Le trouble dépressif majeur est très courant. Chaque année, environ 1 Canadien sur 20 en reçoit le diagnostic, et cette affection est la deuxième cause d’invalidité à l’échelle mondiale1. Il est fréquent que le traitement reste sans résultats, le taux de réponse se situant entre 30 % et 60 % après le traitement antidépresseur initial2-7. Seulement environ 50 % des personnes atteintes d’un trouble dépressif majeur sont en rémission après 2 traitements séquentiels, et environ 30 % ont des symptômes résiduels chroniques2-7. Le terme dépression résistante au traitement est souvent utilisé pour décrire l’absence d’effet acceptable à la suite de l’essai adéquat d’au moins 2 antidépresseurs, mais cette définition n’est pas universellement acceptée3,5,7,8. Il convient de souligner le vaste consensus sur l’importance de l’optimisation du traitement précoce, puisque chaque traitement qui échoue diminue les chances de réussite, augmente le risque de récurrence et décuple le fardeau de la maladie2,4,9,10.
Cet article, fondé sur les données probantes et les lignes directrices existantes8,11-17, présente l’approche mise de l’avant pour la prise en charge de la dépression difficile à traiter (DDT) et l’application des recommandations pratiques à un cas donné. Pour tenir compte des récents changements apportés à la terminologie du domaine, le terme dépression difficile à traiter sera utilisé ici plutôt que celui de dépression résistante au traitement et fera référence à la non-réponse ou à la réponse partielle (c.-à-d. moins de 50 % de diminution de la gravité des symptômes) à au moins un essai adéquat de traitement antidépresseur13.
Présentation du cas
Mia est une personne non binaire de 23 ans qui utilise le pronom « iel » (sexe féminin). Vous lui avez diagnostiqué une dépression modérée à sévère il y a 6 mois, et Mia se présente aujourd’hui pour une visite de suivi. Iel ne présente aucune autre affection. Ses antécédents familiaux comprennent des troubles de santé mentale (sa mère souffre de dépression et d’anxiété, son père a possiblement un trouble bipolaire, et sa sœur a un trouble déficitaire de l’attention avec hyperactivité et de l’anxiété). Mia a participé à 8 séances en ligne de thérapie cognitivo-comportementale de groupe et a suivi un traitement quotidien de 20 mg d’escitalopram pendant 8 semaines, lequel s’est avéré peu bénéfique. Vous lui avez alors prescrit de la venlafaxine qu’iel prend depuis maintenant 6 semaines à raison de 225 mg par jour. Mia ne prend aucun autre médicament, et n’est ni enceinte ni active sexuellement.
Aujourd’hui, Mia signale que, sans se sentir bien, elle constate une légère amélioration. La plupart du temps, Mia ressent encore de la tristesse, de la culpabilité et de l’anhédonie, mais ces sentiments ont été moins accablants dernièrement. Avant, Mia dormait toute la journée; iel est maintenant en mesure de sortir du lit pour quelques heures chaque jour afin d’effectuer des tâches ménagères. La nuit, son sommeil n’est plus marqué d’interruptions. Mia se sent légèrement moins irritable, ce qui aide à réduire les disputes et les confrontations avec ses amis et les membres de sa famille. Mia mentionne avoir plus d’appétit et s’inquiète de prendre du poids. Mia demeure en congé de maladie et ne se sent pas assez bien pour reprendre le travail. Iel a de la difficulté à penser clairement, se sentant trop fatiguée ou sans motivation pour accomplir la plupart des activités quotidiennes, et s’inquiète de ce que ses collègues pourraient en penser.
Réévaluation approfondie
Avant d’ajuster un traitement, il est important de réévaluer l’état du patient et les facteurs pouvant influer sur le traitement8,14. Par exemple, la dose était-elle sousthérapeutique? La durée du traitement était-elle assez longue? Le patient a-t-il respecté la prescription? Parallèlement, des affections médicales ou des médicaments peuvent causer ou empirer la dépression. En outre, il est crucial d’effectuer un examen formel et régulier du patient pour relever tout symptôme de manie ou facteur de risque lié au trouble bipolaire18. Le questionnaire sur les troubles de l’humeur ou encore l’outil de dépistage rapide de l’humeur peuvent contribuer à la réévaluation du patient. Les spécialistes suggèrent également de vérifier s’il y a présence d’agitation, d’irritabilité ou de distractibilité puisque ces symptômes sont des signes potentiels de dépression à manifestations combinées ou d’un trouble bipolaire19-21. Le Tableau 1 présente une liste de questions dont il faut tenir compte.
Questions à prendre en compte avant d’ajuster le traitement d’un patient dont la réponse à un antidépresseur est insuffisante
Retour au cas
Vous demandez à Mia s’iel a bien pris 225 mg de venlafaxine chaque jour, selon la prescription, au cours des 6 dernières semaines. Iel ne prend aucun autre médicament sous ordonnance ou en vente libre pouvant contribuer à ses symptômes dépressifs ou interférer avec le métabolisme de la venlafaxine. Vous questionnez Mia à propos de sa consommation d’alcool et d’autres substances, et apprenez qu’iel boit de 4 à 6 bières par jour, mais ne consomme rien d’autre. Le bilan biologique réalisé il y a 6 mois n’a révélé aucune anomalie. Mia souligne que la vie familiale à la maison n’est « pas géniale », mais que c’est comme ça depuis des années et qu’il n’y a pas de nouveaux agents stresseurs ou revers. Vous remplissez le questionnaire des troubles de l’humeur et le résultat n’indique pas la présence d’un trouble bipolaire. Vous remarquez cependant que Mia ressent de l’irritabilité et de la distractibilité, lesquelles peuvent indiquer une dépression à manifestations combinées. De plus, son hypersomnie et son appétit accru sont des symptômes caractéristiques de la dépression atypique.
Selon Mia, ce qui lui nuit le plus, c’est l’hypersomnie, l’anhédonie et son incapacité à rester concentrée. Iel s’inquiète également des effets de sa maladie sur ses relations. Mia nourrit certaines pensées suicidaires passives, mais affirme ne pas avoir de plans concrets à cet égard. Vers la fin, sa mère se joint à la rencontre et ajoute qu’elle a remarqué une amélioration de l’humeur de Mia et que cette dernière a des relations plus harmonieuses avec les membres de sa famille depuis qu’iel prend de la venlafaxine.
Approche thérapeutique
Après avoir effectué une réévaluation et s’être assuré du respect de la dose thérapeutique sur une période minimale de 4 semaines, il y a 3 options pour prendre en charge la non-réponse du traitement de la dépression : poursuivre le traitement en cours jusqu’à 12 semaines, changer de médicaments (même s’il s’agit d’opter pour un médicament de la même catégorie) ou ajouter un médicament présentant un mécanisme d’action différent. Les lignes directrices internationales soulignent uniformément le manque de données probantes à l’appui du choix systématique d’une stratégie précise; chaque option de traitement peut avoir des bienfaits et il n’y a aucune certitude permettant de conclure qu’une stratégie est supérieure aux autres2,5,8,13,22,23. Les avis sont mitigés sur le fait de retarder le changement du traitement pharmacologique. De nombreuses études montrent qu’une amélioration en début de traitement (c.-à-d. dans les 2 premières semaines) est un bon indicateur de résultats satisfaisants, et c’est pourquoi certains spécialistes suggèrent un changement de médicaments en l’absence de réponse dans les 2 à 4 semaines8,10,24. D’autres études indiquent plutôt que le fait d’attendre 12 semaines avant de modifier le traitement peut améliorer le taux de réponse et que cette période de traitement est bénéfiques dans certains cas, surtout lorsque le patient a déjà essayé 2 antidépresseurs ou plus et qu’il n’y a pas de risques graves pour sa santé2,15,22,25-27. La décision de changer de médicament ou d’en ajouter repose largement sur l’opinion du spécialiste. Le Tableau 2 présente un résumé des recommandations concertées8,15.
Points à prendre en compte pour orienter la stratégie de traitement suivant une réponse insuffisante à un essai d’antidépresseur adéquat
Retour au cas
Vous discutez des prochaines étapes avec Mia. Iel refuse de recevoir toute forme d’aide formelle face à son rapport à l’alcool, mais est d’accord pour mettre les efforts visant à réduire sa consommation. Vous avisez Mia qu’une augmentation de sa dose de venlafaxine n’est pas susceptible de produire de meilleurs résultats et peut entraîner des effets secondaires. Mia préfère modifier sa médication aujourd’hui plutôt que d’attendre 6 semaines de plus. Vous lui suggérez donc de changer d’antidépresseur ou d’ajouter un médicament. Mia ne souhaite pas renoncer aux faibles progrès obtenus avec la venlafaxine, ni recommencer tout le processus avec un troisième antidépresseur en monothérapie. Ensemble, vous convenez d’ajouter un médicament au traitement de venlafaxine.
Choisir un médicament adjuvant
Dans les cas de DDT, peu de données probantes permettent d’orienter le choix d’une médication, et les lignes directrices sur le sujet divergent11-17. Par conséquent, une approche fondée sur le consensus vise à adapter la médication en fonction des symptômes et à tenir compte de la préférence du patient, dans la mesure du possible. La liste ci-dessous a été établie à partir des lignes directrices internationales, d’examens systématiques et d’essais individuels, et présente les médicaments qui se sont avérés efficaces comme adjuvants aux antidépresseurs dans le cas d’une DDT. Pour éclairer le choix de la médication, une comparaison des bienfaits et des effets préjudiciables propres aux médicaments est présentée au Tableau 328-35.
Facteurs pouvant aider à orienter le choix d’un médicament adjuvant dans les cas de DDT
Antipsychotiques. De multiples méta-analyses indiquent que les antipsychotiques atypiques d’appoint sont efficaces, et certaines analyses estiment qu’un patient sur 7 à 12 patients qui suivent un traitement de 4 à 12 semaines répondra partiellement ou complètement au traitement36-40. Cependant, l’incertitude quant à l’importance clinique des résultats en matière d’efficacité, le manque de comparaisons directes avec d’autres options et le fardeau des lourds effets indésirables font en sorte que les antipsychotiques ne sont pas nécessairement un premier choix en tant que traitement d’appoint12,17,36,41,42. Dans les études à court terme, le risque d’abandon du traitement en raison des effets indésirables est de 2 à 6 fois supérieur à celui du placebo, et des effets préjudiciables découlant de l’utilisation à long terme sont bien documentés36-40. Les données probantes sur les antipsychotiques comportent en outre des limitations, notamment la courte durée des études (de 6 à 8 semaines en moyenne), une hétérogénéité élevée au sein des populations de patients et d’une méthode à une autre, l’évaluation inadéquate des répercussions sur le fonctionnement ou la qualité de vie, l’exclusion de participants ayant préalablement répondu au placebo, et un haut taux d’intérêts divergents parmi les auteurs des études. Néanmoins, les antipsychotiques de deuxième et troisième génération, particulièrement la quétiapine et l’aripiprazole, demeurent parmi les choix de première intention en tant que traitement d’appoint des patients atteints de DDT, puisque ces agents, parmi toutes les options, sont étayés sur des données probantes plus rigoureuses8,13-15.
Lithium. Selon les méta-analyses, environ 1 patient sur 3 à 9 patients atteints de DDT pourrait répondre au lithium comme traitement adjuvant sur une période 3 à 6 semaines39,43,44. Bien que le taux de réponse semble comparable à celui d’autres adjuvants, de nombreux essais étaient de courte durée, portaient sur de petits échantillons et visaient l’étude du lithium comme adjuvant aux antidépresseurs tricycliques (ATC)2,39,40,43,44. Des données indiquent que le lithium aurait diminué le taux de mortalité toutes causes confondues (nombre nécessaire à traiter d’environ 36) et qu’il réduit les décès par suicide (nombre nécessaire à traiter d’environ 28) sur une moyenne d’environ 81 semaines, comparativement aux ATC, à la phénelzine et au placebo (données cumulées). Ces données présentent toutefois un faible seuil de confiance en raison de leur hétérogénéité et du fait qu’elles proviennent d’analyses post-hoc45,46. Dans l’ensemble des études cliniques, les taux d’abandon du traitement en raison des effets indésirables étaient de 4 % à 23 %, et entre 20 % à 30 % des patients ont connu un déclin graduel de la fonction rénale sur de nombreuses années (p. ex. ≥ 20 ans), mais l’insuffisance rénale au stade terminal est n’est pas fréquente (0,5 %)44,47-49. Il est recommandé de maintenir le niveau sérique de lithium entre 0,5 et 0,8 mmol/L (principalement pour prévenir la toxicité plutôt que de viser une marge thérapeutique précise). Les lignes directrices canadiennes recommandent le lithium à titre d’adjuvant comme traitement de deuxième intention, alors que les lignes directrices de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande et du Royaume-Uni recommandent le lithium comme traitement de première intention, et que d’autres groupes le classent parmi les choix raisonnables8,12-15.
Bupropion. Bien que courante dans la pratique, l’utilisation du bupropion comme traitement d’appoint chez les patients ayant une DDT ne fait pas l’unanimité. L’efficacité du bupropion est étayée par quelques essais cliniques randomisés ainsi que par la vaste étude naturaliste STAR*D (séquences thérapeutiques possibles pour traiter la dépression)2,50-52. Dans des essais cliniques randomisés réalisés aux États-Unis auprès d’anciens combattants, l’efficacité du bupropion était comparable à celle de l’aripiprazole comme traitement d’appoint53. En revanche, dans une vaste étude menée sur des patients atteints d’une dépression chronique récurrente, l’efficacité du bupropion utilisé comme adjuvant ne se distinguait pas de celle d’un inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine (ISRS) en monothérapie. Un autre essai non publié, commandité par l’industrie, a aussi produit des résultats négatifs, et certaines méta-analyses donnent à croire que l’efficacité du bupropion est équivalente à celle d’un placebo39,40,54,55. Le bupropion est souvent bien toléré. À titre d’adjuvant, les lignes directrices canadiennes classent le bupropion comme un traitement de seconde intention chez les patients atteints d’une DDT; d’autres groupes le classent aussi comme une option8,12,15,17.
Mirtazapine. Les données probantes tirées d’essais randomisés sont insuffisantes concernant l’utilisation de la mirtazapine comme adjuvant chez les patients ayant une DDT. Son efficacité est étayée par un très petit essai clinique randomisé (N = 26) réalisé auprès de patients américains et par un vaste essai clinique randomisé ouvert (N=1646) réalisé au Japon56,57. À l’inverse, un essai clinique randomisé (N=480) mené au Royaume-Uni a produit des données probantes significatives indiquant que l’ajout de la mirtazapine à un ISRS ou un inhibiteur sélectif de la recapture de la noradrénaline (ISRN) n’entraînait pas de meilleurs résultats que la continuité du traitement à l’ISRS ou ISRN58. De même, une étude Cochrane n’a pas permis d’observer d’amélioration des symptômes de dépression comparativement au placebo lorsque la mirtazapine était ajoutée à des ISRS ou des ISRN59. Par ailleurs, l’essai randomisé mené au Japon a permis de constater que, même si l’ajout de la mirtazapine à un ISRS ou ISRN produisait un meilleur résultat que celui d’un placebo, cet ajout équivalait à l’utilisation de la mirtazapine en monothérapie. De plus, certaines études indiquent que le changement de traitement pour utiliser un ATC était tout autant ou plus efficace que l’ajout de la mirtazapine2,57,60,61. Quoi qu’il en soit, la mirtazapine comme adjuvant peut être bénéfique dans certains cas, et sa mise à l’essai ne comporte généralement pas de risques élevés, les taux d’abandon cumulés (pour cause d’effets indésirables ou toute autre raison) n’étant pas statistiquement différents de ceux observés avec un placebo41. Les lignes directrices canadiennes, britanniques et américaines classent la mirtazapine comme traitement de seconde intention, et d’autres lignes directrices la classent aussi comme une option8,12,14.
Autre. Les autres choix d’adjuvants pour les patients ayant une DDT sont moins étayés par des études, et les recommandations qui en découlent varient. L’olanzapine et la rispéridone ont fait l’objet d’études ayant produit des résultats contradictoires ainsi qu’un faible niveau de certitude en ce qui a trait aux résultats positifs36-40,59,62. Il y a moins de données concernant le brexpiprazole et la cariprazine, et les résultats obtenus dans les essais randomisés ne sont pas uniformes39,40,63. L’utilisation de la lamotrigine comme traitement d’appoint s’appuie surtout sur l’opinion d’experts plutôt que sur des données probantes, mais ce médicament est généralement bien toléré et peut avoir des bienfaits chez les patients qui présentent de l’irritabilité ou une humeur instable5,64. La liothyronine (triiodothyronine) peut s’avérer efficace à titre d’adjuvant, surtout dans le cas d’hypothyroïdie infraclinique, et son utilisation est éprouvée; elle est toutefois peu prescrite2,12,49,65,66. Les médicaments à action stimulante comme le modafinil et la lisdexamfétamine peuvent être efficaces contre les symptômes de dépression tels que la fatigue et la concentration altérée, mais les données à l’appui sont insuffisantes et manquent de précision, et les effets cardiovasculaires indésirables ainsi que le risque possible d’un mauvais usage sont préoccupants dans certains cas67,68. Les données sur l’efficacité de la buspirone proviennent d’études ouvertes et de l’essai STAR*D; les études à l’insu n’ont pas révélé de résultats supérieurs comparativement au placebo2,69,70. La kétamine administrée par voie nasale ou intraveineuse a démontré des effets immédiats et significatifs dans la réduction des symptômes de dépression et pourrait être à privilégier pour les patients atteints de dépression réfractaire grave; son efficacité à long terme et l’aspect sécuritaire sont toutefois méconnus, et la difficulté d’accès constitue un obstacle important12,71-74. Bien que ce ne soit pas un traitement pharmacologique, la neurostimulation, comme la stimulation magnétique transcrânienne répétitive et l’électroconvulsothérapie, peut être une option efficace à prendre en compte pour les patients qui ont déjà fait l’essai de 2 ou 3 médicaments75,76.
Retour au cas
Vous passez en revue les options susmentionnées avec Mia pour décider du médicament d’appoint qui lui convient le mieux. Vous éliminez d’emblée le bupropion en raison de la consommation d’alcool de Mia ainsi que la mirtazapine, qui est susceptible d’amplifier ses symptômes d’hypersomnie et son appétit. Vous envisagez ensuite la quétiapine et l’aripiprazole. Vous examinez les facteurs de risques cardiovasculaires et métaboliques de Mia et jugez qu’ils sont faibles. Comparativement à la quétiapine, l’aripiprazole pourrait avoir un effet favorable sur l’hypersomnie de Mia, sa concentration et son appétit. La quétiapine pourrait être une option équivalente pour les caractéristiques combinées de la dépression, mais elle présente un risque accru de sédation et de gain pondéral. Le lithium pourrait aider à améliorer l’irritabilité et la suicidalité de Mia; mais iel préfère le profil d’effets secondaires des antipsychotiques atypiques. Vous n’envisagez pas les autres médicaments d’appoint, puisqu’ils ne sont pas étayés par des données aussi rigoureuses. Vous abordez ensuite l’aspect de l’abordabilité et apprenez que les dépenses en médicaments de Mia sont couvertes en vertu du régime d’assurance médicaments de sa mère. De concert avec Mia, vous choisissez de lui prescrire une dose quotidienne de 2 mg d’aripiprazole comme médicament adjuvant à la dose quotidienne de 225 mg de venlafaxine.
Conseils pratiques pour la prescription et la surveillance des antipsychotiques d’appoint
Pour les personnes qui ont une DDT, les antipsychotiques d’appoint sont typiquement prescrits à la dose la plus faible, puis la dose est progressivement augmentée jusqu’à l’obtention du résultat visé. Les doses plus élevées de l’intervalle étiqueté (Tableau 3)28-35 n’ont pas invariablement démontré une efficacité supérieure, tout en augmentant le risque lié à la plupart des effets indésirables77. Envisagez le recours à des soins fondés sur les mesures à l’appui de l’évaluation clinique (p. ex. le questionnaire sur la santé du patient – Qsp9, l’inventaire de dépression de Beck, l’inventaire rapide de symptomatologie dépressive, l’échelle des observations cliniques générales)8,16,78. Afin de faire le suivi de l’efficacité thérapeutique dans les cas de DDT, il est utile d’établir des objectifs visant des symptômes précis, le fonctionnement global et les résultats qui importent au patient, plutôt que de chercher une rémission complète des principaux symptômes de la dépression79,80. Il est nécessaire de surveiller les effets indésirables au niveau métabolique, cardiovasculaire et neurologique (Tableau 4)81-84, de même que le niveau de tolérance générale (p. ex. effets sédatifs, effets anticholinergiques, dysfonction sexuelle). Revenez régulièrement sur le sujet avec vos patients pour voir s’ils sont disposés à ajouter la psychothérapie à l’approche de traitement globale et cherchez des stratégies ou des interventions autres que pharmacologiques pouvant entraîner des bienfaits85,86.
Suivi suggéré des paramètres chez les patients auxquels des antipsychotiques de deuxième et troisième génération ont été prescrits : un tiret indique que le test n’est pas nécessaire.
Résolution du cas
Vous discutez d’objectifs précis en mettant l’accent sur les capacités fonctionnelles et les résultats qui importent à Mia (pouvoir sortir du lit sans trop de difficulté avant 11 h, diminuer les disputes avec sa mère et sa sœur, être en mesure de se concentrer sur les activités de la vie quotidienne et en tirer du plaisir). Vous consignez les constatations de base pertinentes. Vous conseillez à Mia de surveiller tout effet secondaire, comme l’akathisie, une sédation ou une agitation accrues, un gain de poids ou des changements au niveau de l’impulsivité. Vous lui fournissez de l’information sur diverses stratégies non pharmacologiques et l’encouragez à poursuivre la psychothérapie. Vous planifiez un suivi avec Mia dans 2 semaines.
Conclusion
La dépression peut être difficile à traiter adéquatement, et peu de données probantes en éclairent le traitement pharmacologique. À la lumière d’une réévaluation approfondie et de l’ensemble des facteurs contributifs, l’approche thérapeutique et le choix de la médication devraient être personnalisés en fonction des données probantes et des facteurs cliniques, tout en respectant la préférence du patient. Offrez des stratégies non pharmacologiques qui conviennent le mieux au patient et recommandez la psychothérapie. En ce qui concerne les médicaments adjuvants, les cliniciens doivent faire preuve de prudence dans l’interprétation de la littérature, prescrire des antipsychotiques de manière sélective et arrêter toute médication qui n’apporte pas de bénéfices ou dont les risques connexes l’emportent sur les bénéfices. Il est essentiel d’effectuer une surveillance des symptômes, des effets secondaires, du risque de suicide et de la capacité à fonctionner du patient.
Footnotes
Remerciements
Nous remercions les personnes suivantes pour leur aide dans la révision du présent article : Loren Regier, Marlys LeBras, Kit Shan Lee et Helen Lowry.
Intérêts concurrents
Le Programme de formation continue en pharmacothérapie RxFiles est financé par l’entremise d’une subvention des Autorités sanitaires de la Saskatchewan à l’Université de la Saskatchewan; les autres recettes « sans but lucratif ni perte de bénéfice » proviennent de la vente de livres et des abonnements en ligne. Aucune aide financière externe n’a été obtenue pour ce manuscrit. Dans le cadre de travaux non liés au présent manuscrit, Amy Soubolsky a reçu des honoraires à titre de coéditrice d’un chapitre du Clinical Handbooks of Psychotropic Drugs, 25e édition. Tous les autres auteurs ont déclaré n’avoir aucun intérêt concurrent.
Cet article donne droit à des crédits d’autoapprentissage certifiés Mainpro+. Pour obtenir des crédits, allez à https://www.cfp.ca et cliquez sur le lien vers Mainpro+.
The English version of this article is available at https://www.cfp.ca on the table of contents for the November 2023 issue on page 777.
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