale, le protocole de retour au jeu et l’évaluation des symptômes persistants.
Soins pour une commotion cérébrale liée au sport
Visite initiale.
Le principal déterminant menant à l’évaluation d’une commotion cérébrale possible est la détection de ce problème dans la communauté. Il importe donc que les médecins de famille connaissent et utilisent les plus récents outils (p. ex. le CRT5 [Outil de reconnaissance des commotions cérébrales, 5e édition])1,2.
Pour l’évaluation initiale, on peut se servir du SCAT5 (Outil d’évaluation des commotions dans le sport, 5e édition)2. L’exclusion des formes plus graves de traumatismes cérébraux et des problèmes qui peuvent y être associés (p. ex. blessures cervicales) ou qui ressemblent à une commotion (p. ex. migraine) est un élément crucial de cette évaluation. Étant donné qu’il n’existe pas encore de test diagnostique objectif, ce diagnostic est encore posé par exclusion. Il n’est pas nécessaire qu’il y ait de l’amnésie, une perte de conscience ou des résultats anormaux dans les scores selon l’échelle de Glasgow pour diagnostiquer une commotion cérébrale.
Dans chaque évaluation, il faut documenter la nature et la gravité de chaque symptôme de commotion (section 2 du SCATS5), parce qu’au-delà des premiers jours suivant la blessure, l’évaluation des symptômes est reconnue comme le moyen le plus utile pour surveiller le rétablissement2.
Une fois le diagnostic de commotion cérébrale posé, il faut conseiller de s’abstenir des activités susceptibles de poser des risques d’autres blessures, de se reposer et de reprendre graduellement les activités cognitives et physiques, comme indiqué dans les Lignes directrices canadiennes sur les commotions cérébrales dans le sport3.
Protocole de retour au jeu.
L’encadré 12,3 résume ce dont il faut essentiellement tenir compte dans le protocole de retour au jeu. Les 3 premiers aspects portent sur la disparition des symptômes et sur la reprise réussie des activités cognitives et physiques, signalant qu’il est possible à ce stade de recommander un retour au jeu2,3, sous réserve que les constatations à l’examen clinique soient aussi normales.
Facteurs à considérer dans le protocole de retour au jeu
Pour recommander le retour au jeu, il faut déterminer ce qui suit :
Les symptômes qui laissaient présager la présence d’une commotion cérébrale ont-ils tous disparu?
La reprise complète et sans restriction des activités cognitives normales s’est-elle produite sans symptômes?
Des activités physiques d’endurance et de résistance vigoureuses ont-elles été effectuées sans symptômes?
Les constatations à l’examen clinique ont-elles confirmé un état normal de la colonne cervicale et sur le plan neurologique?
Y a-t-il un problème de santé, une commotion antérieure ou un contexte qui justifierait de retarder davantage le retour au jeu?
Au nombre des autres facteurs à considérer dans le protocole de retour au jeu figurent l’âge du patient, ses autres problèmes de santé, ses antécédents personnels de commotions et tout autre facteur contextuel qui pourrait soulever des doutes entourant les renseignements sur le rétablissement. Un protocole plus conservateur pourrait être envisagé pour les mineurs (moins de 18 ans), surtout en présence de comorbidités comme la migraine, un trouble du déficit de l’attention ou des antécédents de commotions cérébrales. Pour les patients déjà victimes de commotions, un court intervalle entre les traumatismes (p. ex. la même saison), une période de rétablissement plus longue ou un seuil de blessure moins élevé devraient inciter à faire des recommandations plus conservatrices.
Il se peut que des pressions pour retourner au jeu, venant de l’extérieur ou du patient lui-même, puissent faire en sorte que le patient nie ou masque ses symptômes. Pour éviter de tels comportements, il faut bien renseigner le patient quant aux complications dramatiques et aux conséquences chroniques d’un retour au jeu prématuré. Enfin, dans le doute au sujet de la validité de l’information obtenue, il vaut mieux retarder le retour au jeu.
Évaluation des symptômes persistants.
La plupart des commotions cérébrales se régleront favorablement après quelques jours ou semaines. On considère que les symptômes sont persistants s’ils durent plus de 2 semaines chez un adulte et plus de 4 semaines chez les enfants et les adolescents2. Ces critères peuvent servir pour déterminer le moment opportun d’une réévaluation.
Cet examen devrait inclure une évaluation formelle pour mieux qualifier et quantifier la persistance des symptômes (Figure 1)2,4. Il faut aussi documenter l’état neurologique du patient, et vérifier s’il s’est bien conformé aux recommandations initiales, car une exacerbation répétée des symptômes due à une augmentation prématurée des demandes sur les plans cognitif et physique est une constatation fréquente qui contribue à la persistance des symptômes.
L’état fonctionnel déficient attribuable à une commotion cérébrale représente une source importante d’anxiété pouvant mener à des symptômes de dépression. Cette possibilité devrait toujours être évaluée pour y remédier le plus tôt possible, et il y a lieu de bien informer le patient de l’évolution naturelle de la plupart des commotions, ce qui aide considérablement à atténuer l’anxiété.
L’évaluation devrait aussi se pencher sur la détection de problèmes qui peuvent contribuer aux symptômes persistants2–4. Des lésions à la colonne cervicale peuvent causer des céphalées cervicogéniques et des problèmes d’équilibre. Des problèmes vestibulaires ou oculomoteurs peuvent engendrer des étourdissements, des problèmes d’équilibre ou des symptômes visuels. Une dysfonction du système nerveux autonome peut se traduire par une intolérance à l’exercice. Il faut dépister ces problèmes, parce que les stratégies de réadaptation peuvent être bénéfiques pour les régler2. Les plaintes de nature cognitive (p. ex. manque de concentration, fatigue mentale), les troubles du sommeil et les migraines post-traumatiques devraient aussi être reconnus et considérés dans le plan thérapeutique individualisé.
Dans les situations complexes ou atypiques, il faut envisager une demande de consultation auprès d’un collègue qui détient un Certificat de compétence additionnelle en médecine du sport et de l’exercice ou auprès d’une clinique qui offre des soins structurés, adaptés aux commotions cérébrales5.
Conclusion
En tant que médecin de famille, le recours à une approche structurée durant ces 3 étapes des soins pour une commotion cérébrale me permet de prendre en charge la plupart de ces cas et d’amorcer une prise en charge multidisciplinaire pour les problèmes plus complexes.
Notes
Nous encourageons les lecteurs à nous faire connaître certaines de leurs expériences vécues dans la pratique : ces trucs simples qui permettent de résoudre des situations cliniques difficiles. Vous pouvez proposer en ligne des articles dans Praxis à http://mc.manuscriptcentral.com/cfp ou par l’intermédiaire du site web du MFC à www.cfp.ca sous « Authors and Reviewers ».
Footnotes
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
Cet article donne droit à des crédits d’autoapprentissage certifiés Mainpro+. Pour obtenir des crédits, rendez-vous sur www.cfp.ca et cliquez sur le lien Mainpro+.
Cet article a fait l’objet d’une révision par des pairs.
This article is also in English on page 198
- Copyright© the College of Family Physicians of Canada