La gingivostomatite herpétique primaire est une infection pédiatrique courante causée dans 90 % des cas par le virus de l’herpès simplex de type 1. Ce problème est habituellement observé chez les moins de 6 ans1. Bien que la plupart des enfants soient asymptomatiques, le diagnostic dans cette population est posé en fonction de la présentation clinique de gencives érythémateuses, d’hémorragies des muqueuses et de grappes de vésicules éruptives dans la bouche.
Cette affection est très contagieuse1 et les complications varient de boutons de fièvre indolents1 à la déshydratation2 et peuvent même aller jusqu’à une encéphalite possiblement mortelle3. Dans une étude en Israël, parmi 61 enfants de 1 à 6 ans, 89 % buvaient moins que la normale et 2 patients sur 36 étaient incapables de boire2.
Le soulagement des symptômes consiste principalement à contrôler la douleur et à prendre des liquides par voie orale pour prévenir la déshydratation jusqu’à ce que l’infection virale disparaisse. Un examen des dossiers d’enfants vus à un hôpital aux États-Unis révélait que 48 patients de 8 mois à 12 ans avaient été traités avec des liquides et des analgésiques; on a aussi administré à 35 d’entre eux un mélange d’antiacide et de diphenhydramine, et 7 ont été traités avec de la lidocaïne visqueuse4. Les résultats obtenus n’étaient pas signalés.
Il est bien établi que l’acyclovir est un médicament antiviral utilisé efficacement dans le traitement des infections à l’herpès simplex, de la varicelle (durée de fièvre plus courte)5 et du zona5,6. On l’utilise aussi fréquemment pour des enfants immunodéficients.
Traitement à l’acyclovir
Malgré l’incidence élevée et la charge de morbidité considérable de cette maladie virale, peu de recherches ont été effectuées pour déterminer l’utilité d’une thérapie antivirale.
Une étude ouverte durant les années 1980 auprès de 33 enfants a fait valoir que l’acyclovir était associé à la disparition de la fièvre après 3 jours et à une amélioration considérable (90 %) des lésions buccales et de la douleur après 6 jours7. Une étude rétrospective effectuée en Italie8 signalait que parmi 162 jeunes enfants, la régression des symptômes était plus rapide chez ceux traités à l’acyclovir pendant 5 à 6 jours que chez ceux qui ne recevaient pas de thérapie antivirale.
Dans une des seules 3 études randomisées9, publiée sous forme d’affiche à une conférence et portant sur 68 enfants qui se sont présentés dans les 96 heures suivant l’apparition des symptômes, des réductions significatives de l’ordre de 20 à 50 % ont été observées dans la durée moyenne des symptômes chez ceux qui recevaient de l’acyclovir (p < ,05). Les lésions buccales se résorbaient plus vite avec l’acyclovir (6 c. 8 jours). L’enflure des gencives et l’écoulement de bave disparaissaient plus rapidement (5 c. 7 jours et 4 c. 8 jours respectivement) et l’excrétion virale arrêtait plus tôt (4 c. 10 jours).
Une autre étude auprès d’un plus petit échantillon10 de 11 garçons et 9 filles (âge moyen de 2 ans) atteints d’une infection herpétique primaire depuis moins de 4 jours a été effectuée en France (la durée moyenne des symptômes avant le traitement était de 2,5 jours). Bien que les enfants qui avaient pris de l’acyclovir souffraient plus souvent de fièvre que ceux ayant reçu un placebo, la plupart de leurs caractéristiques étaient semblables. La douleur disparaissait plus rapidement avec l’acyclovir (p < ,05), mais les auteurs n’ont pas expliqué la façon dont ils ont mesuré ce paramètre. Pareillement, l’écoulement de bave avait disparu plus rapidement (p < ,05). Par ailleurs, le retour à l’alimentation normale, la durée avant de revenir à une température normale et la mesure des lésions dans plusieurs endroits de la bouche étaient semblables dans les 2 groupes.
La troisième étude randomisée, effectuée en Israël durant les années 1990, examinait 61 enfants de 1 à 6 ans2. Les 2 groupes présentaient des symptômes cliniques de gravité semblable et ont reçu soit de l’acyclovir en suspension (15 mg/kg [0,375 ml/kg]) ou un placebo 5 fois par jour pendant 7 jours. On a observé que les lésions buccales des enfants prenant de l’acyclovir guérissaient plus vite (moyenne de 4 c. 10 jours), la fièvre disparaissait plus rapidement (1 c. 3 jours), les lésions hors de la bouche s’amélioraient (0 c. 5,5 jours), ces enfants s’alimentaient (4 c. 7 jours) et buvaient mieux (3 c. 6 jours). De plus, l’excrétion virale de l’herpès était de plus courte durée dans le groupe prenant de l’acyclovir (1 c. 5 jours).
Dans un résumé des 2 dernières études11 par Cochrane en 2008, seule l’étude par Amir et coll.2 était considérée de qualité acceptable par les réviseurs qui ont conclu qu’il y avait un faible avantage à recourir à l’acyclovir durant les 3 premiers jours des symptômes.
Conclusion
En se fondant sur la recherche très limitée, PRETx suggère de traiter les enfants à l’acyclovir, mais seulement si moins de 72 heures se sont écoulées depuis l’apparition des symptômes de gingivostomatite et s’ils souffrent de douleurs considérables ou de déshydratation. La posologie actuellement recommandée d’acyclovir par voie orale est de 40 à 80 mg/kg par jour, divisée en 3 ou 4 doses pendant 7 jours. Les soignants doivent être au courant des effets indésirables potentiels de l’acyclovir comme la céphalée, des malaises et des vomissements.
Notes
PRETx Pediatric Research in Emergency Therapeutics
Mise à jour sur la santé des enfants est produite par le programme de recherche en thérapeutique d’urgence pédiatrique (PRETx à www.pretx.org) du BC Children’s Hospital à Vancouver, en Colombie-Britannique. Le Dr Goldman est directeur du programme PRETx. Le programme PRETx a pour mission de favoriser la santé des enfants en effectuant de la recherche fondée sur les données probantes en thérapeutique dans le domaine de la médecine d’urgence pédiatrique..
Avez-vous des questions sur les effets des médicaments, des produits chimiques, du rayonnement ou des infections chez les enfants? Nous vous invitons à les poser au programme PRETx par télécopieur au 604 875-2414; nous y répondrons dans de futures Mises à jour sur la santé des enfants. Les Mises à jour sur la santé des enfants publiées sont accessibles dans le site web du Médecin de famille canadien (www.cfp.ca).
Footnotes
Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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Références
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