Les patients admis dans les centres d’accueil de nos jours sont plus malades que jamais, affirme Dr Nicholas Cristoveanu. Environ 70 % d’entre eux sont atteints de démence ou de déficience cognitive à un certain degré. C’est la réalité.» Il a observé ces changements de ses propres yeux. Depuis les 25 dernières années, Dr Cristoveanu occupe le poste de directeur médical au centre d’accueil Rideaucrest pour personnes âgées à Kingston, en Ontario, en plus de travailler au sein de son groupe de pratique familiale très occupé.
Dr Cristoveanu épouse la politique préconisant «aucune mesure de contention», physique ou chimique, dans la mesure du possible. «Il faut utiliser les médicaments très judicieusement, explique-t-il. Plutôt qu’opter pour une pharmacothérapie, nous cherchons à discerner les nuances comportementales et à déterminer ce qui pourrait déclencher les crises. Il faut beaucoup de travail de détective pour trouver une solution non pharmaceutique.»
Dr Cristoveanu creuse loin dans les antécédents de ses patients, se fiant à ses années d’expérience et aux contributions des autres membres de l’équipe du Rideaucrest, pour trouver des façons d’établir une connexion. «J’avais une patiente atteinte de démence qui ne pouvait plus parler. Je lui ai alors demandé de chanter et elle pouvait interpréter «Danny Boy» du début à la fin, en suivant parfaitement les notes, racontet-il. Pour un bref instant, nous pouvions apercevoir la personne qu’elle avait été jadis.»
Son travail au Rideaucrest a aussi beaucoup aidé Dr Cristoveanu dans sa pratique familiale. «L’Alzheimer n’est pas un tumeur sur lequel on fait une biopsie. Il faut rassembler tous les indices pour compléter le portrait clinique», dit-il. En pratique familiale depuis 1981, Dr Cristoveanu soigne maintenant les enfants, et même quelques petits-enfants, de ses premiers patients. Il a aussi vu ses patients plus âgés vieillir et perdre lentement leur autonomie. «La pratique familiale procure la continuité et une perspective plus large. Au fil des ans, elle révèle ce qui se passe dans une famille», indique-t-il.
Dr Cristoveanu se souvient d’une visite à domicile faite il y a longtemps chez un patient qui en était aux premiers stades de la maladie de Parkinson. Sur le mur du salon se trouvait une magnifique photo d’un golden retriever et ils ont commencé à «parler chiens». Lorsque l’état de son patient s’est détérioré au point de l’amener au Rideaucrest, «je me suis souvenu de cette visite et j’ai alors amené avec moi Fergus, le golden retriever de la famille, au centre d’accueil, raconte Dr Cristoveanu. Ce fut une magnifique expérience pour nous tous».
C’est ainsi qu’on établit des connexions. Parfois, on perçoit le portrait global en se rappelant des petits portraits sur le mur.
«Il faut rassembler tous les indices pour compléter le portrait clinique»
Footnotes
Dr Cristoveanu est médecin de famile à la Frontenac Medical Associates Clinic et directeur médical au centre d’accueil Rideaucrest à Kingston, en Ontario.
PHOTOS: Sarah Rouleau, Kingston, Ont
STORY/TEXTE: William M. Glenn, Toronto, Ont
LE PROJET DE LA PAGE COUVERTURE Le Médecin de famille canadien a entrepris un projet visant à tracer le portrait de la médecine familiale au Canada. La page couverture de la revue met en vedette un médecin de famille choisi au hasard dans notre liste de membres. Un court texte donne un bref aperçu de la personne et de sa pratique. Avec le temps, cette sélection aléatoire deviendra représentative, car les différences, rassemblées, feront ressortir ce que tous les médecins de famille ont en commun.
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