
Je ne vous apprendrai rien en vous disant que la médecine de famille est en difficulté dans de nombreuses régions du Canada.
J’ai déjà abordé l’accès difficile pour les patients dans plusieurs régions du pays, mais le point de vue de nos collègues est tout aussi important. L’épuisement, le manque de soutien et de temps pour les soins directs (au profit de l’administration), les modèles de rémunération qui rendent difficiles les soins aux patients aux besoins complexes sont autant de problèmes qui ont été exacerbés par les pressions qu’a exercées la pandémie sur nos systèmes et nos collègues.
Le CMFC étant notre famille professionnelle, la question est donc la suivante : comment peut-il stimuler un avenir dynamique pour notre profession, qui se doit d’être forte et le pilier du système de soins de santé, surtout en région rurale?
C’est l’une des réflexions qui occupent l’attention du CMFC et de votre Conseil d’administration depuis 2018, au lancement du Projet sur les finalités d’apprentissage. Comme l’a fait remarquer Francine Lemire, notre directrice générale et chef de la direction, dans Le Médecin de famille canadien en mars 2021, « le statu quo n’est plus une option1. » Voici certains points clés du rapport final du Projet sur les finalités d’apprentissage, mais je vous encourage à en lire toutes les recommandations2.
La réforme de l’éducation ne peut en soi assurer un avenir dynamique à la médecine de famille, mais il s’agit d’une première étape cruciale s’inscrivant dans notre mandat d’établissement de normes. La formation des médecins de famille doit suivre le rythme des changements sociétaux et s’étendre à de nombreux domaines de soins : soins à domicile et de longue durée, santé mentale et toxicomanie, santé des Autochtones, sécurité culturelle et soins tenant compte des traumatismes, antiracisme, soins virtuels et informatique de la santé. Nous devons soutenir la participation croissante des médecins de famille au leadership du système de santé, à la santé publique et des populations, et à l’amélioration de la pratique, surtout pour les communautés mal desservies. La société et les patients exigent plus de nous en scrutant davantage notre formation et nos pratiques. Nos compétences à diriger des équipes, à coordonner des soins complexes dans des systèmes de santé complexes et à défendre les intérêts de nos communautés sur des questions de santé façonneront encore plus la médecine de famille. Le perfectionnement de ces compétences chez nos résidents peut en soi les protéger contre l’épuisement, car ils verront leurs efforts locaux se traduire par des améliorations sanitaires systémiques pour leurs patients.
Le CMFC révisera les normes d’agrément des programmes de résidence dans au plus tôt 5 ans, afin d’en arriver à une stratégie responsable de mobilisation en vue du changement, assortie des ressources nécessaires. Cette réforme sera graduelle afin d’éviter un écart important dans la taille de la cohorte de nouveaux médecins de famille d’une année à l’autre.
Ce n’est toutefois qu’une partie de l’équation. La réforme de l’éducation doit s’accompagner de l’expansion d’innovations dans la pratique, selon la vision du Centre de médecine de famille du CMFC. Il faudra notamment des modèles de soins en équipe, une meilleure infrastructure et une diversification des modes de rémunération pour mieux refléter la complexité des soins. Nos résidents et collègues des cinq premières années de pratique se sont exprimés à ce sujet. L’environnement de pratique se doit d’être accueillant pour attirer les étudiants vers une carrière en médecine de famille.
Ce rapport n’est qu’une étape d’un long parcours. La réforme de l’éducation s’accompagnera d’efforts de plaidoyer solides auprès de tous les paliers gouvernementaux pour concrétiser la vision du Centre de médecine de famille partout au pays. Les leviers du changement ne sont pas entre nos mains, mais nous pouvons plaider avec force au nom de nos membres pour que les gouvernements structurent et financent la médecine de famille et les soins primaires de façon à garantir des pratiques valorisantes et efficaces. Nos efforts de plaidoyer à tous les paliers feront aussi état de problèmes contraignants comme le manque de disponibilité des remplaçants et l’alourdissement du fardeau administratif. Faites-moi part de vos obstacles à bbouchard{at}cfpc.ca.
Footnotes
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