
Ce mois-ci marque le cinquième anniversaire du premier cas signalé dans un hôpital de Toronto (Ontario), où je vis et travaille, de ce qui s’est appelé par la suite la COVID-191.
Vous rappelez-vous où vous étiez lorsque vous avez entendu parler du premier cas de COVID-19 (ou vu votre premier)? Moi, oui. J’étais dans un restaurant à célébrer un anniversaire familial quand la nouvelle est tombée2. Ayant travaillé comme médecin lors de pandémies antérieures, à commencer par la crise du sida, cette nouvelle a assombri le reste de la soirée. Pourtant, je réalisais seulement vaguement ce qui allait arriver. Le reste, comme on dit, est passé à l’histoire.
À long terme, allons-nous collectivement nous souvenir de la pandémie de COVID-19 et de ses terribles répercussions sur les gens et les communautés dans le monde entier? Mettrons-nous en application ce que nous avons appris et serons-nous mieux préparés pour l’inévitable prochaine pandémie?
L’histoire prouve que non, et l’amnésie populaire s’installe déjà3. Il n’y a rien de surprenant, compte tenu de l’amnésie collective qui s’est produite après la pandémie d’influenza, en 1918. En Angleterre, par exemple, on peut trouver presque dans tous les villages des monuments commémorant ceux qui ont servi ou qui sont morts durant la Grande Guerre, mais les hommages à ceux qui sont décédés durant la pandémie d’influenza se retrouvent surtout sur des tombes, dans des cimetières isolés4. Plus près de chez nous, aux premiers jours de la COVID-19, on nous a précisément rappelé les leçons dont nous n’avons pas tenu compte après la pandémie du SRAS en 20035,6.
Pour ne pas oublier les impacts et les leçons de la pandémie de COVID-19, ce numéro du Médecin de famille canadien (MFC) présente un rapport du groupe consultatif scientifique ontarien de lutte contre la COVID 19, maintenant dissolu, par la Dre Danielle Martin et ses collègues, sur les soins primaires durant la COVID-19 et au-delà, de même que les leçons apprises en Ontario (page 32)7.
Il s’agit d’un article important comportant plusieurs sérieuses constatations. Le premier message, et le plus évident, est que les soins primaires, desquels les médecins de famille font partie intégrante, étaient et sont toujours un point d’entrée crucial dans le système de santé, tant pour la COVID-19 (les Centers for Disease Control and Prevention des États-Unis ont qualifié la COVID-19 comme endémique dans le monde entier)8 que pour les autres soins. Le deuxième est qu’en dépit des ressources limitées, les médecins de famille et d’autres cliniciens des soins primaires ont exercé des rôles clés dans la réponse à la pandémie, notamment dans le dépistage, les traitements, la vaccination, le soutien au système, le maintien de la santé et la restauration des soins qui ne sont pas liés à la COVID-19. La COVID-19 a été un test d’endurance pour les soins primaires et, comme le souligne le rapport, elle a révélé le profond décalage entre la taille et la répartition des effectifs en soins primaires et les besoins de la population. En réponse, les auteurs avancent que, pour concrétiser la vision de soins primaires pour tous, il faudra l’élargissement des soins en équipe et d’autres mesures de soutien pour accroître la capacité des cliniciens, une meilleure intégration avec les hôpitaux et d’autres secteurs ainsi qu’une robuste planification des ressources humaines de la santé7.
En plus de notre engagement à nous souvenir et à apprendre de la pandémie, le MFC, comme toujours, est déterminé à soutenir les lecteurs dans les soins aux patients. Ce numéro présente une révision clinique par le Dr Philippe Harris et ses collèges, intitulé « Lésions blanches courantes dans la cavité buccale. Revue des tableaux cliniques et prise en charge » (page e7)9, un domaine négligé dans l’éducation et la formation médicales. En ces temps où les relations entre les médecins de famille et nos autres collègues spécialistes ont parfois été tendues, l’étudiante en médecine Helen Jin partage ses réflexions sur la présence persistante des messages du cursus caché durant la formation prédoctorale en médecine, qui dévalorisent la médecine familiale, et suggère des façons de les temporiser (page e4)10.
Enfin, pour améliorer la sélection du contenu de la recherche dans la revue et s’harmoniser avec d’autres revues en médecine familiale qui publient des recherches, le MFC présente dans un article Regard (page e19) une déclaration sur l’adoption des lignes directrices CRISP (Consensus Reporting Items for Studies in Primary Care). Les lignes directrices CRISP ont été conçues pour rehausser les rapports de la recherche en soins primaires et sont utiles pour réviser les manuscrits, concevoir des études et enseigner les méthodes de recherche. L’intégration des lignes directrices CRISP au MFC compte parmi les nombreuses façons dont la revue témoigne de son engagement à soutenir l’amélioration continue des soins aux patients.
Footnotes
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