
L’ami du temps ne passe pas son temps à dire « Je n’ai pas le temps ». Il ne se bat pas contre le temps. Il l’accepte et le chérit.
Jean Vanier
Voici le deuxième d’une série de 2 numéros spéciaux1,2 du Médecin de famille canadien consacrés à approfondir les connaissances des médecins de famille (MF) sur les besoins et les lacunes en matière de soins aux personnes ayant des déficiences intellectuelles et développementales (DID).
Le premier numéro spécial, publié en avril 2018, se concentrait sur la santé des adolescents et des jeunes adultes ayant des DID, ainsi que sur le rôle que les MF peuvent jouer dans leurs soins et dans les revendications pour les améliorer. Dans le numéro d’avril habituel se trouvaient aussi des lignes directrices de pratique clinique complètes et actualisées sur les soins primaires aux adultes ayant des DID4. Ce deuxième numéro porte sur les soins aux personnes qui vieillissent avec des DID.
Depuis les dernières décennies, l’espérance de vie des personnes ayant des DID a augmenté. Dans le cas des personnes dont les DID sont légères, l’espérance de vie est à peu près la même que celle de la population en général, tandis que les personnes ayant des DID de modérées à graves vivent maintenant jusqu’à la fin de la soixantaine et de la cinquantaine, respectivement5. Par ailleurs, globalement, la longévité des personnes ayant des DID demeure considérablement moins grande que celle de l’ensemble de la population.
Le vieillissement avec des DID pose des problèmes considérables : de solides données probantes étayent que les aînés ayant des DID souffrent des mêmes maladies chroniques liées à l’âge que le reste des personnes âgées, mais bon nombre de leurs besoins à cet égard passent inaperçus et ne sont pas comblés comparativement à la population en général5,6. Les personnes qui vieillissent avec des DID vivent avec des problèmes de santé non reconnus ou mal traités (p. ex. déficiences visuelles et auditives, santé mentale), et avec des taux de morbidité et de mortalité plus élevés que le reste de la population5.
Vieillir avec des DID peut être difficile, parce que ce processus varie selon le problème sous-jacent; par exemple, les adultes ayant le syndrome de Down ont un vieillissement accéléré, y compris un risque génétiquement élevé de développer la maladie d’Alzheimer. Le risque plus élevé d’hypothyroïdie et de dépression des personnes atteintes du syndrome de Down complique encore davantage le diagnostic et la prise en charge de la maladie d’Alzheimer. C’est pourquoi il est beaucoup plus complexe pour les MF de soigner des personnes vieillissantes ayant des DID.
Un important commentaire dans ce numéro (page S11), par Sullivan et ses collègues, démontre qu’en dépit de ces défis, les MF sont bien placés et ont la compétence voulue pour améliorer la santé des aînés ayant des DID7.
Les MF peuvent améliorer les soins aux patients ayant des DID de 3 principales façons. La première est d’adopter une approche développementale des soins. Plus précisément, Sullivan et ses collègues font valoir combien il est précieux de procéder à des évaluations périodiques de la santé à l’aide d’outils expressément conçus pour répondre aux besoins des personnes ayant des DID, comme les tableaux d’évaluation de la santé (Health Check)7. Un article de recherche (page S60)8 dans ce numéro spécial le corrobore, et un article Praxis explique comment utiliser efficacement cet outil (page S33)9.
Soutenir une plus grande autonomie et une prise de décision partagée est un autre rôle des MF dans les soins aux personnes ayant des DID7, et un article Praxis de ce numéro montre comment s’y prendre (page S27)10.
Enfin, Sullivan et ses collègues expliquent comment les MF peuvent faire une différence en reconnaissant la vulnérabilité des personnes vieillissant avec des DID et en y répondant7. En plus de promouvoir l’autonomie des aînés ayant des DID, ils peuvent aussi les protéger contre des préjudices, surtout dans les situations où cette autonomie et leur capacité de décider sont entravées, et s’il s’agit de décisions sur les soins en fin de vie. Des ressources comme celle offerte en ligne par Surrey Place (Steps to Promote Decision-Making Capabilities of Adults with Intellectual and Developmental Disabilities)11, peuvent aider les MF dans ce rôle.
Les médecins de famille trouveront que ce numéro spécial de la revue, de même que les nombreuses ressources en référence, seront de précieux outils pour les soins aux personnes de leur pratique qui ont des DID.
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