Chers collègues,
Une abondance de données fait état de l’importance d’un système de soins primaires solide et du rôle des médecins de famille pour améliorer la santé de la population1,2. Selon les résultats de l’enquête du Fonds du Commonwealth, les adultes âgés au Canada sont plus susceptibles que ceux des autres pays d’indiquer que leur fournisseur de soins primaires adopte une approche de soins axée sur la personne et les oriente efficacement dans le système de santé lorsqu’ils doivent être recommandés en spécialité3. Pour leur part, les Canadiens adultes de tout âge estiment que les soins offerts par leur médecin de famille sont largement supérieurs à la moyenne4. Or, nous savons que le Canada a du retard sur les autres pays en matière de l’accès aux soins, des soins prodigués en équipe et de la communication entre fournisseurs de soins et avec les patients4. Pour mieux comprendre la situation, mettre sur pied un programme de transformation et évaluer l’effet de l’innovation en matière d’organisation et de prestation des soins primaires, nous devons faire plus de recherches et extraire davantage de données.
Quand les Instituts de recherche en santé du Canada (IRSC) ont été fondés, le CMFC a insisté en vain pour la création d’un institut consacré à la recherche en soins primaires5. À l’époque, les IRSC étaient convaincus qu’il fallait plutôt intégrer la recherche en soins primaires et en santé communautaire au programme des 13 autres instituts. À présent, la recherche en soins primaires se retrouve sous-représentée au sein des IRSC et sous-financée.
Certes, les IRSC ont accordé un financement stratégique d’une durée limitée à la recherche en soins primaires, surtout dans les 6 dernières années. Même si une plus grande part du financement a été attribuée aux soins primaires au cours des 15 dernières années, au total, il représentait seulement 2 à 3 % de la totalité des fonds alloués entre 2014 et 2017. Pendant 15 ans, le financement de la recherche en santé communautaire est resté inchangé sous 0,2 % du total des fonds des IRSC. Ce n’est qu’en 2016–2017 qu’il a atteint 0,8 %. En outre, il est prévu que ces engagements financiers stratégiques diminuent au cours des prochaines années et prennent fin en 2022–20236.
Nous pensons que le peu de financement octroyé aux soins primaires et communautaires est dû à l’absence d’intervenants de ces domaines au sein du conseil exécutif des IRSC, des comités d’évaluation des demandes de subvention et des conseils consultatifs des instituts (actuellement, seulement 3 des 13 comptent des chercheurs en soins primaires parmi leur conseil). De toute évidence, avec l’approche actuelle, les IRSC ne parviennent pas à soutenir comme il se doit la recherche en soins primaires et en santé communautaire.
Soyons clairs, le CMFC reconnaît l’importance de la recherche scientifique fondamentale et de la recherche institutionnelle. Cela dit, les médecins de famille savent que leurs patients peuvent avoir des besoins de santé plus complexes que ceux couverts par des études expérimentales ciblant des affections précises. Nous devons déployer des efforts particuliers pour soutenir la génération de données probantes solides pour éclairer les politiques et la pratique. Pour ce faire, il faut absolument investir dans la recherche en soins primaires et en santé communautaire.
Le CMFC a préparé un document interne dans lequel nous proposons la création d’un Institut des soins primaires et communautaires intégrés aux IRSC. Nous y décrivons des mesures immédiates qui permettraient de contrer certains des défis relevés et par lesquelles les IRSC pourraient montrer qu’elles comprennent et soutiennent cet élément vital de notre système de santé : monter un cadre durable favorisant l’intégration de réseaux de recherche fondée sur la pratique, la collecte de données sur les soins primaires et l’accès à celles-ci ; renouveler le soutien financier et appuyer de nouvelles initiatives de financement stratégique pour les soins primaires et communautaires afin d’attaquer les enjeux prioritaires ; et, lors des concours ouverts de subventions des IRSC, surveiller systématiquement les demandes portant sur ces domaines, leur taux d’approbation ainsi que le financement accordé. Enfin, bien qu’un noyau très productif de chercheurs en soins primaires et communautaires réputés mondialement ait fait son apparition dans les dix dernières années, il est crucial d’établir une stratégie de formation et de soutien professionnel dans ces domaines de recherche.
Nous félicitons Dr Michael Strong, qui a été nommé président des IRSC. Nous savons que les IRSC ont l’intention de revoir leurs orientations futures, et que certaines obligations législatives seront assurément attachées à cela. Nous sommes également conscients que les IRSC subissent de nombreuses pressions. Néanmoins, la création d’un institut consacré aux soins primaires et communautaires parmi les IRSC est un impératif. Nous nous réjouissons que l’Association des infirmières et infirmiers du Canada, l’Association canadienne de soins et services à domicile et la Société de la médecine rurale du Canada songent à défendre avec nous cette proposition. Restez bien à l’affût des progrès sur ce dossier.
Remerciements
Je tiens à remercier José Pereira, Brian Hutchison, Artem Safarov et Deirdre Snelgrove pour leur aide à la rédaction de cet article.
- Copyright© the College of Family Physicians of Canada