Si ce sentiment fataliste convient aux imprévus de la vie, ce n’est pas le cas de l’avenir de la médecine familiale. Je suis fermement convaincue que nous pouvons créer ce futur, mais peut-être en agissant différemment.
Nous savons tous que moins de MF offrent des soins périnatals, hospitaliers et d’urgence, des interventions ou des services de garde. Certains décideurs semblent persuadés que d’autres professionnels de la santé peu-vent se substituer aux MF. Si l’adaptation est un impéra-tif de l’évolution, quelle forme prendrait la pratique des MF en 2020?
Prudence dans vos souhaits
Dr Z exerce dans un petit groupe de MF rémunérés selon un régime mixte. Ses dossiers médicaux électroniques font le suivi des paiements, mais leur utilité est entravée par un manque de compatibilité avec l’hôpital et la pharmacie. Sa pratique a pris de l’âge, une conséquence des soins préventifs maintenant assurés par les infirmières praticiennes en cliniques, parce qu’il n’y a pas assez de MF pour dispenser les services nécessaires. Beaucoup de MF consacrent une part considérable de leur temps à des pratiques ciblées. On ne se sert d’aucun modèle pour estimer les besoins d’effectifs médicaux.
Dr Z a abandonné l’obstétrique depuis longtemps. Il voit en majorité des patients ayant de multiples problèmes médicaux, qui consultent aussi d’autres professionnels. Il ne sent plus la même connexion avec eux, parce qu’il ne participe pas à tous leurs soins. Ses patients plus âgés disent qu’aucun de leurs nombreux fournisseurs de soins ne les connaît bien. Non seule-ment a-t-il l’impression de ne plus s’occuper du bien-être des patients, mais les soins sont aussi devenus très fragmentés dans de multiples cliniques spécialisées. Il n’est pas certain de savoir comment promouvoir la médecine familiale aux étudiants à qui il enseigne, parce que le slogan traditionnel—tout est dans la relation—ne semble plus s’appliquer. La proportion d’étudiants qui choisissent la médecine familiale n’a pas beaucoup augmenté au cours de la dernière décennie.
Demain appartient à ceux qui se préparent aujourd’hui
Comment en arriver à un autre résultat? Imaginons que les intervenants forment un collectif pour dresser le plan de la pratique familiale future au Canada. En se fondant sur des données probantes, les universités révisent les critères d’admission pour attirer ceux qui sont plus susceptibles de choisir la médecine familiale et ainsi s’acquitter de l’imputabilité sociale. Des décisions sont prises au sujet des valeurs fondamentales qui doivent être maintenues en médecine familiale. La continuité est considérée une composante essentielle des soins centrés sur le patient. La disponibilité des programmes de perfectionnement avancé est proportionnelle aux besoins de la population. Les soins interprofessionnels sont appuyés de manière à assurer que les MF ont accès aux autres professionnels de la santé au sein de leur pratique existante. Le mantra de la décennie précédente—fournisseur approprié au problème approprié—est modifié pour tenir compte de l’importance de la relation médecin-patient dans un milieu de soins en équipe.
Des leaders cliniciens en motivent d’autres à alimenter l’innovation. La rémunération prévoit l’évaluation de la pratique et le changement continu. Le régime de rémunération mixte est flexible et prévoit l’imputabilité, notamment certains indicateurs de qualité. Les patients savent qui est leur médecin, qui sont leurs infirmières et que l’équipe communique bien.
Les médecins de famille participent activement à l’enseignement prédoctoral. Un groupe national de collaboration estime le nombre de médecins dans chaque spécialité. Parce qu’il a anticipé le vieillissement de la population au pays, les stratégies de prise en charge des maladies chroniques sont bien intégrées dans chaque pratique. Toutes les composantes des dossiers médicaux électroniques sont compatibles.
De quoi a l’air cet avenir pour Dr Z? Il travaille dans une équipe de 5 et partage ses ressources avec un autre groupe de la ville. Il y a 5 infirmières ayant des spécialisations particulières qui vont d’une clinique à l’autre. Un conseiller en santé mentale et un pharmacien desservent la clinique chaque semaine. Une infirmière coordonne les soins à domicile. Certains membres du groupe offrent des soins intra-partum dans une clinique d’obstétrique dirigée par des MF et reçoivent une compensation additionnelle pour leur temps. La clinique prolonge ses heures d’ouverture 2 fois par semaine et est ouverte les fins de semaine. Étant plusieurs et avec une rémunération en surplus pour ce service, ce n’est pas trop onéreux. La couverture après les heures est assurée par un service de triage téléphonique et une clinique de soins urgents. Les patients savent qu’on répond à leurs besoins dans le contexte de leur chez-soi médical. On évalue souvent les indicateurs, la conformité des patients et les résultats. Les professionnels investissent beaucoup dans l’amélioration des soins. Grâce à la visibilité accrue et au respect de la médecine familiale dans les facultés de médecine ainsi qu’à une rémunération équivalente à celle de la plupart des autres spécialistes, le recrutement en médecine familiale est à son meilleur.
Quel avenir vous et vos patients préféreriez-vous?
Footnotes
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This article is also in English on page 845.
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