Question clinique
Les patients à faible risque qui sont allergiques aux β-lactamines peuvent-ils subir sans danger un test de provocation orale à une β-lactamine?
Résultats
Chez les adultes qui ont eu une réaction cutanée non grave à une β-lactamine plus de 5 à 10 ans auparavant, on peut retirer l’étiquette d’alerte pour l’allergie à la pénicilline dans 87 à 98 % des cas. La réalisation d’un test de provocation orale directe à une β-lactamine est probablement aussi sûre et efficace que celle d’un test cutané en premier lieu. Le risque de réaction indésirable grave est inférieur à 1 %.
Données probantes
Test de provocation orale seul par rapport à un test cutané suivi (s’il est négatif) d’un test de provocation orale :
- Deux essais cliniques randomisés (ECR) réalisés auprès de patients recrutés dans des cliniques d’allergie externes et ayant subi une réaction cutanée non grave à une β-lactamine plus de 1 an auparavant (enfants)1 ou plus de 10 ans auparavant (adultes)1,2.
— Lors d’un ECR (382 adultes) portant sur la prise de 250 à 500 mg d’amoxicilline2, il n’y a eu aucun effet indésirable grave, aucune hospitalisation ni aucune visite à l’urgence. L’étiquette d’alerte pour l’allergie à la pénicilline a été retirée dans plus de 98 % des cas dans les deux groupes. Il y a eu une réaction à médiation immunitaire dans chaque groupe (cutanée, légère) moins d’une heure après le test. Il y a eu une éruption cutanée ou une urticaire retardées dans 3,2 % des cas par rapport à 1,6 % des cas quand le test cutané avait été réalisé en premier lieu (aucune différence statistique).
— Lors d’un ECR (159 adultes et enfants) portant sur la prise de 20 à 40 mg d’amoxicilline, puis de 200 à 400 mg 30 minutes plus tard1, la réaction est survenue moins de 30 minutes après le test chez 4 % des patients (cutanée, légère) par rapport à 0 % quand le test cutané avait été réalisé en premier lieu (aucune différence statistique; calcul du groupe PEER). L’étiquette d’alerte pour l’allergie à la pénicilline a été retirée dans 96 % des cas par rapport à 87 % des cas, aucune différence statistique.
Test de provocation orale sans test cutané préalable :
- Six revues systématiques d’études de cohorte réalisées auprès d’enfants et d’adultes, des patients externes pour la plupart (de 2 à 31 cohortes, de 595 à 6980 tests de provocation orale)3-8 :
- Réactions d’hypersensibilité immédiates ou retardées dans 2,7 à 8,8 % des cas3-7.
- Réactions graves (exemples : anaphylaxie nécessitant l’administration d’adrénaline, réaction de type maladie sérique, néphrite interstitielle) dans 0 à 0,04 % des cas6-8. Autre revue systématique : incohérence de la présentation des résultats3.
Limitations : Plusieurs définitions de patient à faible risque et de préjudice (exemple : anaphylaxie); données limitées dans le contexte des soins primaires.
Contexte
Environ 10 % des gens déclarent une allergie à la pénicilline9. La prise, par des patients, d’antibiotiques à large spectre contenus dans des flacons portant des étiquettes d’alerte aux allergies erronées a été associée à des hospitalisations plus longues, à un risque accru d’infection à Clostridium difficile et à une hausse des frais médicaux10.
L’amoxicilline est associée à une éruption cutanée non induite par les immunoglobulines E (apparition retardée) chez 7 % ou moins des enfants. Il y a habituellement présence d’une infection virale concomitante10.
Mise en application
Les lignes directrices recommandent la réalisation d’un test de provocation directe à l’amoxicilline (sans test cutané préalable) chez les adultes ayant des antécédents lointains (plus de 5 ans auparavant) de réaction cutanée bénigne aux β-lactamines10. Une option serait la prise de 250 à 500 mg d’amoxicilline, suivie d’une période d’observation d’une heure (avec disponibilité d’un antihistaminique et d’adrénaline). Comme les ECR ont été réalisés dans des cliniques spécialisées et non dans le contexte des soins primaires, le renvoi vers une telle clinique constituerait aussi une option raisonnable. Chez les adultes ayant des antécédents d’anaphylaxie ou de réaction récente induite par les immunoglobulines E, il faut procéder à un test cutané avant un test de provocation orale10. Les patients ayant des antécédents de réaction cutanée grave aux β-lactamines (exemples : syndrome d’hypersensibilité médicamenteuse avec éosinophilie et symptômes systémiques, syndrome de Stevens-Johnson) ne doivent pas être testés et ne doivent pas prendre de β-lactamines10.
Notes
Les articles d’Outils pour la pratique dans le MFC sont une adaptation d’articles révisés par des pairs qui se trouvent à http://www.toolsforpractice.ca et résument les données médicales probantes susceptibles de modifier la pratique des soins primaires. Coordonnés par la Dre Adrienne J. Lindblad, les articles sont élaborés par l’équipe du groupe PEER (Patients, Expérience, Évidence, Recherche) et soutenus par le Collège des médecins de famille du Canada et ses sections de l’Alberta, de l’Ontario et de la Saskatchewan. Vos commentaires sont les bienvenus à toolsforpractice{at}cfpc.ca.
Footnotes
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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