Au moins 30 % des personnes de plus de 80 ans sont cliniquement fragiles1. Malgré ce fait, les résidents en médecine familiale peuvent obtenir leur diplôme sans jamais avoir mis les pieds dans un centre de soins ou avoir effectué une visite à domicile auprès d’une personne fragile. Il est temps que cela change. Notre idée dangereuse est que le Collège des médecins de famille du Canada fasse des soins longitudinaux communautaires aux aînés fragiles (visites à domicile et soins dans les centres pour aînés) une composante obligatoire de la formation. L’instauration de tels programmes offrira de nombreuses possibilités de changer les choses dans la pratique familiale et la prestation des soins de santé. D’abord, les résidents perfectionneront leurs habiletés cliniques en gériatrie, en médecine interne, en médecine d’urgence et en soins palliatifs, sans se fier à des tests exhaustifs en laboratoire et par imagerie, pour se fonder plutôt sur l’anamnèse et l’examen physique afin de poser un diagnostic. Les résidents apprendront aussi à offrir un agencement de soins curatifs et palliatifs, à la suite de discussions avec les patients et leur famille, ce qui s’inscrit à la fois dans l’art et la science de la médecine. Comme les patients confinés à la maison et dans les centres de soins sont un public captif, les possibilités d’établir des relations longitudinales médecin-patient sont nombreuses, ce que les programmes postdoctoraux ont de la difficulté à offrir dans des milieux d’apprentissage en clinique. En outre, lorsque les résidents sont exposés aux soins aux personnes âgées dans les centres et à domicile, ils doivent travailler avec une équipe d’autres soignants formels et informels. Ils peuvent ainsi mieux comprendre les soins en équipe. De plus, la prestation de services dans ces milieux procure aux résidents des occasions de voir le « contexte » des expériences que vivent les patients avec la maladie, les déterminants de leur santé, de même que leurs systèmes de soutien et leurs ressources. Enfin, avec le vieillissement de notre population, cette exigence de formation répondrait à un besoin croissant de soins primaires à domicile et dans les centres pour aînés. Il est temps d’amener tous les résidents sur la « ligne de front », là où habitent les aînés fragiles, et de permettre à la prochaine génération de médecins de famille d’acquérir de la confiance dans ce travail d’une importance grandissante.
- Copyright© the College of Family Physicians of Canada
Référence
- 1.