Abstract
Objectif Mettre en évidence la nécessité grandissante d’une meilleure éducation sur les soins du prépuce chez les patients et les professionnels de la santé, surtout à la lumière du déclin des taux de circoncisions néonatales.
Sources de l’information Cette révision se fonde sur les constatations tirées d’une recension dans la base de données MEDLINE des ouvrages sur les soins du prépuce pénien, les complications au prépuce et leur prise en charge. Les articles ont été passés en revue pour évaluer leur pertinence, et la qualité des données probantes a été indiquée entre parenthèses dans la révision. Lorsqu’elles étaient disponibles, les données probantes tirées des revues systématiques, des lignes directrices de pratique clinique et des essais randomisés contrôlés étaient incorporées. En l’absence de données probantes de haut niveau, l’opinion d’experts était mentionnée.
Message principal Étant donné le déclin des taux de circoncisions néonatales, l’importance de renseigner les patients sur les soins appropriés du prépuce devient de plus en plus essentielle pour éviter des complications plus tard dans la vie. Cette révision met en évidence le rôle des cliniciens de soins primaires à titre de ressources essentielles dans l’éducation des patients. En se fondant sur les données probantes disponibles, les éléments suivants sont examinés : les taux de circoncisions au Canada et les pratiques actuelles en la matière; les recommandations sur les soins routiniers du prépuce; et les complications courantes au prépuce, y compris les infections des voies urinaires, le phimosis pathologique, le balanoposthite, le lichen scléroatrophique pénien (balanite xérotique oblitérante) et le cancer du pénis.
Conclusion Cette révision a exploré les tendances et les pratiques courantes entourant la circoncision, les soins de routine du prépuce et les complications courantes observées chez les patients non circoncis. Une meilleure éducation est nécessaire et elle doit être élargie aux autres professionnels de la santé qui travaillent avec des patients dans des établissements de santé. Les cliniciens des soins primaires jouent un rôle important pour éduquer les patients et donner des recommandations sur l’hygiène appropriée du pénis.
Les taux de circoncisions néonatales systématiques sont en déclin en Amérique du Nord1-4. Il y a des lacunes dans les connaissances générales et une absence de consensus chez les cliniciens quant aux recommandations concernant les soins routiniers du prépuce. La plupart des données disponibles insistent sur les soins du prépuce durant la petite enfance. Étant donné cette tendance, il devient de plus en plus important pour les fournisseurs de soins primaires de faire de l’éducation sur les soins habituels du prépuce à toutes les étapes de la vie des patients. Dans cette révision, nous visons à cerner les tendances actuelles en matière de circoncision, à présenter des recommandations sur les meilleures pratiques en hygiène du prépuce et à explorer les complications potentielles liées au prépuce plus tard dans la vie (Encadré 1).
Résumé des recommandations : Le niveau des données probantes est indiqué entre parenthèses.
Durant la petite enfance, le prépuce ne doit pas être rétracté avec force, pour éviter des microdéchirures et une cicatrisation pouvant entraîner un phimosis pathologique (niveau 2)
La plupart des cas de phimosis physiologique se résorberont sans intervention (niveau 2)
Le counseling concernant le moment où le prépuce devrait être rétractable doit se fonder sur une approche centrée sur le patient et insister sur l’éducation—éviter une rétraction traumatique—et les signes pathologiques exigeant une intervention, plutôt que sur un seuil strictement basé sur l’âge (niveau 3)
Il n’est pas recommandé de circoncire systématiquement tous les nouveau-nés de sexe masculin (niveau 3)
Pour minimiser la nécessité d’une circoncision chez les adultes, il y a lieu d’envisager la promotion des soins et de l’hygiène appropriés du prépuce, de même qu’une plus grande sensibilisation aux complications courantes au prépuce (niveau 3)
Les soins du prépuce doivent commencer dès la naissance, par une hygiène génitale régulière. Lorsque le prépuce est rétractable, on peut enseigner à l’enfant à le rétracter délicatement et de le laver à l’eau. Une fois asséché, le prépuce doit toujours être repositionné par-dessus le gland (niveau 3)
Une rétraction régulière du prépuce durant le bain ou la douche aide à réduire l’accumulation de smegma et l’inflammation, et elle prévient aussi le phimosis pathologique et les adhérences (niveau 2)
Les corticostéroïdes topiques sont un traitement de première intention sûr et efficace contre le phimosis physiologique (niveau 1)
La circoncision systématique pour prévenir les infections des voies urinaires n’est pas recommandée (niveau 3)
Il y a lieu de dépister le diabète chez les patients atteints d’un phimosis pathologique (niveau 2)
Il est indiqué de demander une consultation en urologie pour un phimosis dans les cas suivants : un phimosis pathologique réel avec une cicatrisation évidente de l’anneau préputial ou la présence d’une balanite xérotique oblitérante, des épisodes récurrents de balanite, des érections douloureuses secondaires à un prépuce serré ou des infections des voies urinaires récurrentes (niveau 3)
Le ballonnement du prépuce à lui seul (p. ex. sans autres signes de phimosis pathologique) n’est pas associé à l’obstruction de la miction et n’est pas un problème pour lequel une circoncision est indiquée (niveau 2)
Il faut conseiller aux patients atteints d’un lichen scléroatrophique pénien de s’autoexaminer régulièrement pour détecter des lésions préoccupantes, étant donné le risque accru de cancer du pénis plus tard dans la vie (niveau 3)
Il faut conseiller aux patients de toujours remettre le prépuce à sa position anatomique, par-dessus le gland, après une rétraction pour prévenir un paraphimosis (niveau 3)
Il faut envisager une demande de consultation pour les patients qui ont des épisodes récurrents de paraphimosis, en vue d’une éventuelle circoncision comme traitement définitif (niveau 3)
Les patients dans les établissements de santé devraient recevoir des soins d’hygiène du pénis réguliers s’ils ne peuvent pas s’en occuper eux-mêmes (niveau 3)
Après des soins d’hygiène du pénis dispensés par des membres de l’équipe de soins de santé, le prépuce doit toujours être remis dans sa position anatomique—réduit par-dessus le gland—et ce, après chaque séance d’hygiène, pour éviter un paraphimosis (niveau 3)
Les patients dans les établissements de soins de longue durée qui nécessitent une sonde vésicale à demeure sont particulièrement à risque d’un paraphimosis; ce risque doit être pris en compte dans les soins d’hygiène et les examens physiques par les équipes de soins de santé pour assurer que le prépuce est bien réduit (niveau 3)
Sources de l’information
Cette révision se fonde sur les constatations tirées d’une recension dans la base de données MEDLINE des ouvrages scientifiques sur les soins du prépuce pénien, les complications liées au prépuce et leur prise en charge. Les articles ont été passés en revue pour évaluer leur pertinence, et la qualité des données probantes est indiquée entre parenthèses tout au long de l’article (Encadré 2). Lorsqu’elles étaient disponibles, les données probantes tirées des revues systématiques, des lignes directrices de pratique clinique et des essais randomisés contrôlés étaient incorporées. En l’absence de données probantes de haut niveau, l’opinion d’experts est mentionnée.
Niveaux des données probantes selon le Médecin de famille canadien
Niveau 1 : Au moins 1 essai randomisé contrôlé, une revue systématique ou une méta-analyse effectués de manière appropriée
Niveau 2 : D’autres essais comparatifs; des études non randomisées, de cohortes, cas-témoin ou épidémiologiques; et préférablement plus de 1 étude
Niveau 3 : L’opinion d’experts ou des déclarations consensuelles
Message principal
Évolution naturelle du prépuce et phimosis physiologique. Le prépuce est l’enveloppe de peau rétractable qui recouvre le gland. À la naissance, le prépuce adhère naturellement au pénis et est formé d’une couche extérieure et intérieure que sépare le fascia dartos3. Durant l’enfance, il est conseillé de ne pas rétracter avec force le prépuce, étant donné l’adhérence du prépuce interne au gland par une muqueuse épithéliale, connue sous le nom de phimosis physiologique (niveau 2)3-5. La rétraction forcée du prépuce cause des microdéchirures de l’orifice préputial, entraînant une cicatrisation et un éventuel anneau phimotique5. Avec le temps, les érections de réflexe et l’accumulation de smegma, un exsudat blanc contenant des cellules cutanées et de la kératine, facilitent la séparation naturelle de l’épithélium et du gland3-6. Il faut rassurer les patients en leur disant que l’accumulation de smegma est un phénomène naturel qui aide le prépuce à se dégager du gland. Ce processus peut se poursuivre jusqu’à tard dans l’adolescence et, chez la plupart des garçons, le phimosis physiologique disparaîtra avec le temps (niveau 2)5,6. L’âge auquel disparaît le phimosis varie grandement. En 1949, Gairdner a rapporté que la séparation complète de l’adhérence se produisait habituellement avant l’âge de 3 ans chez 90 % des garçons7. En 1968, Oster a fait valoir qu’environ 4 % des écoliers entre 6 à 17 ans avaient un prépuce non rétractable6. Une étude publiée en 2006 par Hsieh et ses collègues signalait que l’incidence d’un prépuce normal, soit la visibilité du gland entier une fois le prépuce rétracté, se situait à 8,2 % à l’âge de 7 ans, à 21,0 % à 10 ans et à 58,1 % à 13 ans (Tableau 1)8. Par conséquent, le counseling concernant l’âge auquel le prépuce devient rétractable devrait se fonder sur une approche centrée sur le patient et insister sur l’éducation afin d’éviter une rétraction traumatique, de même que sur les signes pathologiques exigeant une intervention plutôt que sur un seuil strictement basé sur l’âge (niveau 3). Nous recommandons de rassurer les patients en leur disant que le phimosis physiologique asymptomatique est normal chez les garçons et disparaît habituellement sans intervention. Par ailleurs, des discussions s’imposent avec les parents de garçons porteurs d’anomalies des voies urinaires (hydronéphrose anténatale, reflux vésico-urétéral de haut grade, valves de l’urètre postérieur et méga-uretère primaire), parce que la circoncision néonatale aurait un plus grand effet sur la prévention des infections des voies urinaires (IVU) dans cette population3.
Incidence du phimosis physiologique selon l’âge
Taux et pratiques de circoncision en Amérique du Nord. La décision de procéder ou non à une circoncision néonatale demeure un choix parental personnel, et les 2 options demeurent courantes. Au Canada, on estimait que les taux de circoncisions se situaient entre 51 et 67 % en 1970, chutant à 31,9 %, selon les estimations actuelles, peut-être en raison des croyances parentales et des situations démographiques changeantes3,9. Compte tenu du déclin dans le nombre des circoncisions néonatales, il est de plus en plus nécessaire d’offrir de l’éducation sur les soins de routine du prépuce et sur la prise en charge des complications connexes durant toutes les étapes de la vie.
La circoncision néonatale systématique fait l’objet de débats depuis des années. La Société canadienne de pédiatrie ne recommande pas la circoncision néonatale systématique (niveau 3)2. L’analyse en profondeur de ce sujet dépasse la portée de la présente révision et a été présentée ailleurs2,3. Parmi les bienfaits proposés de la circoncision, mentionnons la réduction du risque d’IVU, de l’infection au VIH, de la prévalence du virus du papillome humain (VPH), de l’incidence du VPH, de l’infection au virus de l’herpès simplex et du cancer du pénis3. Cependant, étant donné les faibles taux de ces événements en Amérique du Nord et la disponibilité d’options non chirurgicales pour prévenir les infections (p. ex. utilisation du condom), la circoncision néonatale systématique demeure injustifiée selon les données probantes disponibles3.
Quoiqu’elle soit généralement considérée comme sécuritaire, la circoncision n’est pas sans complications. Dans une récente méta-analyse de 351 études auprès de plus de 4 millions d’hommes de tous âges, les risques de complications exigeant un traitement étaient de 3,84 %10. Ce risque augmente lorsque la circoncision est effectuée en raison d’une maladie du prépuce10. Les complications les plus fréquentes sont les saignements, le retrait d’un dispositif, les infections, les adhérences et la sténose du méat10.
La circoncision chez l’adulte est souvent effectuée en raison de douleurs ou d’un inconfort causés par le phimosis, la récurrence du paraphimosis ou de la balanite, ou encore d’un cancer. Les patients qui s’informent à propos de l’intervention posent souvent des questions concernant la douleur et la fonction sexuelle après la circoncision. La douleur à la suite de l’intervention est de légère à modérée et est atténuée par des techniques comme un bloc pénien durant l’opération. Dans une étude observationnelle prospective de cohortes auprès de patients adultes ayant subi une circoncision, une douleur sévère signalée par le patient était rare et presque toujours associée à une infection ou à une complication de la plaie11. La durée du congé de maladie est variable, mais de 4 à 5 jours sont recommandés pour les activités qui ne sont pas physiquement exigeantes et de 7 à 14 jours pour les activités physiques exigeantes11. En ce qui a trait à la fonction sexuelle, des études font valoir que la circoncision n’a pas d’effets indésirables sur le fonctionnement, la sensibilité ou le plaisir sexuel12-17. Quoi qu’il en soit, pour éliminer entièrement la nécessité d’une circoncision chez les adultes, une stratégie potentiellement efficace serait de promouvoir davantage les soins et l’hygiène appropriés du prépuce, et de mieux sensibiliser les patients et les professionnels de la santé aux complications courantes au prépuce (niveau 3).
Soins du prépuce. Il est important que les médecins procèdent à un examen approprié des patients qui ont des préoccupations liées au prépuce. Il faut demander au patient de rétracter eux-mêmes leur prépuce, s’ils en sont capables. Du smegma peut être observé sous le prépuce. Un prépuce normal ne porte pas de signe évident d’une pâle cicatrisation à l’orifice préputial. On examine le gland sous le prépuce et on prend note de la localisation du méat urétral. Si le prépuce ne peut pas être rétracté, il ne faut jamais exercer de force, pour éviter des microdéchirures à l’orifice préputial. (Les rencontres avec le patient pour des inquiétudes liées au prépuce présentent d’excellentes occasions de discuter des soins du prépuce.)
Les ouvrages scientifiques sur les soins et l’hygiène appropriés du prépuce sont limités et comprennent principalement des études en milieux pédiatriques. Dans une étude comparative chez des hommes adultes circoncis et non circoncis, il était moins probable que les hommes non circoncis se lavent régulièrement le pénis en entier, y compris en rétractant le prépuce18. Cette constatation est corroborée dans nos propres cliniques, où de nombreux adultes non circoncis ignorent comment bien prendre soin de leur prépuce ou en sont mal informés. Un comportement sous-optimal en matière d’hygiène du pénis a été associé à un risque accru de complications au prépuce, comme la balanite18. Les soins du pénis devraient commencer dès la naissance, accompagnés d’une hygiène génitale régulière. Lorsque le prépuce est rétractable, on peut enseigner à l’enfant à le rétracter délicatement et à le laver à l’eau. Une fois séché, le prépuce devrait être ramené pour couvrir le gland (niveau 3)3,5,19,20. Le savon et les produits d’hygiène peuvent irriter le prépuce et le méat urétral21. Il faut expliquer aux patients qu’une rétraction délicate du prépuce et un rinçage avec un jet d’eau de la douche ou tandis que le pénis est immergé dans le bain est tout ce qu’il faut.
Il est essentiel de maintenir de bonnes habitudes d’hygiène jusque dans la vie adulte. La rétraction régulière du prépuce devrait être intégrée dans les pratiques d’hygiène à long terme des patients non circoncis, car elle a été associée à une réduction de l’accumulation de smegma, de l’inflammation, du phimosis pathologique et des adhérences (niveau 2)22. Dans une étude de cohortes auprès de 48 patients aux États-Unis (âge allant de 2 semaines à 52 ans), il a été démontré que le lavage du gland 2 à 3 fois au minimum par semaine et une rétraction délicate du prépuce peuvent réduire l’incidence des problèmes courants du prépuce, comme le phimosis23. En outre, les patients qui se lavaient tandis que le prépuce était rétracté étaient moins susceptibles d’avoir des adhérences ou un phimosis que ceux qui ne le faisaient pas. Parmi ces patients, 20 (41,7 %) se souvenaient avoir reçu d’un médecin ou d’un professionnel de la santé le conseil d’essayer de doucement rétracter le prépuce pendant qu’ils se lavaient, 7 (14,6 %) avaient été conseillés de se laver sans rétraction du prépuce et 19 (39,6 %) n’avaient jamais reçu d’instructions. Ces observations mettent en évidence certaines lacunes dans les soins préventifs, et renforcent la nécessité de soins et d’une hygiène convenables du prépuce chez les patients non circoncis, de même que l’importance de bonnes instructions de la part des professionnels de la santé, pour éviter des complications plus tard dans la vie.
Traitement du phimosis physiologique. Le phimosis physiologique asymptomatique ne nécessite pas de traitement et se résorbe habituellement avec le temps. Les lignes directrices de l’Association des urologues du Canada sur les prépuces normaux chez les nourrissons canadiens indiquent qu’il pourrait y avoir un rôle pour les corticostéroïdes topiques si la rétraction du prépuce est retardée au-delà de 8 à 10 ans3. Les corticostéroïdes topiques amincissent la peau du prépuce et oblitèrent la couche cornée, ce qui permet une délicate rétraction avec le temps, et ils sont considérés comme un traitement de première intention efficace pour le phimosis physiologique (niveau 1)3. Une récente revue Cochrane portant sur 14 essais randomisés contrôlés (1459 patients de 18 ans ou moins) a fait valoir que les corticostéroïdes topiques, comparés à un placebo ou à l’absence de traitement, pourraient augmenter la fréquence d’une rétraction complète ou partielle du prépuce après 4 à 8 semaines de traitement24. En outre, les corticostéroïdes topiques peuvent aussi accroître la probabilité d’une résolution à long terme du phimosis à 6 mois ou plus après le traitement24. Les corticostéroïdes topiques les plus souvent utilisés dans les essais randomisés contrôlés étaient le bétaméthasone et le propionate de clobétasol24. Le lichen scléroatrophique pénien, ou balanite xérotique oblitérante, résiste habituellement aux corticothérapies topiques; il y a lieu de demander une consultation pour une évaluation dermatologique ou urologique dans de tels cas5. Pour que le traitement réussisse, il est essentiel de suivre rigoureusement les instructions pour une application correcte du médicament, et les médecins devraient expliquer clairement la façon de le faire3,25. Nous recommandons de rincer le prépuce à l’eau 2 fois par jour, d’assécher la surface, puis de rétracter délicatement le prépuce autant que possible sans inconfort avant d’appliquer avec précision une mince couche du corticostéroïde topique à la marge phimotique25-27. Le prépuce devrait aussi être rétracté avec délicatesse plusieurs fois par jour une fois le traitement commencé, en particulier lors de la miction et durant le bain ou la douche quotidiens25-27. Notre pratique est de prescrire du clobétasol à 0,05% 2 fois par jour pendant 8 semaines, et nous offrons à ceux dont les symptômes ne s’améliorent pas un deuxième cycle de traitement, si désiré. Par la suite, les patients sont réévalués et nous procédons par observation ou nous discutons de circoncision avec les patients, selon leur préférence.
Complications des pénis non circoncis. Les complications sont nombreuses, notamment les IVU, le phimosis pathologique, le lichen scléroatrophique ou balanite xérotique oblitérante, le cancer du pénis, la balanoposthite et le paraphimosis.
Infection des voies urinaires : Il a été démontré que la circoncision néonatale réduisait le risque d’IVU; toutefois, le risque global d’IVU est faible chez les nourrissons et diminue avec l’âge 3. L’Association des urologues du Canada ne recommande pas la circoncision systématique pour la prévention des IVU (niveau 3)3.
Phimosis pathologique : Le phimosis pathologique et le phimosis acquis sont des expressions synonymes qui désignent l’incapacité de rétracter le prépuce par-dessus le gland du pénis en raison d’une ouverture préputiale serrée ou étroite qui se développe à la suite d’une cause secondaire (Figure 1). Parmi les causes courantes d’un phimosis acquis figurent l’inflammation chronique, la balanoposthite, la rétraction forcée du prépuce entraînant une cicatrisation, le lichen scléroatrophique et le diabète sucré28. Il faudrait envisager de dépister le diabète chez les patients souffrant d’un phimosis acquis, car il a été démontré qu’un nouveau diagnostic de diabète peut être dépisté chez 8 % de ceux qui ont un phimosis acquis, même sans antécédent de diabète (niveau 2)29.
Phimosis pathologique chez un homme plus âgé non circoncis portant les signes habituels d’un lichen scléroatrophique, notamment une cicatrisation blanche et un épaississement du prépuce
Il est indiqué de demander une consultation en urologie pour les patients ayant un phimosis dans les cas suivants : un phimosis pathologique avec une cicatrisation évidente de l’anneau préputial ou la présence d’une balanite xérotique oblitérante, des épisodes récurrents de balanite, des érections douloureuses secondaires à un prépuce serré ou des IVU récurrentes (niveau 3)5. La caractérisation du phimosis comme étant pathologique ou physiologique demeure un défi diagnostique pour les médecins. Après un examen en urologie, la plupart des demandes de consultation pour un phimosis dans le contexte pédiatrique se sont avérés de nature physiologique, et seulement 14,4 % ont donné lieu à une circoncision30. Le motif mentionné dans les demandes est souvent un « ballonnement » du prépuce, ce qui peut être alarmant pour les patients. Par ailleurs, le ballonnement est un phénomène sans danger et n’est pas associé à une miction obstruée; ce n’est pas nécessairement un signe de phimosis pathologique ou un problème pour lequel la circoncision est indiquée, s’il est la seule préoccupation (niveau 2)4,31.
Lichen scléroatrophique pénien (balanite xérotique oblitérante) et cancer du pénis : Le lichen scléroatrophique du pénis est un problème inflammatoire chronique de la peau affectant le gland et le prépuce28. Il peut entraîner une cicatrisation de l’anneau préputial et un phimosis pathologique32. La cause exacte n’est pas connue, mais des antécédents de blessures traumatiques ou un processus auto-immun pourraient jouer un rôle28. Le lichen scléroatrophique est un facteur de risque d’un carcinome épidermoïde (CE) du pénis et de sténose urétrale. En Amérique du Nord, le CE du pénis lui-même est rare, et ses facteurs de risque incluent le tabagisme, l’inflammation chronique, la balanite, le lichen scléroatrophique pénien, le phimosis, une mauvaise hygiène, l’absence de circoncision durant l’enfance et les maladies transmises sexuellement, comme l’infection au VIH33. Cela souligne encore plus la nécessité d’une hygiène et de soins appropriés du pénis. Des études ont identifié un lichen scléroatrophique pénien préexistant dans 28 à 50 % des cas de CE du pénis34-37. Le temps moyen pour que le cancer se développe après l’apparition du lichen scléroatrophique est de 10 à 34 ans, et nous recommandons de conseiller aux patients de s’autoexaminer régulièrement (niveau 3)28,32.
Balanoposthite : La balanoposthite désigne une inflammation à la fois du gland et du prépuce. Il a été démontré qu’un diagnostic de balanite est plus probable chez des patients non circoncis que chez ceux qui le sont18. Le problème se produit souvent en raison d’une mauvaise hygiène, et le traitement consiste en un lavage et une application d’onguent antibactérien (niveau 3)5. Dans le cas d’épisodes récurrents de balanoposthite, il est indiqué de demander une consultation en urologie, car elle peut entraîner des cicatrices et un phimosis pathologique5.
Paraphimosis : Un paraphimosis est un problème dans lequel le prépuce, une fois rétracté derrière le gland du pénis, devient coincé et ne peut plus être remis dans sa position originale. Il s’ensuit une enflure et une compression du prépuce derrière le gland, entraînant de potentielles complications, comme une mauvaise circulation sanguine, de la douleur et de l’inflammation. Le paraphimosis est considéré comme une urgence médicale, et une intervention rapide est nécessaire pour atténuer le problème. La plupart des cas peuvent être réglés manuellement en appliquant une pression constante sur le gland et la peau en état de constriction afin de réduire l’œdème, puis en utilisant les pouces pour pousser fortement le gland tandis que les doigts tirent le prépuce par-dessus le gland5. En cas d’échec, il peut être nécessaire d’effectuer une circoncision ou une incision dorsale pour réduire le prépuce. Il faudrait conseiller aux patients de toujours remettre le prépuce à sa position anatomique couvrant le gland après une rétraction afin de prévenir un paraphimosis (niveau 3). Il y a lieu de demander une consultation en urologie pour ceux qui ont des épisodes récurrents de paraphimosis et d’envisager la circoncision comme option de traitement définitif (niveau 3).
Soins du prépuce dans des populations particulières. L’hygiène du pénis est une priorité sanitaire durant toute la vie d’un patient. C’est d’autant plus important dans des populations en particulier, incluant, sans s’y limiter, les résidents dans des établissements de santé et ceux ayant des incapacités intellectuelles ou physiques, une démence, la maladie de Parkinson ou des antécédents d’accident vasculaire cérébral. Il importe aussi de sensibiliser les aidants dans ces milieux à une hygiène appropriée du pénis. Une étude réalisée en Australie auprès du personnel responsable des soins à des patients ayant une déficience intellectuelle a fait valoir une absence généralisée de politiques, de formation et de conseils professionnels sur l’hygiène du pénis38. Les patients dans des établissements de santé devraient recevoir régulièrement des soins d’hygiène du pénis par les équipes de santé s’ils n’ont pas la capacité de s’en occuper eux-mêmes (niveau 3). Il est recommandé que le personnel infirmier et les travailleurs de soutien nettoient les organes génitaux des patients durant les soins d’hygiène habituels39. Le prépuce devrait toujours être remis dans sa position anatomique (p. ex. repositionné par-dessus le gland) après chaque séance d’hygiène pour éviter un paraphimosis (niveau 3). Les patients en établissements de soins de longue durée qui ont besoin d’une sonde vésicale à demeure sont particulièrement à risque d’un paraphimosis, surtout après un lavage du pénis lorsque le prépuce pourrait ne pas être réduit de manière appropriée40. Après l’entretien de la sonde, nous recommandons d’examiner le pénis pour assurer que le prépuce a bien été repositionné (niveau 3). Chez les patients porteurs d’une sonde, il faut enlever tout dépôt de smegma au méat urétral pour prévenir une ascension de bactéries dans l’urètre39. Les médecins devraient savoir quelles sont les personnes à risque de complications au prépuce et préconiser des pratiques systématiques d’hygiène du pénis.
Conclusion
Cette révision a exploré les tendances et les pratiques actuelles en matière de circoncision, les soins de routine du prépuce et les complications courantes observées chez les patients non circoncis. Nous avons déterminé qu’il fallait une meilleure éducation à cet égard qui rejoigne aussi les autres professionnels de la santé qui travaillent auprès des patients en établissements de santé. Les cliniciens des soins primaires ont un rôle important à jouer pour faciliter l’éducation des patients et présenter des recommandations sur une hygiène appropriée du pénis.
Notes
Points de repère du rédacteur
▸ L’éducation concernant les soins du prépuce commence durant l’enfance, notamment la rétraction délicate et le nettoyage à l’eau du prépuce. Le savon et les produits d’hygiène peuvent irriter le prépuce et le méat urétral, et il est donc conseillé de les laver à l’eau seulement. Le prépuce devrait toujours être réduit pour couvrir le gland après le lavage et le séchage. Des soins appropriés doivent se poursuivre durant toute la vie, parce qu’une rétraction régulière du prépuce réduit l’accumulation de smegma, l’inflammation, le phimosis pathologique et les adhérences.
▸ La plupart des cas de phimosis physiologique se résorberont sans intervention. Le counseling par des médecins de soins primaires devrait insister sur l’évitement de la rétraction traumatique, les bonnes techniques d’hygiène et les signes pathologiques exigeant une intervention. Comme traitement de première intention, les cliniciens peuvent offrir un régime de corticostéroïdes topiques pour le phimosis physiologique incommodant. On peut prescrire un deuxième cycle de traitement aux patients dont les symptômes ne s’améliorent pas.
▸ L’hygiène du pénis est particulièrement importante dans les milieux de soins de santé où les patients pourraient être incapables de s’en occuper eux-mêmes. Les professionnels de la santé dans ces établissements devraient s’assurer que le prépuce est ramené à sa position anatomique après le lavage pour prévenir un paraphimosis. Chez les patients porteurs d’une sonde, il est nécessaire d’enlever le smegma sur le méat urétral pour prévenir l’ascension bactérienne. Les médecins devraient préconiser des pratiques systématiques d’hygiène du pénis dans de tels milieux pour prévenir les complications.
Footnotes
Collaborateurs
Tous les auteurs ont contribué à la revue de la littérature scientifique et à la préparation du manuscrit aux fins de soumission.
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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