Ces derniers mois, j’ai beaucoup réfléchi à ce qui m’apporte de la joie dans mon travail. Quand je rencontre des membres partout au pays, beaucoup me demandent si j’apprécie mon mandat de présidente du CMFC. Cette question récurrente m’a fait réfléchir : qu’est-ce qui, dans mon travail quotidien, me fait sourire et me rend heureuse?
La situation actuelle à laquelle font face les médecins de famille reste difficile. La crise en médecine de famille1 se poursuit. Les résultats de l’enquête du Fonds du Commonwealth de 2022 sont alarmants : au Canada, 3 médecins de soins primaires interrogés sur 4 ont affirmé que la qualité des soins de santé s’était détériorée depuis le début de la pandémie de COVID-192, plus de la moitié d’entre eux ont exprimé leur insatisfaction quant au temps consacré aux tâches administratives2 et près de la moitié se sentent épuisés3. Comparativement à la période prépandémie, 3 médecins sur 4 ont déclaré que leur charge de travail avait augmenté, tandis que 4 sur 5 ont expliqué que leurs revenus avaient stagné ou diminué3. Rien d’étonnant à ce que nous ayons de la difficulté à penser à la joie au travail, et cela reste pourtant essentiel.
Il est prouvé que le fait de ressentir de la joie au travail améliore notre bien-être et la santé de nos patients et patientes. Selon un livre blanc de l’Institute for Healthcare Improvement (IHI) publié en 2017, la joie au travail « a non seulement un impact sur la satisfaction et l’engagement de chacun des membres du personnel, mais aussi sur l’expérience des patients, la qualité des soins, la sécurité des patients et le rendement de l’organisation4 ». Il s’agit également d’un élément important pour nos apprenants. Un étudiant en médecine m’a dit récemment qu’il songeait à s’orienter vers la médecine de famille, mais que le stress et la frustration qu’il avait perçus chez son superviseur lors d’un stage dans une pratique communautaire l’inquiétaient. Malheureusement, je pense qu’il s’agit là de quelque chose de courant. C’est également pour cette raison que prendre le temps de se concentrer sur ce qui nous rend heureux dans la vie est tout aussi important que notre travail de prestataires de soins et promoteurs d’un meilleur système de soins de santé.
Alors, comment retrouver de la joie dans son travail? Dernièrement, l’un de nos membres a tenu à remercier le CMFC pour le message de soutien que le Dr Lawrence C. Loh et moi-même avions adressé aux membres à l’occasion de la Journée mondiale des médecins de famille, et dans lequel nous avions évoqué les difficultés rencontrées par les médecins de famille au Canada. Dans son courriel, il disait qu’il ne se sentait plus frustré ni fatigué depuis qu’il avait adapté ses heures de travail et retrouvé un équilibre dans sa vie. Reprendre le contrôle de ses heures de travail est un moyen de retrouver de la joie, mais ce n’est pas une possibilité pour tout le monde.
Que pouvons-nous faire d’autre pour retrouver et cultiver la joie dans notre travail? Outre son livre blanc4, l’IHI a publié des lignes directrices visant à promouvoir la santé mentale et le bien-être chez les professionnels de la santé5. Ce sont là deux excellentes ressources dont je vous recommande la lecture. Le livre blanc de l’IHI propose une approche en 4 étapes « pour retrouver, encourager et cultiver la joie » chez les professionnels de la santé4. Chaque étape sert de base à la suivante. Le livre blanc s’adresse aux leaders, mais le cadre qui y est décrit m’a personnellement été très utile. La première étape consiste à se poser la question suivante : qu’est-ce qui compte pour vous?
En y réfléchissant, j’ai pu mettre le doigt sur ce qui me fait sourire dans ce travail difficile, ce qui me rend heureuse et ce que je peux entreprendre pour cultiver la joie sur mon lieu de travail. Pour moi, ce sont les gens qui m’entourent et les relations que j’entretiens : je ressens de la joie quand j’échange avec mes patients, mes collègues et les apprenants. Désormais, lorsque j’ai une journée difficile au travail, j’essaie de me concentrer sur les personnes qui m’entourent plutôt que sur les tâches interminables que j’ai à accomplir.
Le travail du CMFC pour remédier à la crise en médecine de famille se poursuit. Pour notre bien-être, pour la santé de nos patients et pour donner de l’espoir aux apprenants, je vous invite à prendre le temps de réfléchir à ce qui compte pour vous et à y consacrer un peu d’énergie pour retrouver de la joie dans votre travail.
Footnotes
This article is also in English on page 583.
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