
Chers collègues,
Le Canada est l’un des rares pays membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) à ne pas avoir de programme national d’assurance-médicaments public (les autres sont Israël, le Mexique et les États-Unis)1. Des recommandations en faveur d’un programme national d’assurance-médicaments sont ressorties des rapports et consultations au fil des ans1–4. Le CMFC a souvent exprimé son appui pour un tel programme. Avec la nomination du Dr Eric Hoskins au poste de président du Conseil consultatif sur la mise en œuvre d’un régime national d’assurance-médicaments et avec les élections qui se tiendront à l’automne, il serait important de poursuivre le dialogue.
Le Conseil consultatif a défini le programme d’assurance-médicaments comme « un régime d’assurance-médicaments qui permet aux gens d’avoir accès aux médicaments sous ordonnance nécessaires »2. Dans une certaine mesure, l’universalité est incluse — un régime pour tous. En même temps, on reconnaît que les conditions et la structure des régimes d’assurance-médicaments doivent être définies (p. ex., les médicaments « nécessaires »).
Le Canada a dépensé 34 milliards $ en médicaments en 2017, 43 % par l’intermédiaire de régimes sociaux d’assurance-médicaments, 36 % par l’intermédiaire des régimes privés, et 23 % payés par les particuliers1. Tous les programmes provinciaux fournissent une certaine couverture pour les personnes de 65 ans et plus et pour les bénéficiaires d’aide sociale ; 60 % des Canadiens et Canadiennes ont une couverture privée1. En incluant d’autres formes d’assurance-médicaments (p. ex., pour les personnes de moins de 24 ans en Ontario, pour les personnes atteintes d’un cancer ou nécessitant des soins palliatifs dans certaines provinces), plus de 80 % des Canadiens et Canadiennes ont une certaine couverture. Cependant, au moins 5,5 % d’entre eux sautent, prolongent ou ne remplissent pas leurs prescriptions1. Manifestement, ces personnes comptent parmi les plus vulnérables au sein de nos communautés. Évaluons les options du point de vue de l’accès, du rapport qualité-prix et de l’acceptabilité pour les patients et les prestataires de soins.
Régime public d’assurance-médicaments complet : Ce régime assurerait l’accès pour tous et serait financé par l’État. Ce modèle est fortement appuyé par plusieurs Canadiens ; il est le plus coûteux, et la transition et la gestion seraient complexes. Les employeurs qui fournissent actuellement des assurances à leurs employés économiseraient ou non de l’argent ; les employeurs n’offrant pas d’assurance-médicaments devront peut-être contribuer financièrement par des taxes ou d’autres.
Régime public de couverture des médicaments essentiels : Cette option est basée sur la liste de l’Organisation mondiale de la santé des 125 médicaments essentiels5. La plupart des classes actuelles de médicaments sont incluses, ce qui permet un meilleur accès à une assurance-médicaments ; grâce à un formulaire courant et des achats en grande quantité, certaines économies pourraient être réalisées ; on encouragerait les médecins à utiliser des médicaments d’ordonnance à faible coût. Cette option entrainerait une hausse des dépenses publiques, et le modèle ne remplacerait pas complètement les régimes d’assurances-médicaments publics ou privés actuels. La plupart des médicaments utilisés dans les soins communautaires seraient couverts ; la vitesse d’introduction de nouveaux médicaments et leur inclusion au formulaire devraient être prises en charge. Ce modèle a reçu un accueil mitigé du grand public. L’Association médicale canadienne a effectué un sondage auprès de ses membres et a exprimé son appui pour ce modèle6.
Régime public d’assurance-médicaments avec franchises en fonction du revenu : Diverses variations de ce modèle existent actuellement dans plusieurs provinces. Selon la façon dont elle est structurée, cette couverture pour les familles à faible revenu pourrait être améliorée, tant qu’elles sont exonérées de toute franchise ; le modèle a reçu des commentaires mitigés, en partie parce qu’il est difficile à mettre en œuvre.
Mandat individuel : Ce modèle est utilisé au Québec. (Notons que le Québec détient le formulaire public le plus généreux au pays.) Il s’agit d’un régime public fondé sur les primes pour les personnes qui n’ont pas d’assurance-médicaments privée, dont la prime est basée sur le revenu. L’accès est meilleur pour ceux et celles qui n’ont pas d’assurance-médicaments ; le rapport qualité-prix n’est pas particulièrement meilleur ; il peut y avoir des différences importantes dans le niveau de couverture ; et il est difficile à mettre en œuvre.
Régime public optionnel d’assurance-médicaments : Ce modèle est utilisé en Alberta pour les personnes de moins de 65 ans. L’inscription est basée sur les primes et améliore l’accès pour les personnes qui n’ont pas de couverture ; le rapport qualité-prix n’est pas nécessairement meilleur, mais ce modèle est moins exigeant pour le secteur public et occasionne le moins de difficulté pour les bénéficiaires.
Comme vous l’avez remarqué, il y a plusieurs facteurs dont il faut tenir compte : les options les plus équitables ; les choix individuels ; les effets sur les employeurs, avec les répercussions économiques possibles ; les effets sur les assureurs privés ; le niveau de dépenses publiques ; et si les Canadiens continuent d’adhérer à la notion égalitaire de « s’occuper les uns des autres » grâce a une politique publique judicieuse.
Depuis longtemps, le CMFC favorise un régime national d’assurance-médicaments. Au moment d’écrire ces lignes, nous avons été informés que le gouvernement fédéral nous donnerait une indication du niveau de soutien au régime d’assurance-médicaments dans le prochain budget. Lors de conversations informelles avec les médecins de famille, j’ai senti qu’ils appuyaient un système intuitif, avec un minimum de paperasse, et un processus simple de demande de couverture pour les médicaments qui n’apparaissent peut-être pas au formulaire. Nous attendons d’avoir plus de détails sur les options choisies et sur la façon dont elles amélioreront l’accès, permettront un niveau de choix et d’innovation, et seront financièrement viables, tout en minimisant les effets sur les fournisseurs de soins. Bref, l’important est d’atteindre de meilleurs résultats tangibles sur la santé et des améliorations mesurables en matière de qualité de vie pour tous les Canadiens. Nous aimerions entendre votre opinion à ce sujet. Êtes-vous en faveur d’un programme national d’assurance-médicaments ? Quelles options préférez-vous ? Dites-nous ce que vous en pensez en publiant une réponse rapide à cet article en ligne.
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