
Bing. Bang. Boum ! Un instant, je pédalais à vélo et le suivant, j’étais sur le sol, entourée d’étrangers. L’espace d’une seconde, un bête accident m’avait assommée, littéralement et figurativement. Mécanisme: traumatisme crânien. Diagnostic: commotion cérébrale. Impact: limitation fonctionnelle.
Évidemment, la blessure s’est produite durant la pandémie de la COVID-19, alors que je recevais souvent des demandes de travail supplémentaire. Des médecins revenaient de la retraite pour aider à la vaccination. Maintenant, les hospitaliers ont besoin de relève pour des quarts de travail. Je demeure principalement dans les coulisses, une médecin de famille incapable d’aider lorsque ma communauté a le plus besoin de moi.
IL semble donc approprié que je rédige l’éditorial du présent numéro sur les commotions cérébrales, connues pour une bonne raison comme des «blessures invisibles». L’hématome au cerveau se cache sous le crâne. Les constatations à l’imagerie sont négligeables. Les résultats d’un examen neurologique peuvent très bien être normaux. Les symptômes peuvent être vagues et difficiles à décrire. Un jour où l’on m’a demandé comment je me sentais, j’ai répondu que c’était comme si une grosse seringue avait injecté de l’eau dans les confins de mon cerveau. D’autres amis ont décrit leur sensation comme si leur cerveau s’était transformé en ouate ou était tombé dans un pot de crème pâtissière. Comment pouvons-nous saisir une expérience si imprécise et variable, et la façonner en un cas que nous pouvons évaluer, mesurer et traiter?
L’incertitude entourant le pronostic est tout aussi frustrante. Les patients veulent savoir une chose importante. Quand? Quand puis-je reprendre les sports, le travail, les études? Quand vais-je revenir à la normale? La réponse est insatisfaisante parce que le processus de rétablissement varie d’une personne à l’autre. Cette incertitude peut s’accompagner de culpabilité, de chagrin et de stress à cause du temps interminable passé aux rancards. Nous nous demandons: Et si cela se reproduisait? Et si cela ne finissait jamais?
Malgré ces difficultés, la médecine clinique peut nous guider. Dans ce numéro, Provvidenza et ses collègues évaluent l’outil SCHOOLFirst (page e93)1, une source d’information conçue pour aider les enseignants à soutenir les étudiants qui reviennent à l’école après une commotion cérébrale. Une étude rétrospective examine les rechutes et explore les raisons pour lesquelles les taux de récidive sont plus élevés lors du retour aux études que lors du retour au jeu (page e88)2. Une étude de recherche qualitative se penche sur les défis auxquels font face les adolescentes lorsqu’elles reviennent à l’école après une commotion et révèle d’importantes observations sur les pressions sociales particulières qu’elles subissent (page 204)3.
Dans un Balado du MFC4 connexe, l’icône du hockey et résidente en médecine familiale, la Dre Hayley Wickenheiser, décrit son expérience. Même si elle n’a jamais reçu de diagnostic formel, elle est certaine d’avoir subi des commotions. Elle décrit sa carrière, allant de participante aux Jeux olympiques à médecin dans des services de médecine, en passant par les dédales changeants de la culture liée aux commotions. La prise en charge a dramatiquement changé. Nous ne conseillons plus aux patients de s’asseoir dans une pièce sombre. Les résultats sont plutôt supérieurs, en général, grâce à un traitement précoce et à la reprise des activités5,6. Les sports professionnels prennent aussi la blessure plus au sérieux et actualisent leurs politiques7. La Dre Wickenheiser est déterminée à nous aider à comprendre cette affection insaisissable et a même décidé de faire don de son cerveau pour la recherche sur les commotions.
Comme le hockey, la prise en charge des commotions cérébrales exige un excellent travail d’équipe. Un commentaire met en évidence le rôle essentiel de la collaboration (page e61)8. Dans mon cas, l’amélioration a reposé sur cette approche. Je ne m’étais pas rendu compte de l’intensité et de la spécificité de la physiothérapie, qui comprend des exercices cardiovasculaires combinés à une réadaptation oculaire et vestibulaire. Un ergothérapeute a aussi joué un rôle important dans ma guérison, en m’aidant à structurer mon emploi du temps, à retrouver mes fonctions exécutives et à me préparer à la reprise de mes fonctions cliniques. Tous ces aspects sont essentiels au rétablissement, tout comme le soutien, l’empathie et la compréhension des commotions cérébrales dans nos écoles, nos équipes, nos lieux de travail et nos communautés.
Le traitement des commotions peut ressembler à l’image de l’affection elle-même; il peut être intangible, obscur et ouateux. Nous espérons que l’information dans le présent numéro aidera à éclairer l’esprit et à rendre plus visible cette affection stigmatisée et mal comprise pour les patients dans nos pratiques.
Notes
Pour écouter le balado par les Dres Fraser et Wickenheiser en anglais, balayez le code ici.

Footnotes
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