D’après le docteur Turcotte, ce programme «n’aura aucun impact sur le risque absolu de mortalité» et, pour cette raison, devrait être proscrit parce qu’il irait à l’encontre d’un principe de la pratique de la santé publique. Aucune référence ne supporte cette affirmation. Et son application rigoureuse provoquerait l’abolition de la plupart des programmes de santé publique en vigueur au Canada. Comme l’auteur accepte que 30% des décès par cancer colorectal (CCR) seront éliminés par ce programme, il est difficile de comprendre comment l’on peut rejeter une mesure qui éviterait environ 3000 décès prématurés par année.
Le deuxième argument a trait à l’anxiété engendrée chez les faux positifs. À ce sujet, le docteur Turcotte omet de mettre en contrepartie l’anxiété des personnes qui auront à vivre le lent déclin causé par un CCR métastatique diagnostiqué trop tard et les souffrances qui accompagnent ce déclin. Il néglige aussi de tenir compte de l’anxiété et des souffrances morales de la famille et des proches. S’il existe une situation «cauchemardesque», comme le mentionne l’auteur, elle se situe plutôt de ce côté que de celui du dépistage.
Le troisième argument invoque l’utilisation inappropriée des ressources du système de santé. Encore là, aucune mention n’est faite du coût qu’engendreront l’investigation, les traitements longs et coûteux de chirurgie, de radiothérapie et de chimiothérapie qu’impliquera la découverte de lésions à un stade plus avancé que le stade T1N0M0. D’un point de vue strictement économique, 111 300 années potentielles de vie perdues sont attribuées au CCR1. En supposant qu’un programme de dépistage permette de sauver 30% de ces années, ce sera 33 390 années de vie supplémentaires qui seront ainsi gagnées. Au Canada, si on établit à 50 000$ la valeur seuil acceptable d’un investissement en santé pour chaque année de vie additionnelle, cela représenterait une valeur de 1 700 000 000$ (111 300 x 30% x 50 000$). Pour une telle somme, il ne fait aucun doute que les autorités de santé seraient en mesure d’offrir à tous les Canadiens d’excellents programmes de dépistage du CCR.
Footnotes
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This article is also in English on page 674.
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Intérêts concurrents
Aucun déclaré
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Ces réfutations sont les réponses des auteurs aux débats dans le numéro de avril (Can Fam Physician 2008;54:508–11).
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