Le molluscum contagiosum (MC) est l’un des problèmes dermatologiques les plus courants dans le monde1, avec une prévalence oscillant entre 5,1 et 11,5 % chez les enfants de la tendre enfance à 16 ans2. Il n’existe pas de traitement qui soit universellement reconnu3.
Le molluscum contagiosum est causé par un poxvirus qui infecte fréquemment les enfants, qu’ils soient en santé ou immunodéprimés4. Le virus du molluscum contagiosum (MCV) se présente sous 4 types génétiquement différents, mais identiques sur le plan clinique. Le MCV-1 est responsable de 97 % des cas chez les enfants de moins de 15 ans5, le MCV-2 est habituellement présent chez les patients immunodéprimés, et les MCV-3 et MCV-4 sont rares6. Les lésions de la peau sont appelées mollusca. Elles sont rigides, ombiliquées et en forme de dôme, et elles peuvent être blanches ou de la même couleur que la peau qui les entoure. Le virus MCV disparaît de lui-même, et ce, en 6 à 18 mois, quoique dans de rares cas, il puisse falloir jusqu’à 4 ans7. Dans une étude effectuée au R.-U., la durée moyenne (DM) d’un rétablissement spontané du MC se situait à 13,3 (8,2) mois8. Dans 13 % des cas, la disparition ne s’était pas produite après 24 mois; une transmission à d’autres enfants dans le même domicile est survenue dans 41 % des cas; et 11 % ont signalé une diminution considérable de la qualité de vie.
Il est acceptable de ne pas donner de traitement actif du MC aux enfants; par ailleurs, de nombreux enfants et leurs parents préfèrent une thérapie pour éliminer les lésions visibles9.
Choix de traitements
Il existe de multiples traitements, notamment par des méthodes destructives, immunomodulatrices et antivirales. Le curetage est une thérapie destructive largement utilisée. Dans une étude prospective sur le curetage, Hanna et ses collègues ont constaté une guérison chez 81 % des patients âgés de 1 à 18 ans3. À la suite d’une étude rétrospective auprès d’environ 2000 patients (de 1 à 18 ans), un curetage après l’application d’un mélange eutectique de lidocaïne et de prilocaïne s’est traduit par une guérison chez 70 % des patients après le premier traitement et chez 26 % additionnels après le deuxième traitement; les autres 4 % ont eu besoin d’un troisième traitement10. La satisfaction des patients et des parents était très élevée, soit à 87 % dans les 2 études.
Pour les enfants plus jeunes et ceux qui craignent la douleur du curetage, on peut envisager l’imiquimod. Il s’agit d’un agoniste des récepteurs Toll-like7 qui active l’interféron-α, induisant ainsi une réponse antivirale. Parmi 13 enfants, l’application d’imiquimod en crème 3 fois par semaine pendant 16 semaines a permis une disparition totale des lésions dans 15 % des cas, une réduction substantielle dans le nombre des lésions chez 54 % et, pour 31 % des enfants, la maladie a progressé ou n’a pas changé11. Malgré les effets secondaires locaux, dont l’érythème (85 %), des démangeaisons (75 %), une sensation de brûlure (23 %) et la douleur (11 %), l’imiquimod était bien toléré. Dans une étude ultérieure, la crème d’imiquimod à 5 % a permis un taux de disparition de 55 % après une seule visite, de 41 % après une deuxième, et de 3 % après une troisième; la satisfaction des parents se situait à 45 %, et il y a eu une incidence d’effets indésirables dans 36 % des cas3.
Un autre schéma thérapeutique avec de la pâte de nitrate d’argent a été utilisé chez 389 enfants pour traiter de petites papules et plaques érythémateuses (1 mm) largement répandues, qui sont souvent observées chez les enfants atteints de MC12. Après une seule application, toutes les lésions avaient disparu chez 90 % des patients; les deuxième et troisième applications se sont traduites respectivement par une guérison dans 7 et 2 % additionnels des cas. Compte tenu du taux de succès très élevé dans l’ensemble et de l’absence de cicatrices, le nitrate d’argent pourrait être une thérapie idéale. Fait à signaler, 17 % des patients ont eu des effets indésirables. D’autres études sont nécessaires, puisqu’il s’agissait de la seule étude évaluant le nitrate d’argent12.
La cantharidine
La cantharidine est une substance grasse de la classe des terpénoïdes, produite par des scarabées appartenant à l’ordre des coléoptères et à la famille des méloïdés, autrement connus sous le nom de cantharides9. Lorsque les cellules épidermiques absorbent la cantharidine, des protéases sérines sont libérées, ce qui cause la destruction de la plaque desmosomale, soit une partie de la structure d’ancrage des cellules, la perte des attaches intracellulaires, et la formation de cloques intraépidermiques13. La cantharidine figure sur la liste des substances restreintes de Santé Canada, et elle est classée comme un produit de santé naturel14.
Dans une étude des dossiers de 300 enfants américains (âge moyen de 4,7 ans) atteints du MC qui ont été traités avec des cristaux de cantharidine (52,5 mg) dans un collodion flexible (7,5 mL) sur jusqu’à 20 lésions ailleurs qu’au visage, 2,1 visites en moyenne ont eu pour effet de faire disparaître toutes les lésions chez 90 % des enfants et d’améliorer considérablement l’état chez une proportion additionnelle de 8 %15. Chez la plupart d’entre eux (92 %), il s’est produit une formation de cloques de légère à modérée, comme il faut s’y attendre avec l’utilisation de la cantharidine, et dans environ le tiers des cas (37 %), un érythème est apparu localement. Parmi les autres effets secondaires, on peut mentionner une légère douleur (14 %), une sensation de brûlure (10 %), une démangeaison (6 %), de même qu’une hyperpigmentation ou hypopigmentation postinflammatoire (8 %). Les chercheurs ont ensuite appelé les parents pour une entrevue de suivi, et 95 % se sont dits satisfaits. Dans une autre étude rétrospective en Caroline du Nord, 405 enfants (âge moyen de 5,8 ans) ont été traités avec de la cantharidine pour un total de 9688 lésions, à raison de 2,6 visites par enfant16. Les effets secondaires incluaient la douleur (7 %) et une formation grave de cloques (2,5 %); parmi les effets secondaires rares figuraient la démangeaison, une petite infection, de l’irritation, une autoeczématisation et des saignements. La plupart des parents (86 %) étaient satisfaits, et les autres s’inquiétaient de la douleur et de l’irritation.
Dans une étude prospective randomisée au Québec, 124 enfants (âge moyen de 5 ans) porteurs de lésions non faciales et non génitales ont été traités par curetage, avec de la cantharidine, de l’acide salicylique et de l’acide lactique, et de l’imiquimod3. Le curetage a été jugé le mode thérapeutique le plus efficace, et des effets secondaires se sont produits dans seulement 5 % des cas. La cantharidine était une option de rechange utile en clinique, mais elle exigeait plus de visites et causait des complications modérées dans 19 % des cas à cause des cloques.
Plus récemment, une étude expérimentale prospective, randomisée et à double insu contre placebo a suivi 94 enfants (âge moyen [DM] de 4,9 [2,7] ans) qui avaient été traités avec la cantharidine ou un placebo, avec ou sans occlusion (4 groupes au total)17. Le taux de disparition des lésions avec la cantharidine et l’occlusion se situait à 42 %, et à 30 % avec la cantharidine seulement. Dans le groupe traité par placebo, les lésions se sont résorbées dans 11 % des cas (p = ,0065). Une formation de cloques et une hyperpigmentation minimes ont été observées avec la cantharidine.
Conclusion
Le molluscum contagiosum disparaîtra sans thérapie active. Par ailleurs, étant donné la demande d’un traitement par les parents pour éclaircir la peau, la cantharidine est une option à envisager, qui exigera probablement 2 visites à la clinique, et qui comporte d’éventuels effets secondaires comme l’érythème, la sensation de brûlure et la formation sévère de cloques.
Notes
Mise à jour sur la santé des enfants est produite par le programme de recherche en thérapeutique d’urgence pédiatrique (PRETx à www.pretx.org) du BC Children’s Hospital à Vancouver (Colombie-Britannique). Mme Ogilvie-Turner est membre et le Dr Goldman est directeur du programme PRETx. Le programme PRETx a pour mission de favoriser la santé des enfants en effectuant de la recherche fondée sur les données probantes en thérapeutique dans le domaine de la médecine d’urgence pédiatrique.
Avez-vous des questions sur les effets des médicaments, des produits chimiques, du rayonnement ou des infections chez les enfants? Nous vous invitons à les poser au programme PRETx par télécopieur, au 604 875-2414; nous y répondrons dans de futures Mises à jour sur la santé des enfants. Les Mises à jour sur la santé des enfants publiées sont accessibles dans le site web du Médecin de famille canadien (www.cfp.ca).
Footnotes
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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