
Il y a un an, le CMFC publiait le rapport final de notre Projet sur les finalités d’apprentissage1. Cela a marqué l’aboutissement de 4 années de recherche sur le terrain et de consultations auprès de groupes d’experts à travers le Canada en vue d’optimiser la formation en médecine de famille. Les 4 recommandations et les 16 mesures de soutien du rapport proposent des modifications visant à aider la relève à acquérir les compétences requises pour exercer, tout en tenant compte de l’étendue unique de la pratique au Canada.
Les principaux domaines d’enseignement qui doivent faire l’objet d’une attention particulière sont les soins à domicile et les soins de longue durée; les toxicomanies et la santé mentale; la santé autochtone; l’équité en santé; la responsabilité sociale et la lutte contre le racisme; les soins virtuels et les technologies informatiques en santé. Toutefois, les discussions sur le rapport ont porté beaucoup plus sur un élément de la proposition : le passage à une résidence de 3 ans.
Au départ, j’avais des doutes quant à l’allongement de la résidence, et je ne l’appuierais pas si c’était uniquement par souci de temps. Or, la proposition d’approfondir la formation a pour but de soutenir un système de santé continue d’évoluer. Former pour transformer est la meilleure façon d’envisager cette démarche, qui s’inscrit dans le droit fil de nos efforts pour mieux soutenir la médecine de famille.
Nous savons par ailleurs que les résidents subissent le poids d’un programme d’études de 2 ans très chargé, d’autant plus durant la pandémie. La compétence, la stabilité et la pérennité de la pratique se construisent dès la résidence. C’est pourquoi un programme de 3 ans s’impose dorénavant. Selon les données, de nombreux résidents entreprennent déjà une année supplémentaire de formation pour renforcer leur confiance et leur aisance clinique2. Cela laisse supposer que beaucoup sont disposés à prolonger leur formation dans la mesure où cette démarche leur apportera une carrière enrichissante. C’est précisément là que résident à la fois la difficulté et les possibilités. Nous devons employer le temps comme une ressource pour donner suite aux conclusions essentielles du Projet sur les finalités d’apprentissage.
En amorçant la phase 2, axée sur la réforme du programme d’études et la gestion du changement, le Collège engage un dialogue avec les intervenants afin d’emprunter une approche responsable. Cette phase permettra de s’assurer que le nouveau programme de 3 ans ne se contente pas d’enseigner plus longtemps la même matière, mais de bien réinventer un nouveau programme d’études intégré, plus à même de soutenir les apprenants dans leur transition vers la pratique et dans l’acquisition des compétences nécessaires à la prestation de soins complets et globaux.
Ainsi, on pourrait concevoir une dernière année de formation impliquant une pratique quasi autonome dans une communauté rurale ou éloignée. Cette dernière profiterait des soins fournis par un résident qui pourrait être amené à s’y installer. Pour sa part, l’apprenant tirerait profit d’une expérience exceptionnelle qui lui permet d’acquérir de la confiance et de consolider son apprentissage.
En poursuivant, j’aimerais souligner quelques points. D’abord, le Collège continue de revendiquer des changements dans le milieu de pratique afin de maintenir en poste les médecins de famille et les superviseurs requis pour optimiser la formation et faire de la spécialité une carrière attrayante aux yeux des étudiants. Deuxièmement, aucun changement majeur à la résidence n’est prévu pendant la phase 2, qui se poursuit jusqu’en 2027. Les changements se feront de manière progressive, compte tenu de la nécessité de maintenir le contingent de médecins de famille qui débutent la pratique. Enfin, le Collège comprend que la souplesse est de mise. Il nous faudra considérer les besoins contextuels liés à l’équité, surtout concernant la formation dans les régions rurales et éloignées et la satisfaction des besoins des populations marginalisées.
Toutefois, outre la recommandation sur la durée de la formation, il faut considérer la situation dans son ensemble.
En 1993, quand l’internat par rotation d’un an en médecine générale a été abandonné, la Certification du Collège des médecins de famille du Canada et la résidence de 2 ans sont devenues les exigences de facto pour obtenir le permis d’exercice3. Ce changement était motivé par les données probantes et par une vision perspicace, car nos dirigeants ont bien compris qu’une année de médecine générale ne donnait pas aux internes les outils nécessaires pour offrir des soins complets et globaux. Nous voilà, trois décennies plus tard, dans une situation analogue.
Quelle que soit notre opinion sur la durée de la résidence, nous sommes tous d’accord que les connaissances en médecine et les besoins de la société ont évolué. Nous avons donc tout intérêt à nous assurer que la résidence en médecine de famille continue de préparer les résidents à pratiquer partout au Canada et à soigner toutes les populations, les patients, de tout âge peu importe la complexité de leur affection. Telle est, en définitive, la finalité des consultations en cours.
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