Question clinique
Quand faudrait-il que j’évalue la capacité d’un patient à prendre des décisions et comment devrais-je aborder la discussion?
Résultats
Les questions entourant la capacité à prendre des décisions peuvent préoccuper considérablement les patients, leur famille et leurs professionnels de la santé. Les lois s’appliquant à la prise de décisions médicales varient selon la province, et les cliniciens devraient donc être au courant des lois en vigueur là où ils travaillent. Il vaut mieux évaluer la capacité en fonction de décisions précises, et tous les médecins peuvent le faire pour des décisions médicales en particulier; ils le font très souvent sans nécessairement être conscients du processus. On définit communément la capacité comme l’aptitude d’une personne à comprendre les renseignements pertinents à la prise d’une décision personnelle dans un domaine précis et à évaluer raisonnablement les conséquences de la décision. Dans une entrevue d’évaluation de la capacité, on doit examiner le contexte, les choix et les conséquences.
Données probantes
Une capacité décisionnelle déficiente chez un patient peut découler de processus développementaux ou pathologiques, d’une déficience cognitive, de troubles neurocognitifs ou d’une lésion cérébrale1,2.
La capacité de prendre des décisions est un enjeu important pour le système de santé3,4.
Comme l’espérance de vie des Canadiens et la prévalence de la déficience cognitive continuent d’augmenter, les professionnels de la santé verront de plus en plus de situations dans lesquelles la capacité doit être prise en compte1,2.
Ce sujet fait l’objet d’un article dans le Canadian Geriatrics Society Journal of CME5.
Approche
Dans certaines provinces canadiennes, les professionnels de la santé procèdent à une évaluation de la capacité décisionnelle pour déterminer si des éléments de preuve suffisants justifient de déclarer un patient inapte à s’occuper de ses affaires. Une conclusion d’incapacité permet au mandataire du patient d’agir en son nom en respectant les souhaits de ce dernier6. Dans l’ensemble des provinces et des territoires, lorsqu’il existe des préoccupations entourant l’aptitude d’une personne à comprendre et à soupeser les aspects d’une décision médicale en particulier, les médecins doivent évaluer et documenter sa capacité.
Quand faut-il évaluer la capacité de prise de décisions médicales? Sur le plan juridique et éthique, les médecins tiennent compte de la capacité chaque fois qu’ils discutent de soins médicaux avec un patient. La famille ou les aidants, les médecins impliqués ou d’autres professionnels de la santé peuvent remettre en question l’aptitude d’une personne à comprendre et évaluer une décision médicale. Un faible score à un test cognitif peut soulever des inquiétudes, mais il doit être considéré dans le contexte de la personne elle-même (y compris son niveau d’éducation et son fonctionnement antérieur).
La capacité devrait être formellement évaluée lorsqu’un patient adopte des comportements ou prend des décisions qui mettent le patient ou d’autres à risque; quand un diagnostic de démence ou une réduction de la fonction cognitive causent des inquiétudes entourant une prise de décisions altérée en se fondant sur la connaissance de déficits cognitifs ou de préoccupations antérieures; ou si un patient fait des choix médicaux non conformes aux valeurs qu’il avait auparavant6,7. Lorsque les cliniciens constatent que le patient a de la difficulté à comprendre les discussions concernant les traitements, il y a lieu d’évaluer la capacité sous-jacente.
Les étapes de l’évaluation de la capacité. L’évaluation de la capacité comporte 3 étapes (Figure 1)6. L’étape 1 est de s’assurer qu’il y a un motif valable de procéder à l’évaluation. L’étape 2 consiste à stabiliser le patient au besoin en recueillant des renseignements et en réglant des problèmes. Par exemple, si un patient qui vit seul laisse le four de la cuisinière allumé, des minuteries ou la livraison de repas peuvent être recommandées. À l’étape 3, une entrevue d’évaluation de la capacité ne devrait être effectuée qu’en dernier ressort, lorsque des solutions aux problèmes ou des stratégies de rechange n’éliminent pas les préoccupations. Aucun test cognitif ne pourra déterminer si un patient a la capacité de prendre des décisions, et c’est pourquoi il est essentiel de recueillir des renseignements et d’apporter des solutions aux problèmes.
Processus d’évaluation de la capacité
Les cliniciens devraient évaluer si une constatation de capacité réduite est probablement limitée dans le temps ou si elle sera présente pour une durée prolongée (p. ex. delirium par rapport à démence), car cette conclusion pourrait influer sur l’approche adoptée. De plus, chaque province et territoire a des lois sur la façon de procéder après qu’un patient est réputé inapte à prendre une décision médicale. Par exemple, il est généralement obligatoire qu’un professionnel de la santé informe le patient de son constat et le renseigne sur les voies à suivre pour faire appel de cette décision.
Mise en application
Des modèles d’entrevues peuvent être utilisés, ou l’entrevue peut se concentrer sur le contexte, les choix et les conséquences (les « 3 C »). Après avoir informé le patient de ses options, les cliniciens devraient s’interroger à savoir si le patient connaît :
le contexte ou les problèmes en cause;
les choix ou les options possibles pour chacun des problèmes;
les conséquences de choisir ou de ne pas choisir une option.
Cette approche concorde avec d’autres définitions de la capacité qu’on désigne habituellement comme l’aptitude d’une personne à comprendre les renseignements qui sont appropriés à la prise d’une décision personnelle dans un domaine précis et à évaluer les conséquences raisonnablement prévisibles de la décision. La compréhension peut être déterminée en validant les connaissances factuelles et l’aptitude à saisir la nature d’une décision. L’évaluation peut être catégorisée comme la capacité du patient à déterminer les conséquences de la décision et à justifier son choix8. L’Aide à l’évaluation de la capacité (https://www.cmpaacpm.ca/static-assets/pdf/education-and-events/resident-symposium/aid_to_capacity_evaluation-f.pdf) peut être utile pour mesurer la capacité à prendre des décisions médicales spécifiques.
Notes
Les Perles gériatriques sont produites de concert avec le Canadian Geriatrics Society Journal of CME, une revue révisée par des pairs publiée par la Société canadienne de gériatrie (http://www.geriatricsjournal.ca). Les articles font la synthèse des données probantes tirées des articles publiés dans la revue Canadian Geriatrics Society Journal of CME et présentent des approches pratiques à l’intention des médecins de famille qui soignent des patients âgés.
Footnotes
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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